Décarboner la pharma, c’est possible et c’est en cours !

Décarboner la pharma, c’est possible et c’est en cours !

J’ai eu le plaisir de participer à l’édition 2021 de CHAM samedi dernier. J’ai pu partager mon point de vue sur le thème de cette année « One Health », lors d’une table ronde intitulée « Un système de santé décarboné ».

Constat de départ : l’estimation actuelle de l’empreinte carbone des entreprises du médicament nous place en meilleure position que l’industrie textile mais derrière l’automobile. Pourquoi ? A cause des effets indirects de notre industrie, liés à la chaîne logistique complexe de la fabrication et de la distribution des médicaments. Notre responsabilité, en tant qu’industriels de santé souhaitant œuvrer de concert à la santé humaine et à celle de la planète, est donc d’adopter une approche qui englobe et maîtrise les conséquences sur l’environnement de l’ensemble des activités de nos entreprises. De la recherche des matières premières à la distribution dans les hôpitaux et dans les officines, en passant par le développement et la fabrication des médicaments, c’est tout au long du cycle de vie que nous devons être attentifs à l’empreinte de notre secteur. 

La plupart des grands groupes pharmaceutiques ont mis en place des stratégies pour atteindre la neutralité carbone à horizon 2030 ou 2035, et on peut déjà en mesurer les effets : moins 25% d’émissions de gaz à effet de serre depuis 1990 et moins 40% de composés organiques volatils dans l’air depuis 1995 sur les sites de production. Alors je dis oui, réindustrialiser la France, tout en décarbonant nos activités, c’est possible, c’est même la 5ème révolution industrielle en cours. 

Au-delà de la seule empreinte carbone, la gestion de la fin de vie des médicaments est aussi prise à bras le corps par le secteur, à travers le recyclage des emballages et surtout, celui des médicaments non utilisés, qui sont récupérés puis incinérés par une filière spécialisée grâce à Cyclamed. On peut se réjouir de la réduction de 25% des déchets industriels contaminés et de matières actives depuis 10 ans. Mais plus impactant encore que les sites de production, ce sont les rejets naturels de principes actifs dans les eaux usées qui sont la principale voie d’entrée des médicaments dans l’environnement. Sur les quelque 2 000 substances médicamenteuses prescrites dans le monde, 10% comportent un risque pour l’environnement, selon l’OCDE, et leur persistance après absorption par les patients sous traitement peut être très longue et préoccupante. C’est le cas des antibiotiques, dont la libération en continu est à l’origine d’une antibiorésistance devenue une menace majeure pour la santé des humains (devant le risque de cancer à partir de 2050 selon l’OMS). Une partie de la réponse à cette menace se trouve dans la R&D, une autre dans l’éducation de tous au juste usage des médicaments, pour réduire la consommation excessive ou inappropriée de médicaments. 

Le Leem a créé un Comité environnement en 2020, en charge notamment de suivre le Bilan Carbone des entreprises. C’est un espace de partage des meilleures pratiques qui vise à aiguiller, stimuler et créer un effet d’entraînement vertueux autour d’indicateurs communs.

Les changements ne sont cependant ni simples ni immédiats. Car le médicament n’est pas un produit comme les autres. Le gain sur l’impact environnemental ne peut pas se faire au détriment de l’efficacité et de la qualité du médicament, du respect de la réglementation ou de la sécurité des patients. Ni d’ailleurs au détriment des performances de production car cela pourrait menacer la sécurité de l’approvisionnement en traitements essentiels. Et tout changement de matériau en contact avec nos produits prend en moyenne deux ans (études de stabilité, de compatibilité et demandes de modification de dossier d’autorisation de mise sur le marché).

L’Europe de la Santé a un rôle à jouer pour lever des freins réglementaires et soutenir l’innovation verte des industriels par une harmonisation des normes. 2022 sera une opportunité à ne pas manquer. Mais ce n’est que par une mobilisation de la société à tous les niveaux, Etats, industriels, citoyens, que les lignes bougeront. Il y a encore beaucoup à faire et chacun doit jouer sa partition. La pandémie de Covid-19 a eu un avantage : elle a mis en évidence les extraordinaires ressources du génie et du courage humains. Le prochain défi auquel l’Humanité est confrontée, c’est le changement climatique. Alors réveillons une nouvelle fois ce génie humain, il y a urgence.

Table ronde très intéressante en effet. Pour rappel à tous les participants, les replay sont disponibles depuis hier. #Leem #OneHealth

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