Vrai-Faux (Eco. Fr.)
Les Gouvernements changent mais l'Administration reste et elle n'est pas toujours bonne conseillère comme en témoigne les débats économiques de ce début de Présidence Macron. Comme à l'accoutumée le débat économique se politise en France suivant des références idéologiques assez éloignées des réalités. A titre d'illustration, je vais donc vous proposer une analyse critique pour essayer de tirer le vrai du faux d'une première sélection de mesures proposées par le Gouvernement.
Commençons par les Ordonnances Pénicaud sur le Droit du Travail. En tant qu'économiste tourné vers l'avenir, je dois reconnaître qu'elles constituent un pas, timide mais réel, dans la bonne direction mettant un terme à l'embolie soviètisante du Code du Travail qui avait prévalu jusque là. Elles annulent les mesures défavorables aux TPE/PME prises sous François Hollande et reprennent contact avec les contraintes économiques au niveau des indemnités Prud'Hommales. Elles allègent certaines contraintes pesant sur les plans sociaux et les licenciements qui rigidifiaient la gestion RH des entreprises...Ce n'est pas suffisant pour dynamiser l'emploi mais au moins on arrête de le pénaliser. Comme beaucoup j'aurais aimé qu'on aille plus loin dans la flexibilité contractuelle en commençant par la remise en question de la hiérarchie des normes notamment en ce qui concerne le rôle que je considère obsolète des "branches". Mais ce sera peut-être pour une prochaine fois...
Autre point controversé, les Aides Personnalisées au Logement (APL). Poussé par ses contraintes budgétaires et une fièvre libérale, le Gouvernement nous a annoncé une baisse en invoquant l'argument que les APL bénéficient aux propriétaires et font monter les loyers... Quiconque est présent sur le marché de l'immobilier comme locataire ou propriétaire sait que seules des conditions de marché bien particulières permettent à des propriétaires d'extraire du locataire une "prime" de loyer égale à son APL...Les Caisses d'Allocations Familiales (CAF) qui versent les APL sont trés rigoureuses dans leur gestion et veillent aux abus. Donc l'APL porte bien son nom et permet l'accès au logement des plus défavorisés, ce qui, l'expérience le démontre, améliore leur employabilité. Au risque de surprendre, je considère que, malgré leur coût, elles figurent parmi les dernières aides au logement à supprimer. Vu la politique monétaire en vigueur, on pourrait s'attaquer aux subventions au crédit immobilier, aux subventions "vertes" au logement, aux niches fiscales de type Pinel pour la construction et bien d'autres encore qui ne satisfont aucun besoin vital...
Venons en à l'Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF). C'est un mauvais impôt (devenu très coûteux vu les rendements moyens des actifs) que la France devrait supprimer dans la mesure de ses moyens et non pas amender selon les critères très discutables proposés par Emmanuel Macron. Il est faux et suranné de croire que l'immobilier est source de "rentes" et constitue un investissement économiquement moins "souhaitable" que les actifs mobiliers... L'immobilier est soumis aux conditions du marché et ses revenus aussi ce qui exclut toute "rente". Il doit correspondre à une demande de logement pour fournir un revenu ou un service d'où son utilité économique. Sa "production" et son entretien "nourrit" autant d'emplois qu'une société par action ou une obligation d'Etat. La réforme proposée par le Gouvernement est défavorable de surcroît aux classes moyennes supérieures qui investissent davantage dans l'immobilier que les grandes fortunes. Enfin pénaliser l'investissement immobilier c'est pénaliser la construction de logement, la dernière des choses dont la France a besoin. Donc pour l'ISF, c'est tout ou rien.
La hausse de la Cotisation Sociale Généralisée (CSG) proposée est une mascarade pour augmenter les prélèvements obligatoires. Si la hausse affectera bien presque tous les revenus, sa compensation par une baisse de charges sociales pour "créer du pouvoir d'achat" est illusoire. A moins d'obligations légales spécifiques, les baisses de charges bénéficieront aux employeurs et non aux salariés à court ou moyen-terme. Plus généralement, on ne peut que déplorer le niveau devenu extrêmement élevé de la CSG qui perd petit à petit tout lien avec sa raison première: le financement des prestations sociales en complément des cotisations sur les salaires.
Politique d'Investissement: on ne peut que louer le souhait de Bercy de vendre certaines des participations de l'Etat pour financer de l'investissement public...Mais il serait préférable de consacrer ces fonds à l'amélioration de la productivité et à la réduction des coûts de fonctionnement de l'Etat qui en a bien besoin (par des investissements numériques par exemple) plutôt que de se substituer au privé, très vraisemblablement à perte, dans le financement de l'Innovation... N'oublions pas que, la politique monétaire étant ce qu'elle est, il n' y a en principe aucun besoin d'argent public pour financer de l'investissement économiquement viable.
Autre cas délirant, la fiscalité foncière locale...Mais ce sera pour une autre fois. Attendons que le Gouvernement et les Parlementaires avancent dans leurs réflexions en espérant que le bon sens finisse par dominer...