Acceptez votre chaos !

À peine avoir mis les pieds hors des études, j’ai commencé ma carrière en tant qu’infographiste dans des agences de communication au Luxembourg. Presque dix ans de ma vie où sans le savoir, j’ai mis le doigt dans un engrenage bien huilé de dépersonnalisation complète et d’oubli de soi. On prône cette forme de créativité tant attendue tout en étant conditionné à « Paraître » selon les normes sociétales recadrantes. En fin de compte, j’ai accepté cette condition-là, sans doute pour m’ancrer davantage à cette vie où la réussite et le matérialisme résonnaient en moi comme une solution sécuritaire...

Et après ?

J’ignorais juste à cette époque que l’enfant créatif en moi glisserait progressivement dans l’ombre, caché par les nombreuses couches du « Vouloir Réussir ». J’ai réduit cet enfant à sa plus simple expression et j’ai cessé « d’être ».

A ce stade de ma vie, à ce moment-même, c’était juste et parfait... dans la mesure ou cela m’aiderait plus tard à prendre conscience de qui je voulais être.

Et puis un jour, il y a ses rencontres impromptues qui vous rappellent à vous. Il y a ces événements qui vous donnent envie de tout lâcher car des choix s’imposent à vous : attendre dans une gare que la vie défile devant soi en restant à son poste ou sauter dans le train en prenant juste un baluchon pour voyager léger. Il y a ces rendez-vous qui vous racontent que la vie est belle et qu’elle vaut la peine d’être vécue avant la date limite. Les rendez-vous avec la vie dans une chambre de maternité qu’on a attendu 9 mois, voir toute une vie… Et puis il y a les rendez-vous avec la mort. Vous savez, ce genre de rendez-vous qu’on n’avait pas vraiment prévu dans son agenda ?

Les rendez-vous quel qu’ils soient s’enchaînent et vous ramènent à votre vécu où à votre avenir. Le constat est évident : nous sommes dans un wagon, et nous roulons à tout allure vers une même destination.

Assise en face du directeur de l’école d’art-thérapie, je suis fière et j’expose mes desideratas et mon envie de faire partie de sa formation. Je suis convaincue, je sais vers quoi je veux tendre mais il manque un petit quelque chose... Je me sens pourtant avoir le bagage suffisant pour tenter l’aventure. Cependant, il m’impose une condition pour intégrer la formation qui deviendra ma condition idéale pour réaliser tous mes rêves.

Je vous sens cadrée, moulée, alignée par rapport à votre discours. Vous êtes conforme à ma demande (Ah oui, ce joli mot : conforme ! ) ». Je voudrais néanmoins rencontrer cette petite fille… Oui, celle qui joue, celle qui crée avec une désinvolture propre aux enfants. Celle qui rêve sans relâche…Celle qui a un p’tit grain de folie. Oui celle-là ! Celle qui met du désordre partout où elle passe ! Je veux voir votre désordre personnel. Installez votre cadre et surtout, mettez-y tout votre chaos…

C’était une évidence … D’une certaine manière, il m’avait libéré avec ces mots. D’une certaine manière, il avait entrouvert une porte en moi, restée trop longtemps close. C’était comme s’il m’avait accordé la permission d’être simplement moi-même.

Le désordre comme on l’entend, n’était pas permis dans mon quotidien structuré, cadrant, stressant. Mais force est de constater que la créativité n’y était plus non plus. A trop vouloir être en conformité avec la société, avec le monde, j’avais oublié d’être en conformité avec moi-même et mon essence profonde. A trop vouloir être alignée avec le monde, j’étais parvenue à taire l’enfant profondément imaginatif qui donnerait toute la magie à mes projets futurs.

Alors que nous vivons dans un monde où chacun s’acharne à trouver sa place mais où tout fini par devenir banale et sans saveur, la créativité est de mise. Elle est partout dans chacun de nos objectifs, quels qu’ils soient. N’oublions pas que de la créativité surgit l’audace et l’innovation.

Et si vous mélangiez votre boule à neige mentale pour renaître autrement ?

Laissez place à la part de folie enfuie au confins de vos âmes conditionnées. Oui… oui …Ce petit grain de folie qui vous dérange profondément, mais qui vous pousse à oser ce que vous n’oseriez pas. Appliquez-vous à « Vouloir Être » au détriment de « Vouloir Réussir ». 

Accordez-vous la permission d’être simplement vous-même.

Laissez cette part de désordre vous permettre parfois, de percevoir l’ombre pour mieux envisager la lumière, et puis de mettre de la lumière dans une vie sans nuance.

Soyez audacieux envers vous-même et acceptez avec élégance votre chaos.

Créativement vôtre,

Claudia Piedrahita Arredondo