Témoignage d’une malade bénéficiant de Soins Palliatifs

En 2013, j’ai eu un cancer du sein. J’ai été suivie par un oncologue à qui j’ai fait confiance. J’ai eu une opération chirurgicale, de la chimiothérapie et des rayons. Grâce à cela, j’ai été en « rémission » pendant environ 4 ans.

Ce cancer hormonal est revenu en se déplaçant sur les bronches. J’ai donc revu ce même médecin, mais là, ça s’est très mal passé. Les différentes situations qui pouvaient me mettre en difficulté ne m’ont pas été expliquées, comme, les étouffements et comment réagir, quelles bonnes doses de médicaments prendre dans ce cas, qui appeler en cas de doute, etc… Il n’a pas pris soin de moi et pire, j’ai terminé aux urgences à l’hôpital, je ne pouvais plus respirer. C’est là que j’ai réalisé que je n’avais pas été réellement accompagnée dans la 1ère étape de la maladie. C’est ma famille qui s’est occupée de moi.

J’ai changé d’oncologue.

J’ai rencontré un médecin pro soins palliatifs, ça a été une rencontre essentielle. Il m’a dit que mon cancer n’était pas guérissable mais qu’on pouvait le « contenir », ce à quoi j’ai répondu que « ce qui m’importe c’est la qualité de vie plutôt que la quantité de vie ». Je voulais le moins d’examens possible et le moins d’interventions (radios lorsque je me cassais les côtes, à répétition). Je voulais vivre au jour le jour, vivre l’instant présent et profiter de ce qui m’était donné.

C’est pourquoi ma demande de participation avec l’équipe médicale a beaucoup contribué à mon autonomie. Il ne faut pas oublier que chacun peut être acteur de sa vie et donc, il ne faut pas hésiter à demander des explications à l’équipe médicale et à faire valoir nos droits pour accéder aux soins palliatifs comme il est mentionné dans la Loi Claeys Leonetti.

Après discussion avec l’oncologue, je me suis sentie écoutée et bien comprise dans mes souhaits, il a été décidé un traitement d’hormonothérapie (une piqure par mois) moins agressif que de la chimio.

Depuis février, je vis de cette manière là avec l’équipe de soins palliatifs, ma famille et mes proches. Tous les échanges se passent quasiment par téléphone avec quelques consultations à l’hôpital si besoin.

Les gens mes disent « mais Caroline, tu ne veux pas demander un scanner ? une radio ? » ce à quoi je réponds « je n’ai pas plus de raisons de passer de nombreux examens médicaux complémentaires que qui que ce soit, à partir du moment où je suis très bien suivie et très bien soignée ».

Je profite de la vie malgré mon cancer, je peux manger ce que je veux, j’ai mes cheveux, je peux passer du temps avec ma famille, mes amis, c’est la vie !

Je n’aime pas le terme « se battre » je préfère « accueillir ». C’est comme le surf, je suis sur la vague et je me laisse aller dans son sens. Souvent, c’est l’homme qui veut maîtriser la vie, la maladie, alors que c’est inéluctable. Je ne vais pas guérir, c’est sûr mais en revanche, j’ai aujourd’hui de très bons moments qui peut-être pourront se poursuivre plus longtemps que lors d’un traitement plus « agressif ». Tout est décidé avec l’équipe médicale, nous sommes partenaires. C’est bien plus confortable et rassurant pour moi. Paradoxalement, je suis moins physiquement dans les hôpitaux, je vois moins de soignants et pourtant je me sens beaucoup mieux prise en charge, écoutée, accompagnée, entourée et protégée (même pas peur alors que je vis seule à la maison !).

C’est à ce titre que le débat sur l’euthanasie ne se pose pas au bon moment. On l’aborde alors que les personnes sont déjà dans un système qui les déshumanise et les laisse parfois dans des situations de grande détresse humaine. C’est en amont qu’il faut penser l’accompagnement, avant d’entrer dans tout protocole afin de vivre cet accompagnement jusqu’au bout, jusqu’à la fin de la vie.

Il faut remettre l’accompagnement au cœur du système médical, c’est essentiel. Par exemple, au début de ma maladie, j’ai eu des fractures spontanées de vertèbres. A l’hôpital, je me suis rendue compte que pour le médecin je n’étais rien d’autre qu’un cas avec un numéro, or je suis une personne entière qui a besoin d’être respectée et considérée. Les soins palliatifs c’est essentiel, mais pas que pour la fin de vie, dès le démarrage de la maladie, l’accompagnement en soins palliatifs c’est prendre la personne dans sa globalité, je ne suis pas seulement six vertèbres fracturées.

On n’a plus cette logique des médecins de famille qui pensaient les patients dans leur globalité parce qu’ils connaissaient leur parcours, leur famille. IL faut reconstruire l’humanité dans le système de santé. Dès les études en médecine, il faut éduquer les futurs médecins à une prise en charge globale du patient et pas uniquement au moment de la fin de vie. C’est une culture à instaurer pour la fin de vie bien évidemment mais aussi pour toute la médecine en général.

Sylvain Serrano

Enseignant en Activités Physiques Adaptées et Santé chez MGEN

3 ans

Et qu’en est-il des Activités Physiques Adaptées en soins palliatifs à ton avis Joël ? 😜

Agnes Mazic de sonis

Md Pain medecine chez Chirec delta hospital

3 ans

Merci revenir à cette logique des médecins de famille toute en multidsciplinarite à l’écoute attentive rigoureuse et empathique . que ce soit en clinique de la douleur ou soins de suite ,les soins intégrés redonnent une qualité de vie

Frederique LELIEVRE

Directrice d'agence - Adecco France Lamotte Beuvron

3 ans

Quel témoignage intéressant !! A quand la prise de conscience de cet accompagnement. Merci jojo

Dominique Mettoudi

Psychologue clinicienne, Psychothérapeute

3 ans

Merci Joël pour ce beau témoignage

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