SORA : Quand la complexité française freine les exploitants drones.
Alors que la date butoir du 31 décembre 2025 approche, marquant la fin de la transition des scénarios nationaux vers les scénarios européens, les opérateurs de drones français s’interrogent sur les implications concrètes de ce changement. Parmi ces préoccupations, l’avenir des « drones homologués à la française » soulève de nombreuses questions. L’abandon progressif des spécificités nationales au profit des drones de classe et des scénarios européens met en lumière les défis de l’analyse de risque SORA (Specific Operations Risk Assessment), qui devient une étape incontournable pour les missions hors des catégories standards.
Une transition problématique pour les drones sans classe.
Le passage aux drones de classe C5 et C6, condition sine qua non pour bénéficier des scénarios européens STS (Standard Scenarios), pose un défi de taille. Ces classes, encore rares sur le marché, ne rivalisent pas avec les performances des drones sans classe achetés par les exploitants français ces dernières années. Ces équipements, souvent hautement performants et coûteux, se retrouvent relégués à des utilisations limitées, comme les scénarios A3 de la catégorie ouverte ou des demandes d’exploitation spécifiques sous PDRA voire SORA.
SORA : entre harmonisation européenne et complexité française.
L’analyse SORA, pourtant conçue comme un outil pragmatique et adaptable, illustre les divergences entre les États membres et les pays comme la Suisse qui appliquent la réglementation européenne R945 et R947. Là où certains comme la Suisse favorisent une approche simplifiée et efficace, la France adopte une posture nettement plus exigeante. Les exploitants doivent souvent démontrer des niveaux de sécurité proches de ceux exigés pour des aéronefs commerciaux avec pilote à bord, disproportionnés par rapport aux risques réels associés à l’usage des drones.
Exigences françaises et obstacles administratifs.
En France, le traitement administratif des SORA est marqué par des exigences complexes, notamment sur des points tels que :
• Le confinement renforcé : Les attentes concernant les zones adjacentes et les mesures de confinement atteignent souvent des niveaux démesurés. Par exemple, évaluer l’impact potentiel d’un drone au sol revient parfois à analyser les conséquences d’un crash d’un Airbus A380.
• La rédaction et la validation des SORA : Alors qu’une analyse SORA en Suisse peut être finalisée en 50 heures environ, en France, elle peut nécessiter jusqu’à 200 heures de travail, sans compter les ajustements souvent multiples exigés par l’autorité de tutelle (DSAC).
• Les MoC 2511 et 2512 : Ces exigences, qui concernent les moyens de conformité aux critères techniques, sont fréquemment mal interprétées. Les exploitants se voient demander de démontrer, par des tests internes, des performances qui ont été établies par l’équipementier et validées selon les normes réglementaires en vigueur. Cela engendre des démarches supplémentaires, complexes et souvent injustifiées pour les exploitants.
Ces obstacles freinent les exploitants non-initiés et favorisent un marché pour des « kits SORA clés en main » coûteux (plusieurs milliers d’euros), souvent inadaptés aux spécificités françaises.
Des solutions envisageables pour une meilleure compétitivité.
La France gagnerait à s’inspirer de l’approche pragmatique Suisse, où les réglementations mettent davantage l’accent sur la sécurité effective que sur une accumulation de preuves administratives. Voici quelques pistes de réflexion pour simplifier l’accès au SORA en France tout en maintenant des niveaux de sécurité élevés :
Recommandé par LinkedIn
1. Harmonisation réelle des pratiques européennes : Les autorités françaises pourraient adopter des canevas similaires à ceux de la Suisse, facilitant ainsi l’intégration des opérateurs dans un marché européen unifié.
2. Formation et accompagnement : Des initiatives comme celles proposées par Aéro Pyxis, qui offre des formations en rédaction de SORA « à la française », doivent être multipliées et soutenues pour renforcer les compétences des exploitants.
3. Révision des exigences disproportionnées : Une évaluation pragmatique des risques et une simplification des démarches administratives pourraient réduire le temps et les coûts nécessaires à la validation des SORA.
Une opportunité pour la France de montrer la voie !
Malgré ces défis, la France, avec son expertise réglementaire et technique, peut jouer un rôle moteur en matière de simplification et d’innovation. Les acteurs de l’industrie, tels qu’Aéro Pyxis, avec son savoir-faire en matière de SORA et ses relations avec les autorités aéronautiques, sont bien placés pour accompagner cette transition. En valorisant une approche collaborative et pragmatique, il est possible de transformer ces contraintes en opportunités pour consolider la compétitivité des exploitants français sur le marché européen.
Il faut que la France revoie sa position pour aligner ses exigences avec celles de ses voisins européens. Seule une approche équilibrée permettra de préserver les intérêts des exploitants tout en garantissant un haut niveau de sécurité, à la hauteur des ambitions européennes.
Président du Groupe Aéro Pyxis
+33 554.545.330
Très instructif, merci Thierry
Advanced Air Mobility and Sustainability Expert @Bureau Veritas Group
1 sem.Antoine Taisant
Besoin d'une SORA ? Pilgrim Technology rédige régulièrement des SORA pour le compte de tiers. Pourquoi pas pour vous ?
Consultant senior - Constellation aviasupport founding member
1 sem.Avec un UTM fonctionnel, plus besoin de SORA. Depuis que l’on finance de la recherche sur l’UTM, il serait temps de voir des produits complets apparaître et être déployés ailleurs que sur les aéroports
🛩️ 𝗢𝗯𝘁𝗲𝗻𝗲𝘇 𝗹'𝗮𝘂𝘁𝗼𝗿𝗶𝘀𝗮𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗱𝗲 𝗹'𝗮𝘃𝗶𝗮𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗰𝗶𝘃𝗶𝗹𝗲 𝗱𝗲 𝘃𝗼𝗹𝗲𝗿 𝗮𝘃𝗲𝗰 𝘃𝗼𝘁𝗿𝗲 𝗱𝗿𝗼𝗻𝗲
1 sem.Pour avoir fait un bon nombre d'analyses SORA des deux côtés de la frontière, je pense que la différence est à mon sens encore beaucoup plus marquée que ce que l'article explique. En réalité l'Office fédéral de l'aviation civile a une approche très rigoureuse de la réglementation 2019/947 mais le personnel instruisant les demandes comprend que la SORA est uniquement un modèle et qu'il ne peut absolument pas remplacer le bon sens. De plus, l'OFAC fait tout ce qui est possible pour que les demandeurs aient des opérations économiquement viables. Il faut surtout ajouter qu'une autorisation SORA en France n'est pas du tout équivalente à une autorisation SORA en Suisse. En France les instructions portent surtout sur les buffers, le confinement et les atténuations et le demandeur se voit autorisé uniquement une opération sur une géographie de vol spécifique avec certains aménagements en termes de SORA générique lorsque le demandeur a de l'expérience. En Suisse, l'instruction est beaucoup plus conséquente et porte sur les procédures exactes du demandeur et le détail des OSOs mais le demandeur obtient une autorisation lui fournissant une pleine liberté d'exploitation sur tout le territoire (dans le cadre etablit dans sa SORA).