Comment accompagner les personnes pour plus d’agilité et de sens dans l’organisation ?
Un jeune trentenaire vient d’être promu à son premier poste de directeur général. C‘est la récompense de son ardeur au travail et de son engagement à bien faire. Il a accepté sans arrière-pensée, en se réjouissant de pouvoir être utile à son entreprise et de voir ses moyens d’action s’accroître. On lui a bien dit que 4 personnes en 4 ans s’étaient succédées à ce poste, mais il s’était dit qu’il en comprendrait les raisons plus tard.
Lors du premier conseil d’administration de sa vie, il a rencontré ses actionnaires minoritaires : les représentants de 3 entreprises qui lui ont très vite dit qu’ils n’avaient plus confiance en l’actionnaire majoritaire que lui-même représentait. Les minoritaires ont demandé à sortir du capital : « Nous n’avons plus confiance, nous ne pouvons plus rester au capital, rachetez nos actions, sinon nous arrêterons de vous vendre ! »
Eh oui, ces actionnaires minoritaires avaient un solide argument : ils étaient également les principaux distributeurs des produits de la société. Grâce à eux, la société réalisait 80% de son chiffre d’affaires. S’ils arrêtaient de vendre ses produits, elle ferait faillite. Ils en profitèrent pour pousser leur avantage en demandant un prix élevé - plus élevé que ne le justifiaient les performances financières de la société.
Que peut faire le jeune directeur général ? S’il cède à la pression des actionnaires minoritaires, il se heurtera à l’actionnaire majoritaire qui l’a promu et qui refusera de payer un prix trop élevé. Sa tête sera sur le billot et il devra partir. S’il refuse de céder aux minoritaires, la société perdra son chiffre d’affaires et fera faillite. Le jeune dirigeant est pris entre le marteau et l’enclume. Son rôle paraît voué d’avance à l’échec.
Combien d’entre nous pensons n’avoir le choix qu’entre deux mauvaises solutions ? Combien sommes-nous à occuper des rôles qui paraissent condamnés à échouer, ce que les anglo-saxons appellent des rôles « set-up-to fail » ? Les gens partent et sont remplacés, mais les problèmes restent et ça recommence. Le jeune directeur général est le cinquième sur son poste.
Quelle est la clef ? La vraie révolution, c’est quand les rôles changent et pas seulement les titulaires, écrivait Gilbert Cesbron. Quand les choses paraissent bloquées, on peut encore essayer de transformer la nature même des rôles, pour plus d’agilité et de sens.
Le role crafting est l’art de transformer, d’optimiser ou de réinventer, les rôles. Il y a un travail personnel à faire par le jeune directeur général : quelle surface, quelle profondeur, veut-il donner à son rôle de dirigeant ? C’est une question de coaching difficile, mais déterminante pour la suite de sa carrière. Il y a également un travail collectif à faire sur l’organisation, en particulier ici sur la composition du conseil d’administration. Au final, cette question de stratégie se révèlera déterminante pour l’avenir de l’organisation.
Dans le monde complexe d’aujourd’hui, une organisation ne peut plus simplement se décréter à coups de fiches de postes, déjà caduques au bout de quelques mois. De nouveaux processus collaboratifs transversaux sont nécessaires pour faire évoluer le système et co-construire de meilleurs rôles ici et maintenant. Le changement ne peut commencer qu’avec des dirigeants prêts à interroger le sens de leur propre rôle.
Bruno Chaintron - bruno.chaintron@rolecrafting.org
merci Bruno pour ton regard toujours aussi aiguisée. c est tellement stimulant :) bravo!
CEO - Values Associates
7 ansTon approche de la transformation devrait être intégrée dans toutes les entreprises. J'espère qu'elle le sera de plus en plus. Les résultats que tu as obtenus chez tes clients parlent d'eux mêmes. Bravo de nouveau à toi Bruno.