Crise politique, modèle périmé de relations élus/Parti, il faut une force montrant l’adversaire, le capital, et la cohérence des luttes, Denis Durand
Par Denis Durand – Paris, membre du Conseil national du PCF
Le taux record d’abstention aux élections municipales témoigne de l’approfondissement de la crise politique. La crise n’épargne pas notre parti, avec deux aspects contradictoires : d’une part le lent épuisement d’un modèle périmé de relations entre les élus et le Parti s’accélère. D’autre part, la preuve est administrée qu’un redressement est possible. C’est à la lumière de ce fait politique qu’il faut analyser la situation à Vitry si on veut, comme l’affirme le rapport, rétablir la sérénité dans le département, dans le respect des communistes de Vitry et de leurs décisions.
Dans les plus grandes villes, des coalitions de gauche, auxquelles nous contribuons de tout notre apport militant, ont pu l’emporter sur la droite et sur l’extrême-droite.
Mais la portée de ces victoires doit être relativisée au regard de l’abstention massive de l’électorat populaire – ce qui devrait être notre électorat. Or, c’est bien d’une mobilisation convergente de ces couches populaires et des couches moyennes que nous aurions besoin pour résister à la crise et pour faire des prochaines échéances électorales un moment de reconquête, pour une alternative aux politiques inspirées par la domination du capital.
Le déferlement des plans de suppressions d’emplois dans les grands groupes, avec le soutien actif du gouvernement, ne peut plus être ignoré, ni l’onde de choc qu’il produit sur l’ensemble du tissu économique et social.
Face au désespoir que cultive Macron en constituant un gouvernement voué à rendre encore plus violente cette agression contre notre peuple, il dépend de nous d’ouvrir un débat à gauche. Les Françaises et les Français ne jugeront pas crédible une gauche qui prétendrait garantir pour tous un revenu universel en se résignant à ce que 20 % de la population soit privée par le chômage de contribuer à la création de richesses ; une gauche qui espérerait réparer les dégâts sociaux du capitalisme par la fiscalité ; une gauche qui prétendrait combattre le réchauffement climatique en excluant le recours à l’énergie nucléaire ; qui ferait comme si la révolte mondiale de la jeunesse contre le racisme n’avait rien à voir avec des choix économiques qui font exploser les discriminations en rejetant une génération entière dans le chômage et la précarité ; qui ferait croire qu’un repli national protégerait notre peuple contre les méfaits de la mondialisation capitaliste, alors que la pandémie vient de montrer combien chaque être humain, sur la planète, a besoin de tous les autres…
Pour gagner, pour permettre le rassemblement, il est vital que nous participions activement au débat à gauche pour dépasser les oppositions métaphysiques entre Etat et marché, entre « fin du mois » et « fin du monde », entre « social » et « sociétal » … il faut une force qui montre où est l’adversaire – le capital – et qui montre la cohérence des luttes et des constructions institutionnelles à lui opposer.
Une force qui aide les luttes sociales en affirmant de façon intransigeante que la crise ne justifie aucun chômeur supplémentaire, au contraire, qu’il faut ouvrir bien plus largement l’accès à la formation pour préparer l’avenir de nos filières économiques et pour permettre à chacune et à chacun de créer les richesses nécessaires à la sécurisation des revenus de tous. Une force qui fasse la lumière sur la mauvaise utilisation de l’argent au service de la rentabilité capitaliste, et sur les nouvelles orientations du crédit, de la politique monétaire, de la fiscalité et des dépenses publiques qui permettront d’atteindre les objectifs sociaux et écologiques dont dépend la survie de la civilisation. Une force agissante, dans les luttes, dans les territoires, pour arracher au capital le pouvoir de décider de cette utilisation de l’argent.
Il ne suffit pas d’un candidat ou d’une candidate communiste à l’élection présidentielle pour que cette bataille soit menée : nous le savons depuis 2007. Mais nous savons aussi, depuis 2017, que s’il n’y a pas de candidat ou de candidate communiste à l’élection présidentielle, ces idées ne seront pas défendues. Il faut donc les deux, la candidature et les idées. En créer les conditions, comme nous l’avons décidé au congrès, se décide dans la rude bataille contre le capital et contre le déferlement des plans de suppressions d’emplois et de réduction du coût du travail. Malgré notre affaiblissement, nous en avons les moyens, comme nous avons eu les moyens de mener la bataille des élections municipales. La campagne pour l’emploi qui fera l’objet du conseil national de début septembre fait partie de ces moyens. Elle donne dès cet été lieu à des initiatives qui devront converger vers une manifestation nationale à Paris.