Valeurs d’entreprise : mobiliser sans survendre
Affirmer des valeurs claires et portées avec sérieux est un atout majeur pour l’entreprise. Cela contribue à lui donner une personnalité qui la démarque, aidant à conquérir et fidéliser clients et talents. Cela permet de mobiliser les équipes sur des intentions partagées, qu’il s’agisse de cultiver ce qui fait sa différence ou de réussir des transformations. Cela répond aussi à une attente croissante de sens, critique pour l’implication des salariés. Apple, Danone, Hewlett-Packard, Michelin ou encore Yves Rocher sont quelques exemples d’entreprises qui ont su réellement tirer parti d’une identité forte et distinctive.
Mais valoriser son identité est devenu un exercice délicat. En effet, on observe une défiance accrue envers les discours officiels. Les scandales des dernières décennies ont rendu les citoyens et salariés sceptiques. La tentation de répondre à des attentes croissantes en matière de responsabilité sociale, par exemple, a conduit à repérer régulièrement des écarts entre les discours et les pratiques. Cette sensibilité à la perception d’insincérité crée des risques de réputation, notablement renforcés par les réseaux sociaux. Ainsi, un sondage TNS-Sofres de 2009 a montré que 44% des utilisateurs du web français apprécient qu’Internet pèse sur le comportement des entreprises et que 20% ont déjà dénoncé en ligne des entreprises ayant mal agi à leurs yeux. S’interdire les pratiques douteuses ne suffit pas à être exempté : de simples incohérences dans le discours ou des déclarations trop pompeuses sont rapidement l’objet de critiques. L'entreprise doit donc être très vigilante pour que les éléments qu’elle met en avant dans sa communication ne puissent être retournés contre elle.
Cela invite non pas à renoncer à affirmer de réelles ambitions, mais à veiller à rester humble dans son discours. En particulier :
- Graduer son ambition en paliers. C’est ce que fait General Electric en matière d'engagement environnemental, avec son programme Ecomagination. Sur la page Internet du programme, le groupe présente en parallèle les résultats obtenus en 2015 en quelques chiffres clés, ainsi que les objectifs pour 2020. Cette double communication sur le présent et le futur permet d’ancrer son image d’acteur écoresponsable sur une base à la fois ambitieuse et réaliste.
- Être honnête sur les difficultés rencontrées. Morning Star est un leader américain de production et de transformation de tomates. L’entreprise a pour spécificité de fonctionner depuis de nombreuses années en auto-organisation : ce sont les équipes qui se fixent leurs objectifs et s’organisent directement avec leurs collègues – approche popularisée depuis sous le nom d’entreprise libérée. S’agissant de l’élément fondateur de son identité, Morning Star communique amplement sur cette spécificité. Cependant, elle se garde bien de se présenter comme l’organisation idéale. Elle reconnaît qu’il s’agit d’un modèle expérimental, que l’entreprise continue de tester et d’affiner jour après jour. Elle a créé un Self-management Institute qui permet les échanges et partages d’expérience entre ceux qui sont intéressés par cette façon de concevoir les relations dans l’entreprise. Cette approche lui permet de valoriser son engagement sans pour autant proclamer de grandes déclarations susceptibles de décrédibiliser la sincérité de sa démarche.
- Assumer ses écarts et erreurs. Il peut arriver que l’entreprise se comporte de façon contraire aux valeurs qui lui sont chères. Elle peut alors être tentée de passer la situation sous silence. Mais chercher à masquer ou déguiser un écart fera courir le risque d’être taxé d’hypocrisie, jetant alors le doute sur la sincérité de l’ensemble des intentions affichées. Alors qu’admettre qu’on a dû faire un choix peu conforme avec l’habitude de l’entreprise et expliquer pourquoi peut forcer le respect. C’est ce qui s’est passé pour AES, groupe mondial de production et distribution d’électricité. En 2001, l’entreprise s’est trouvée au bord de la faillite. Elle a dû prendre la décision rapide de vendre certaines centrales. Or, AES fonctionnait comme une entreprise libérée, selon des règles strictes garantissant l’auto-gouvernance des équipes. En particulier, aucune décision ne devait se prendre sans avoir appliqué le principe de sollicitation d’avis : chaque collaborateur potentiellement impacté devait avoir été consulté. Avec 40 000 collaborateurs dans le monde, c’était impossible compte tenu de l’urgence. Le dirigeant a exceptionnellement décidé de suspendre temporairement cette règle. Mais il l’a fait de façon à minimiser le risque que les salariés ne croient plus à l’auto-gouvernance. Il a précisé que la règle n’était suspendue que pour une durée limitée, sur un domaine de décision bien précis. Il a aussi exprimé son profond regret de ne pouvoir faire autrement. Il a ainsi pu préserver la confiance des salariés et des observateurs.
Pour mobiliser sur ses valeurs, on est naturellement tenté d’être « aspirationnel » : diffuser des discours inspirants, mettre en valeur ses plus belles réalisations, prendre des engagements qui frappent les esprits… Ce faisant, il faut prendre garde de ne pas se laisser dériver vers la langue de bois. Ambition et sincérité ne suffisent pas. Pour convaincre, il faut y allier la démonstration de son réalisme, de sa lucidité et de son humilité.
Article fondé sur la Synthèse Manageris Se démarquer par son identité d’entreprise.
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GS & A Senior consultant pour les entreprises industrielles dans leur projets de développement et communication (relations institutionnelles)
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