Une école "du dehors"
Les espaces et outils à Educaterre dans le Chablais Suisse

Une école "du dehors"

Je reprends ici le récit des visites inspirantes de notre périple familiale et initiatique, avec aujourd’hui la pépite de ma quête dans ces rencontres et une journée mémorable pour toute la famille de l’UniVerTour.

🚸Le jeudi 19 mai 2022 nous avions rendez-vous avec Chloé, institutrice pas comme les autres, et ses élèves, pas comme les autres, dans un petit coin de paradis dans le Chablais en Suisse, pour passer une journée à l’#école, pas comme les autres : Educaterre, une « école du dehors », « école de la forêt », « école nature » … appelez cela comme vous voudrez.

Le principe ?  Il y a très peu d’aménagements en dur et la classe se fait en extérieur (les chaises sont des rondins de bois disposés en demi-cercle, un tableau est posé au sol, des caisses plastiques servent à stocker livres, crayons, cahiers et autres petits matériels et les protéger des intempéries). Même le vestiaire est à l’extérieur (sous abri tout de même), les toilettes sont sèches, l’eau est récupérée. Il y a juste un bâtiment avec un petit espace cuisine et qui permet le rapatriement en cas de très mauvaise météo (uniquement utilisé quelques jours dans l’année). Enfin le site accueille une grande serre dont la partie centrale permet de faire classe (les sièges en bois ont été troqués par des bottes de paille).

Ce site est appelé « Pépi » par ses usagers : c’est un vaste terrain herbacé, assez arboré et parfois maraicher, propriété de Maud. Il est désormais occupé en grande partie par l’école Educaterre mais aussi en #partage avec d’autres acteurs comme des associations et artisans locaux. Justement ce jour-là ils installaient les stands d’un marché qui se tiendrait le weekend à suivre.

Concrètement cette école compte deux classes : une classe de petits (P1/P2 – référence au système suisse) de 4 à 6 ans et une classe de grands (P3/P4) de 6 à 8 ans, encadrées par deux enseignantes de formation « classique » et un stagiaire très ouvert et intéressé par ce mode d’éducation (et par notre voyage et les apprentissages potentiels que cela apportent aux enfants). Chacune a son espace ressource au sein de la Pépi et un espace classe en extérieur clairement délimité.

🌼La journée, tout comme dans l’école classique, est assez ritualisée. Cependant la nature (le « vivant » ? 😉), l’écoute de ses émotions et des autres ont une place encore plus grande : c’est-à-dire que c’est formalisé, clairement évoqué, discuté et partagé. Ainsi chaque jour les élèves racontent ce qu’ils ont préféré, explicitent leur météo intérieure, détaillent ce qui leurs a déplu, à différents moments et plus particulièrement lors du « conseil » qui clôture la journée de classe.

La matinée est consacrée aux enseignements appelés « entrainements » : français et maths essentiellement (le « reste » vient par l’environnement et le mode éducatif en extérieur, le volet « vivre ensemble » comprend un temps dédié en fin de matinée). Ces matières s’apprennent ici via des activités qui se font majoritairement en groupe : le #collectif est une valeur très forte. Beaucoup de place est laissée aux #jeux libres et grâce à des espaces aménagés qui favorisent la motricité fine et la créativité. Par exemple, et toujours en extérieur, on trouve un établi (très bien achalandé avec les mêmes outils que pour adultes : pas de jouets ni de fausse scie ou pseudo marteau) ; un atelier peinture inspiré de l’artiste Rudolf Steiner : il y a des pots de peinture refermables sur un grand présentoir, une bâche tendue sur le mur d’une roulotte avec des pinces pour y coincer sa feuille de papier et un fil à linge pour faire sécher son œuvre.

Chaque demi-journée est conclue par le remplissage des « agendas » : sorte de cahier du jour où les enfants notent la date, ce qu’ils retiennent (évolution à noter des P1 aux P4). On les a rapprochés et comparés avec les carnets de voyage de la SoNaTim qui ont fait leur effet et beaucoup plus aux élève d’Educaterre (et au stagiaire 😊).


Les classes et l'atelier peinture de la Pépi



Midi arrive, c’est l’heure du « diner » (traduisez déjeuner dans le langage suisse). Toujours en #extérieur, si besoin était de le préciser, sur des tables basses près des vestiaires. Chacun a apporté sa « popote ». Ce sont les enfants qui débarrassent et nettoient les tables. Puis ils se brossent les dents.

Après un temps libre c’est l’heure du « gardiennage » : comprenez le rangement. D’abord de ce que l’on a utilisé (bricolage/outils ; peinture / pinceaux) puis de l’ensemble de la Pépi.

🌳Ensuite c’est le moment du départ en #forêt pour la dernière partie de cette journée d’école pas comme les autres (environ de 13h30 à 15h) : après s’être badigeonné d’anti-tiques et de crème solaire, avoir rempli les gourdes et apporté les agendas, tout le monde est paré et attaque les quelques minutes de marche qui séparent ce grand jardin de la forêt avoisinante. Une fois arrivé, chacun s’assoit auprès de l’arbre qu’il a choisi pour un moment de ressourcement… chut… silence… Jusqu’au coup de sifflet (même le sifflet est doux dans cette école, à ma surprise : Chloé nous explique qu’elle a d’ailleurs eu du mal à le trouver).

Chloé rassemblent les classes en cercle sur des rondins de bois (on devine la possibilité de tendre une grande bâche, signe que la pluie n’arrêtera pas les sorties quotidiennes en forêt) : élèves, instits et stagiaire peuvent s’exprimer pour proposer un « atelier ». La répartition (dispersion ?) se fait sur libre arbitre, des ateliers sont souvent gérés en #autonomie pas les enfants, d’autres animés par les enseignantes (méditation pour Chloé, préparation de panneaux pour le marché du weekend pour sa collègue, jeux perchés pour le stagiaire – à moins que ce soit proposé par un élève et qu’il ne fasse « que » y participer 😅). Et vient le temps du rassemblement pour remplir les agendas et réunir le conseil avant de retrouver parents, grands-parents ou une garde « périscolaire » assuré par des bénévoles de l’association.

Nous sommes tout chamboulé de cette journée d’école passé à la Pépi, des étoiles dans les yeux, des idées dans la tête. Alors oui je ne vous cache pas qu’il nous a quand même semblé que le niveau d’apprentissage de ces enfants n’était pas équivalent à celui des enfants (français) du même âge. Cependant est-ce grave ? Je veux dire est-ce irrattrapable surtout à cet âge-là ? En parallèle ces bambins ont une forte autonomie, une belle capacité d’#adaptation et d’#auto-apprentissage, une grande débrouillardise et aisance dans leur milieu qui sont assez surprenantes. Ils ne savent sans doute pas (si) bien écrire et compter mais ils connaissent un tas (d’autres) choses. Ces deux instits sont épatantes et cette réussite leurs ait grandement due : leur dévouement, leur patience, leur passion est le socle de cette belle initiative. Enfin bien sur le site est parfaitement adapté, quoi qu’isolé.

💡Du coup, il y a selon moi énormément d’enseignements à tirer de cet exemple inspirant pour l’école entre 4 murs. Sans créer des écoles totalement du #dehors, aménager des espaces extérieurs et organiser plus de sorties "nature" serait un premier pas. Nous pourrions également d’avantage favoriser l’autonomie et faire confiance aux capacités d’apprentissage manuels de nos enfants (et donc ne pas attendre d’eux qu’ils reviennent propres dans leur beaux vêtements mais plutôt qu’ils aient su faire une cabane par eux même, construire un bateau avec du bois ramassé, etc.).

L'établi et les ateliers en forêt

Déjà insuffler quelques idées, projets, méthodes dans les pratiques et le contexte existant afin de le faire évoluer (puis basculer ?) vers un apprentissage de la transition écologique à l’école serait une première brique d’un nouveau #récit pédagogique : vers plus de manipulation, vers une intégration du vivant dans les pratiques comme dans l’adaptation dans (à ?) son environnement. Ce qui me parait utile (pour ne pas dire nécessaire) dès aujourd’hui... Et pour demain assurément.

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