CES 2020, ou la complainte du progrès
« Un frigidaire, un joli scooter, un atomixer et du Dunlopillo
Une cuisinière, avec un four en verre
Des tas de couverts et des pelles à gâteau!
Une tourniquette pour faire la vinaigrette
Un bel aérateur pour bouffer les odeurs
Des draps qui chauffent, un pistolet à gaufres
Un avion pour deux et nous serons heureux! »
Nous sommes en 1956, Boris sort « La complainte du progrès ».
Nous sommes en 1956, Boris sort « La complainte du progrès », critique satirique de la société de consommation émergente de l’après-guerre. Dans cette chanson au ton joyeux, il liste avec humour toute une série de gadgets aussi imaginaires qu’inutiles venant emplir nos étagères pour apporter bonheur et amour au foyer. Nous sommes maintenant dans le futur, en 2020, et le sujet reste ô combien d’actualité.
Quand je parle à des proches de mon déplacement à Vegas pour le CES 2020, passée la blague sur le poker et les mariages, viennent des questions de fond sur le pourquoi et l’intérêt de la high-tech « consumer ».
En effet, pourquoi s’acharner à créer des gadgets technologiques qui viendront grossir les rangs de nos déchets dans moins de 12 mois ? En quoi est-ce un progrès de créer un n-ième objet pour tracker l’humain jour et nuit, de son rythme cardiaque à ses transactions de carte bleue en passant par sa qualité de conduite ? Pourquoi donner les moyens aux GAFAM de tout savoir sur nos entreprises et sur nos vies ? Ne devrait-on pas utiliser notre intelligence à des sujets plus « nobles » et « importants » ? La technologie, longtemps considérée comme vecteur de progrès, est pour beaucoup dans les économies matures vue comme une menace liberticide, anxiogène ou anti-écologique.
La technologie, est pour beaucoup vue comme une menace liberticide, anxiogène ou anti-écologique.
Ceci dit, il y’a un paradoxe entre l’utilisation de la technologie, très répandue et indispensable au quotidien, et la perception négative qu’elle peut générer. Nos transports, notre santé, nos communications, notre agriculture, notre éducation, notre argent, notre sécurité, nos loisirs … tout fonctionne avec de la high-tech. Malgre cela, nous vivons en quelque sorte la fin des 30 glorieuses numériques, et une prise de conscience vient modifier la perception de la société au sujet de la technologie.
Nous vivons en quelque sorte la fin des 30 glorieuses numériques.
En effet, tous les objets technologiques sont-ils utiles ? Non. Tous les objets technologiques sont-ils pensés pour durer ? Non. Tous les objets technologiques sont-ils faits pour améliorer vraiment notre quotidien ? Non. Le « pourquoi » et le design au sens large (usage, écosystème, durabilité, ergonomie) a-t-il été la première brique de tous les produits ? Non. Y a-t-il un bon équilibre entre la valeur créée par l’entreprise, celle pour le client et celle pour l’écosystème ? Pas assez souvent.
Et pourtant, je fais partie de ceux qui croient encore que la technologie est un support indispensable à la résolution des problèmes majeurs auxquels nous faisons face en ce 21ème siècle. Et si on trouvait au CES les technologies « support » de la troisième révolution industrielle à laquelle j’aime à croire, qui nous permettrait une transition vers une nouvelle ère d’innovation. En effet, cette théorie de Jérémy Rifkin considère que chaque révolution industrielle s’appuie sur l’émergence combinée d’un nouveau moyen de communication avec une nouvelle source énergie. La première au 18e/19e siècle s’appuyait sur le la machine à vapeur et l’imprimerie, la seconde au 19e/20e siècle sur les énergies fossiles et la communication électrique, et la troisième devrait s’appuyer sur les énergies renouvelables et les technologies télécom. C’est là que l’IoT joue un rôle déterminant, en étant la dernière brique manquante pour interconnecter en quasi instantané tout autour du globe personnes, machines et objets. Cette révolution viendra impacter bien au-delà du dernier gadget de Noël : notre sécurité, nos transports, notre énergie, notre alimentation, notre santé, notre éducation, nos moyens de productions, nos modèles économiques. Alors oui il y a du gadget, mais il serait dommage voire risqué de jeter le bébé avec l'eau du bain, car les solutions à nos défis futurs seront multiples, et la technologie en fait partie.
Et si on trouvait au CES les technologies « support »de changements positifs ?
Ainsi, pour le CES, j'espère découvrir des technologies « intelligentes » et « utiles », qui montre que le high-tech a le potentiel de changer la donne sur des sujets systémiques. Ma grille d’analyse pour objectiver cela :
1. Le produit adresse-t-il un problème qui va au-delà d’une niche de clients ultra connectés ? Répond-il à un besoin clé : efficacité énergétique, santé, alimentation, optimisation de process et/ou de ressources, durabilité.
2. Le produit a-t-il été pensé pour un usage dans la durée ? Gagne-t-il en valeur d’usage avec le temps ?
3. Le design technologique prend il en compte la dimension durabilité ?
4. Le modèle économique associé peut-il être vertueux pour le triptyque client / entreprise / écosystème ?
Puisse le foisonnement du plus grand salon high tech du monde me faire découvrir les pépites qui changeront vraiment notre vie demain, et de préférence pour le mieux. Au plaisir d’en discuter si vous aussi vous faites le déplacement.
Affaire à suivre d’ici la semaine prochaine sur Linkedin !
Boulanger Levain naturel, farine bio et four à bois
4yAlors, quoi de neuf sur ce salon ? Entendu ce matin aux infos : Bientôt chez vous la serrure connectée, reliée à votre smartphone et votre montre (aussi connectée) ! J'espère que t'as trouvé d'autres avancées, parce que là, on continue à creuser dans le mur...
Product & Solutions Manager Smart Building & Data Center
5yComplétement en accord avec ce que vous decrivez, pour avoir visité le CES en 2019 j'ai été surpris par le nombre d'objets connectés au point de me dire que cela en devenait presque surprenant voir inutile. Vous souhaitant un très bon salon et chargez le podomètre 👌
Entrepreneur, I am going to make you love bicycle (Follow me)
5yMerci Samir, la reflexion est interessante ! C’est toujours un peu embarrassant de maudire la « Tech » depuis son smartphone 4G. Je pense comme toi que certains enjeux de société doivent et peuvent être traités par un ensemble de solutions « High ». Haute d’un point de vue technologique et de sa reflexion ecosystémique (= penser globale). Tu as l’air d’en avoir fait ton sujet ! Pour tous le reste il s’agira de présenter l’objet le plus « Wahou » comme aurait pu l’etre le pistolet à gauffre à l’epoque de Boris Vian (grande classe). Pourtant de nombreuses solutions « Low » pourraient émerger ou existe déjà pour répondre à ces autres problématiques. Basse d’un point de vue technologique mais toujours bien pensé de manière globale. Ok on sort de ton champ d’action, mais cela pourrait aussi participer à cette nouvelle révolution. Je crain par contre que ta grille de lecture n’agisse helas comme un filtre bien trop fin ! Surprends nous STP et va quand meme jouer un peu au Casino, ça te fera une chance de t’enrichir différemment, ou pas... ;)
Vice-President of Business Development | EMEA&NA | 1-stop shop for your electronic project | product development, prototyping, manufacturing & test #automotive #smarthome&building #industry #IoT #healthcare
5yBel article. Bon salon Samir Bounab !
Tennis Coach and Mentor
5yGreat article Samir, I used Google translate to translate it to english. Especially enjoyed the emphasis on Why should the device exist before answering the How or What.