SILENCE, on coache !…

1/ Introduction : Le TAO du silence 

                     « C’est le silence entre les notes qui crée la musique »

Parole zen 

   Je me souviens encore de ce matin d’entreprise où, à peine installés à nos postes de travail, on nous annonça que l’un de nos collègues s’était enfermé dans sa voiture avant de se tirer une balle dans la tête. Silence de mort. Cet homme jeune souffrait depuis des mois de violents acouphènes qui ne lui laissaient plus aucun répit. Silence impossible. Je ne parvenais pas à mettre un visage sur ce nom ni à me rappeler si nous avions travaillé ensemble… Silence de la mémoire.

Le silence est une denrée rare de notre 21ème siècle, en même temps qu’il occupe une place considérable dans notre vie… jusque dans notre mort. Il est le fond sur lequel tout se détache : bruits et fureur à l’extérieur, tumulte des pensées et des émotions à l’intérieur. Un fond que l’on s’évertue à occulter, comme si chaque parcelle de silence devait être recouverte, suspecte d’être du temps non utilisé, donc du temps perdu.

- Le silence est un vide. Or nous fuyons tout ce qui ressemble au vide, sans doute par crainte d’y rencontrer notre « visage originel » [1]. Nous le remplissons alors d’objets, de relations, de loisirs, de bruit et nous nous complaisons dans cette « médiocrité bien remplie », oubliant ainsi que plus nous comblons le vide de notre existence par du superflu, plus nous privons notre vie d’essentiel.

- Le silence est un espace, un « espace affreux et captivant »[2], que nous avons envahi, occupé, et en partie détruit. Nous remplissons le vide de notre ennui par de la « distraction ». Se distraire de notre pensée, s’abstraire de l’essentiel ! Silence et déraison.

Société bavarde, où verbaliser est la règle et se taire l’exception, population connectée en permanence, cité tellement bruyante que certains citadins sont insomniaques quand ils sont à la campagne, et que certains juke-boxes proposent des disques de silence ! Silence et paradoxe.

Et pourtant… que serait la parole sans espace entre les mots, sans son rythme, sans sa respiration ni ses soupirs ? Que serait notre conscience sans ce vide où se déployer ? Que serait la musique sans les sept silences, de la pause au 1/16ème de soupir, sinon un bruit continu et vulgaire ? « Seul le silence est grand, tout le reste est faiblesse » disait Vigny.

Il y a toujours un mot, un soupir pour meubler le silence ; il y a toujours des silences pour séparer les mots. Et c’est l’union de la parole et du silence qui crée le sens, tant l’un est tissé de l’autre.

 Pour Maître Deshimaru[3], être silencieux, c’est revenir à l’origine de la nature humaine. Si l’on parle, ce doit être à partir de ce silence. Alors seulement « la parole devient profonde, le mot juste ».

 Dans le processus de coaching qui nous intéresse, le silence joue un rôle central. Si le discours exige de placer sa voix, le silence permet de placer sa pensée. Une pensée juste au sens du zen, une pensée authentique au sens spirituel, une pensée féconde au sens philosophique… et pratique.

A SUIVRE

[1] Kenneth White : « Une apocalypse tranquille ». Grasset 1985

[2] Charles Baudelaire: « Les Fleurs du Mal » (“Le gouffre”)

[3] Taïsen Deshimaru: « La Pratique du Zen ». Albin Michel 2000