Barnier dans les eaux glacées du calcul égoïste
À un moment où l’actualité internationale est plutôt sombre, voire inquiétante, Michel Barnier nous a apporté une bonne nouvelle : il est prêt à être impopulaire.
Et pour bien montrer à quel point son propos est sincère le Premier ministre a laissé entendre que le projet de loi de finances pour 2025 comprendrait 40 milliards d’économies et un effort fiscal à hauteur de 20 milliards d’euros. De quoi effectivement s’attirer les foudres des fonctionnaires, la méfiance des grands patrons et la colère des 65000 contribuables visés par une hausse d’impôts. Sans compter l’acrimonie de Gerald Darmanin qui a jugé inacceptable un budget ainsi ficelé. L’ancien ministre de l’Intérieur se fait le porte-voix de tous ceux qui préfèrent «les eaux glacées du calcul égoïste» chères à Karl Marx, au rétablissement des comptes publics.
Aucun chef de gouvernement n'augmente les impôts par plaisir. Si Michel Barnier accepte de le faire et d’en subir toutes les conséquences en termes d’impopularité, c’est parce que le déficit budgétaire laissé par Bruno Le Maire est abyssal. Ne rien faire serait courir à la catastrophe. Et ne couper que dans les dépenses publiques serait sacrifier l’avenir au diktat de Bruxelles.
Il y a exactement cent ans, Édouard Herriot avait voulu redresser les comptes d’une France déjà très endettée en augmentant les impôts. Lâché par ce que l’on a appelé le «Mur de l’argent», il a été contraint de démissionner neuf mois plus tard. L’impopularité n’est certes pas un gage de réussite. Mais comme le disait Raymond Barre : «Il vaut mieux être impopulaire qu’irresponsable.»
Yves de Kerdrel