Web 3, la nouvelle guerre digitale : reprendre le pouvoir aux géants du numérique
Le Web est à l’aube d’une mutation profonde, porteuse d’un nouvel espoir : le Web3, plus respectueux des données personnelles et véritablement collaboratif.
Suite à la sortie de mon nouveau livre "Web 3, la nouvelle guerre digitale" découvrez mon interview pour les éditions Dunod afin de comprendre ses enjeux et ses applications.
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En quelques mots, qu’appelons-nous le Web3 ?
Le terme Web3 fait référence aux Web 1.0 et Web 2.0 qui ont désigné deux premières révolutions d’usages :
- l’arrivée des moteurs de recherche et la connexion des documents, qui ont permis aux internautes de s’informer, c’est le Web 1.0.
- puis les médias sociaux et la connexion des personnes avec les réseaux sociaux, ont offert aux internautes la possibilité de s’exprimer et se mobiliser, c’est le Web 2.0.
Avec le Web3 survient la connexion des valeurs entre elles, les fameux cryptoactifs, basés sur la blockchain et la possibilité pour l’internaute de posséder une partie du monde numérique via l’acquisition de cryptoactifs (tokens/NFT et coins). Web3 a été privilégié à Web 3.0 pour le différencier de l’évolution sémantique du web, la connexion des données entre elles, mais voilà qui complique beaucoup les choses ! Le Web3 est donc un ensemble d’applications et de services construit sur une architecture décentralisée et qui fournit de nouveaux usages en donnant à l’utilisateur un droit de propriété.
Pourquoi constitue-t-il une opportunité pour les Européens de contrer les Gafam ?
Le modèle des GAFAM est totalement centralisé : en étant la porte d’entrée principale sur de nombreux usages (l’Appstore d’Apple, le magasin d’Amazon, les contenus de Meta…), ils ferment l’accès aux marchés rendant les entreprises dépendantes de leur plateforme et collectent massivement des données personnelles, plaçant les utilisateurs sous le contrôle de leurs algorithmes opaques. L’Europe cherche à lutter contre cette situation par la loi (RGPD, DMA, DSA) et cela affaiblit les GAFAM, mais ne renverse pas le modèle.
Pour la première fois, avec le Web3, survient une rupture technologique telle, via la décentralisation, qu’ils ne peuvent l’absorber à moins de se réinventer totalement. Meta (Facebook, Instagram, Whatsapp) tente bien de le singer, en lançant son métavers en pleine effervescence autour du Web3, pour se donner l’apparence de la décentralisation. Mais c’est un leurre et le métavers de Meta ne fera que renforcer l’omniscience de Meta sur nos vies ! Si les utilisateurs embrassent le véritable Web3 et son ambition, c’est, pour la première fois, une véritable menace pour les GAFAM.
Quelles sont les 3 grandes ambitions du web3 et de cette nouvelle guerre digitale ?
Les principes de l’idéologie décentralisée qui avaient à l’origine dans le viseur les institutions et les banques ont quelque peu évolué dans cette nouvelle guerre digitale contre les GAFAM mais en restant fidèles à leur philosophie.
Le premier principe est de redonner à l’utilisateur le pouvoir sur ses données personnelles. La protection de l’identité numérique a été la grande oubliée dans la création du web et le Web3 veut corriger ces défauts originels.
Le second principe est celui du partage de la valeur (le tokenomics) car les GAFAM, en ayant centralisé le web, ont également concentré la création de valeur sur leurs seules plateformes. L’utilisateur bénéficie de la gratuité du service mais certainement pas d’une partie de la richesse qu’il contribue à créer. Dans les business-models Web3, la distribution de la valeur créée est affichée dès l’origine et prend en compte la contribution des utilisateurs.
Enfin, le troisième principe est la transparence de la prise de décision. Chez les GAFAM et autres plateformes algorithmiques, les États ne peuvent et ne pourront lutter contre certains fléaux (distorsion de concurrence, désinformation sur les réseaux sociaux, montée de la haine et de la radicalisation par les bulles de filtre) parce que les algorithmes sont secrets. Or, la blockchain est totalement transparente. De plus, le Web3 introduit un modèle de gouvernance où l’ensemble de la communauté des utilisateurs, des investisseurs mais aussi des annonceurs ou marchands participent aux décisions de l’application via un système de vote fondé sur la propriété des cryptoactifs.
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Vous proposez une stratégie digitale aux dirigeants pour développer leur leadership numérique, pouvez-vous nous en dire plus ?
Si le Web3 peut déstabiliser les GAFAM et dynamiser enfin l’innovation, longtemps étouffée par les géants du numérique, cela ne signifie pas pour autant que l’héritage du web centralisé va disparaître. Les internautes continueront à utiliser des moteurs de recherche, des sites web et des réseaux sociaux. De la même façon que le web 2.0 n’a pas remplacé les usages du web 1.0, les applications du Web3 vont se combiner avec l’existant. Mais cela pose la question aux entreprises qui veulent commencer à se positionner sur le Web3 de la cohérence et de l’intégration de leur présence numérique actuelle avec ces nouveaux concepts très disruptifs. Et pourtant, cela me paraît essentiel pour qu’elles puissent construire le leadership numérique dont les GAFAM les ont privées.
En effet, en devenant l’intermédiaire incontournable entre leurs citoyens-consommateurs et les entreprises, les GAFAM ont empêché la construction d’actifs digitaux pérennes pour les entreprises. Beaucoup de trafic de sites sont artificiellement gonflés par le SEA, les communautés sont fallacieusement détenues par les Facebook, Linkedin et autre TikTok, non par l’entreprise elle-même.
Pour résumer, les entreprises sont devenues locataires d’un web largement possédé par les géants. C’est pour cela qu’aucune entreprise traditionnelle n’est elle-même devenue le Uber ou l’Amazon de son marché ! Mais les entreprises doivent comprendre que cette dépendance est délétère tant sur le plan éthique (ils contribuent à financer des modèles toxiques pour la société) qu’économique puisque le ciblage est de moins en moins efficace sous le coup des règlementations, de plus en plus coûteux.
Le Web3 leur offre l’opportunité de bâtir, à partir de leur écosystème actuel, une présence numérique plus ambitieuse pour leur propre business et plus respectueuse des utilisateurs.
Pourriez-vous nous donner des exemples de ce qu’ils peuvent faire avec le Web3 ?
Dans mon ouvrage, j’explique comment intégrer les applications du Web3 dans les 4 types de stratégie digitale à l’œuvre sur les marchés.
Pour les stratégies relationnelles par exemple, fondées sur l’animation d’une communauté de marque, les entreprises peuvent profiter de la créativité et des liens sociaux des internautes par la mécanique de tokenisation. C’est le cas du PSG qui a lancé son Fan token et permet aux supporters de posséder une partie de l’actif numérisé du Club et en échange, de mieux participer à la vie du Club en votant certaines décisions.
Pour les stratégies phygitales, qui ambitionnent de fournir une expérience fluide entre le monde physique et le monde digital, le Web3 apporte le concept de jumeaux numériques. La maison de vin Bouey, par exemple, vend ses grands crus à travers un simple QR code, en réalité un NFT, c’est-à-dire un certificat de propriété. L’acheteur investisseur, qui est plus dans une optique de garde et de revente que de consommation, va préférer acheter le vin sous forme virtuelle et le laisser stocker dans les meilleures conditions de garde à Bordeaux ! C’est une expérience client totalement réinventée pour ce segment de marché intéressé par le vin comme investissement.
A qui conseilleriez-vous votre ouvrage ?
Ce livre s’adresse bien sûr aux dirigeants d’entreprise, directeurs digital, marketing, communication, expérience client… pour qu’ils appréhendent ce Web3 non comme la dernière tendance à ne pas manquer pour faire un coup de communication mais comme un enjeu stratégique pour garantir leur futur accès au marché. Ceux qui commencent à constituer leur communauté Web3, tester les mécanismes de digitalisation de leurs actifs et de rétribution dès maintenant vont disposer d’une avance certaine et verrouiller des positions dominantes dans le futur.
Il s’adresse aussi aux décideurs publics qui doivent comprendre que la décentralisation et les cryptomonnaies ne sont pas une menace mais la seule opportunité à court terme pour l’Europe de sortir de l’état de « colonie numérique » des américains et des chinois dans laquelle nous sommes enlisés.
Enfin, tout citoyen curieux de ces enjeux numériques, notamment parce qu’il est préoccupé en tant que parent par le fléau des plateformes sur ses enfants, peut apprécier lire ce livre pour savoir comment il peut contribuer, en tant qu’utilisateur du web, à la (re)construction d’un futur numérique souhaitable. Et ce n’est certainement pas en allant sur le métavers de Meta !
Web3, la nouvelle guerre digitale - Reprendre le pouvoir aux géants du numérique
Face à la suprématie des géants du Web, les Européens redoutent le spectre d’un cybercapitalisme à l’américaine ou d’une cybersurveillance à la chinoise. Mais le Web est à l’aube d’une mutation profonde, porteuse d’un nouvel espoir : le Web3.
Pour la première fois, l’hégémonie des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) pourrait être menacée.
C’est l’opportunité pour les Européens de sortir de leur statut de « colonie numérique » et de faire émerger une troisième voie.
Growth & Acquisition Digital Manager
2 ansBravo Caroline !
Directrice Générale de Jin
2 ansMerci Innocentia Agbe, Delphine Levêque et Adeline Coffinier pour votre accompagnement sur ce projet ! 💪
Assistante communication marketing chez Dunod Editeur (Dunod - Armand Colin - Maxima - InterEditions)
2 ansFélicitations pour la parution de votre livre chez DUNOD 👏 Delphine Levêque Adeline Coffinier Thierry Grey