Vers un enseignement distanciel généralisé ? A quel prix ? et pour qui ?
19 Mai 2020. Comme beaucoup d'autres femmes et beaucoup d'autres personnes je sors, épuisée, de longues semaines de confinement. Comme beaucoup d'autres enseignant·es je sors, rincée, de longues semaines de "continuité pédagogique". Et j'en profite pour préciser d'emblée que j'ai mobilisé tous les moyens techniques et pédagogiques pour assurer la continuité pédagogique dans mon métier d'enseignante à l'université comme pour mes deux enfants, âgé·es de 9 ans et 5 ans. Je ne suis pas une technophobe rance. Mes contenus de cours (diaporamas) sont à disposition des étudiant·es en ligne depuis des années. J'ai expérimenté divers dispositifs pendant le confinement, avec succès d'ailleurs je crois.
19 Mai 2020. Madame Frédérique Meunier, députée, dépose une proposition de loi visant à instaurer l'enseignement numérique distanciel dans les lycées, collèges et écoles élémentaires.
Après avoir listé les dispositifs existant (en mélangeant joyeusement MOOC, SPOC, E-learning et autres Environnements numériques de travail), la députée indique que "toutes ces solutions doivent aujourd’hui être explorées dans l’éducation pour assurer aux élèves un enseignement distanciel comme une alternative au présentiel".
Quel argumentaire la députée à l'origine de cette proposition de loi déploie-t-elle ? "Pour les universités, cela pourrait éviter des frais de logement et d’études aux étudiants dont les parents ne peuvent assumer des études longues et coûteuses. Pour les lycées et collèges, cela permettrait aux élèves de trouver sur la plateforme dédiée les cours en ligne, en vidéo, avec une interactivité avec l’enseignant sur des moments spécifiques. (...). Enfin, pour les écoles élémentaires, cela permettrait aux parents et aux élèves de retrouver les devoirs et les cours à la maison."
Je crois indispensable de demander une évaluation réelle, en profondeur et sous tous leurs aspects de ces dispositifs d'enseignement distanciel. Quelle relation pédagogique ? Avec quel·les élèves ? Qui sont celles et ceux qui ont décroché ? Et qu'en coûte-t-il vraiment, et pas seulement sur le plan financier ? Certes on évite les frais de logement pour les étudiant·es, mais quid de la découverte de nouveaux environnement de vie, de l'émancipation offerte par la possibilité de quitter le cocon familial quand on est un jeune adulte ? Et qu'en coûte-t-il aux parents (aux mères le plus souvent) accompagnant des jeunes et des enfants ainsi scolarisés en distanciel ? Qu'en coûte-t-il en matière d'organisation du quotidien, d'agencement de leurs apprentissages et de leurs objectifs aux vies et carrières parentales ? Qu'en coûte-t-il en termes de perte du lien social avec des camarades de classe ?
L'école, comme le collège, le lycée ou l'université, ne sont pas seulement des lieux d'apprentissage. Ce sont aussi des lieux de vie. Et moi je n'ai aucune envie de ne vivre ma vie, de femme, de parent, et d'enseignante, qu'en distanciel.
Maître Ouvrier principal Électricien Hospitalier CHU Martinique ( CAP - BEP électricité) à la retraite, en cumul emploi-retraite technicien en maintenance climatique en CDD
4 ansJe vous souhaite du courage et de la bonne positivité. Merci du partage
AUTRICE COACH en ECRITURE
4 ansArticle qui m'a montré les enjeux de l'enseignement sur les plans humains, de genre, sociétaux, d'enseignement, de façon pédagogique et plaisante avec le schéma :-) Merci Muriel! Je retiens une phrase: "Je crois indispensable de demander une évaluation réelle, en profondeur et sous tous leurs aspects de ces dispositifs d'enseignement distanciel". Hâte de lire la suite!
Responsable des programmes chez L ETRE EGALE
4 ansDonc, parce qu’on ne donne plus de bourses, qu’on ne trouve pas comment loger les xn--tudiant-9xa.es et encadrer les loyers dans les villes recherchées, attirer les etudiant.es dans des universités des villes moins onéreuses ... on va tanguyiser l’éducation! L’enseignement à distance, les classes inversées ont plein de vertus pédagogiques. Pallier le manque de moyens des politiques publiques alloués aux bien-étudier des etudiant.es n’en est pas un!
Coach en écriture pour entrepreneur.es et entreprises : je vous aide à délivrer des messages écrits impactants pour renforcer votre branding.
4 ansTellement d accord! L'enseignement n'est pas qu'une transmission de savoirs. C'est un enseignement de la vie. Que vont devenir les générations futures sans interaction sociale? Quelle tristesse ! Mais tout cela ne m étonne pas du tout. Depuis le temps que l on pousse vers cela, en tout cas dans le supérieur. Ça rapporterait de l argent. Pourquoi? Parce qu une fois le cours fait et publié par le professeur, facile de le vendre et revendre à des étudiants étrangers.... sans payer et repayer le professeur bien sûr !
Human Computation - Data Ops - AI
4 ansMerci d’attirer l’attention sur cette proposition de loi. Mère de deux enfants et travailleuse à temps plein, je viens également de passer deux mois à faire des meetings à distance au lieu de produire du travail et d’essayer d’instaurer une continuité pédagogique pour les enfants (le plus grand étant en équivalent CP). Deux remarques. En tant que parent je constate qu’un enfant d’école élémentaire n’est pas capable de rester seul derrière un écran pour « apprendre » et que la présence ACTIVE d’un parent est requise. Par ailleurs il me semblait que la loi française n’autorisait pas les devoirs pour les enfants de moins de ... (12 ans ?). En tant que professionnel de l’informatique, j’ai vu ces dernières années, de l’intérieur, comment étaient conçues, développées et « localisées » les principales plates formes d’e-schooling des géants de la tech. L’architecture fonctionnelle de ces applications doit nous inquiéter au plus haut point. Elle ne reflète en rien notre manière d’enseigner de d’apprendre et vise essentiellement à formater des enfants à des logiques d’apprentissage éloignées de notre culture.