Suite à l'article de Marianne du 17 juillet 2023

Le journal Marianne publie ce matin dans son édition digitale un article sur les conflits d'intérêts des dirigeants et collaborateurs de Bpifrance qui seraient apparus quand la Banque a décidé de proposer aux Français de souscrire des parts d’un fonds d'investissement miroir de son portefeuille de PME et de startups, en octobre 2020, dénommé BE1. La Bpi s'inscrit en faux contre ces accusations. Il n'y a pas eu de prise illégale d'intérêt, pas d'information privilégiée et encore moins de braderie. Je pense utile de rappeler très simplement les faits suivants. Ils ont pour l’essentiel été transmis au journaliste dans le cadre de la préparation de son article, et nous lui avons proposé un échange avec les équipes de Bpifrance, malheureusement sans suite :


- La Bpi a souhaité démocratiser l'investissement non coté en France. Jusqu'à 2020 en effet, seuls les investisseurs capables de souscrire un ticket minimum de 100k€ pouvaient acheter des parts de fonds d'entreprises non cotées. Nous trouvions que ça n'était pas normal. Nous avons proposé à l'Etat et à la CDC de créer un nouveau produit, beaucoup plus accessible, avec un ticket minimum de 5000€. Nous l'avons fait pour orienter l'épargne des Français vers les PME et les startups.   

- Le fonds proposé aux Français est un Fonds commun de placement. Son capital est non garanti, tout peut être perdu. Il est par ailleurs impossible de retirer les sommes investies pendant 6 ans. Il est donc risqué, comme l'a indiqué l'AMF dans son avis, au point de recommander au management la prudence au moment d'en lancer la commercialisation.

- Le fonds contient des parts du capital de 1500 PME et startups françaises, c'est à dire 100% du portefeuille constitué dans les années 2005 à 2016 par les fonds privés financés par Bpifrance. Il n'y a pas eu de choix nominatif possible de la part des collaborateurs de la Banque, en fonction de leur connaissance des entreprises. Nous avons pris tous les fonds, et donc toutes les participations des fonds. Les bonnes comme les mauvaises.

- Le prix de vente des parts du fonds a été fixé de manière impartiale par une opération de marché dite "secondaire", par laquelle il a été demandé aux acheteurs institutionnels français et internationaux de proposer un prix pour acheter une tranche de 95M€. C'est à ce prix que l'enveloppe pour les particuliers, également de 95M€, a été commercialisée auprès des Français. Ce prix est le résultat d'une enchère ouverte et compétitive. Il est donc le plus élevé possible. Il a naturellement été validé par le Conseil d'administration de Bpifrance. Il n'y a aucune braderie là-dedans. 

- C'est précisément parce que le produit est risqué que seuls 200 collaborateurs sur 3500 ont souscrit. Ils l'ont fait pour 3,3ME, ce qui, contrairement à ce que dit l'article, n'est pas massif au regard des 95 ME levés. Parmi eux, moi-même et le Comex avons souscrit, et l'avons dit aux salariés, notamment pour manifester l'alignement des intérêts.

- Il n'y a eu ni prix préférentiel pour les salariés, ni période de pré-souscription pour eux, ni compartiment qui leur serait réservé. Ils n'ont pas eu non plus de conditions préférentielles pour sortir. Il n'y a donc aucun effet d'aubaine.

- Les 190M€ levés par Bpifrance dans cette opération ont été réinvestis dans les PME et les start up françaises.

- L'article se fonde sur le dernier rapport de la Cour des Comptes sur Bpifrance publié en juin dernier. Pourtant ce rapport ne pointe pas de manquement de la Banque sur ce sujet. Il recommande simplement de "maintenir un cadre déontologique rigoureux s'appliquant aux salariés de Bpifrance dans la gestion des fonds destinés aux particuliers".

- En effet, la Banque s'est constamment prémunie contre le risque de conflit d'intérêt. Les trois cabinets d'avocats consultés dans la période avaient par ailleurs conclu que "les collaborateurs de Bpifrance ne peuvent être regardés comme susceptibles de relever du délit de prise illégale d'intérêt" s’ils souscrivaient au fonds.

- La délibération du CA de Bpifrance en date du 17 décembre 2021 confirme qu'aucun obstacle juridique ou réglementaire ne s'oppose à la souscription par les collaborateurs de Bpifrance.

- L'ancien procureur près la Cour des Comptes cité dans l'article ne connaît pas le dispositif mis en œuvre. Pas plus que l’anonyme banquier d'affaires cité.

- Le Conseil d'administration de la Bpi du 17 décembre 2021 a cependant souhaité, qu'à partir de la seconde opération de placement, certains collaborateurs ne puissent plus être autorisés à souscrire. Il l'a fait avec la volonté d'annuler totalement les risques de réputation, vu le rôle de banque de place de Bpifrance, même en l'absence d'obstacle juridique.

- La performance du fonds BE1 est aujourd'hui plutôt bonne, mais inférieure à ce qu'en dit l'article. Surtout, elle est latente. Il reste encore 5 années pendant lesquelles elle peut soit monter, soit baisser. Il suffit d'un événement macro-économique sérieux pour que la valeur du portefeuille soit beaucoup diminuée.

- La démocratisation du Private Equity est en route, et c'est avec grande satisfaction que nous observons sur la place de Paris la multiplication des initiatives de vente de parts de fonds d'investissement dans le non coté aux particuliers. 

Jean-François Moreau

RSE et investissements stratégiques| Direction de projets| Innovations | Finance | Stratégie d’investissements | esprit d’équipe | portefeuille Produits | transformation Durable

1 ans

Merci M Dufourcq (ou à votre équipe communication) pour cette transparence et ce rationnel. Aviez vous prévu ce type de crise dans le risk management de BPI France ? Cela fait écho pour moi à d'autres crises lancées par certains journalistes ou réseaux sociaux sur de l'émotionnel qu'il faut ensuite gérer très finement en communication de crise pour ne pas couler l'image de l'entreprise (et/ou de ses dirigeants) sur des dizaines d'années. Sur le fond, bravo à l'équipe BPI pour son initiative pour démocratiser l'investissement non coté en France. Peut être que ce journal antidémocratique n'a pas apprécié...

Franck LEDY

Responsable conformité et RCSI chez BFCM

1 ans

Amicus curiae …

Dogad Dogoui

Public Affairs & Business Consultant, Chairman Africa SMB Forum, Senior Advisor de Gaulle, Fleurance & Associés, Founder of Africagora (1999), IVLP 2010 (USA), Special Representative of WUSME (World Union of SMEs)

1 ans

Bravo Nicolas Dufourcq pour ce droit de réponse argumentée. Il est grand temps d'initier l'éducation à l'économie et à la finance dès l'école secondaire

Toujours aussi fier et heureux de travailler pour Bpifrance dans cette polémique qui fleure la pâquerette

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