Dans les marmites de Brédial
Que se cache-t-il derrière les produits traiteurs de l’entreprise bretonne Brédial ?
Avec une équipe de plus de 40 employés, le fabricant de produits traiteurs Bredial se qualifie de défenseur du goût sans artifices au travers de sa marque Tout Feu Tout Frais en GMS, sa marque Diguzh en GSS et sa boutique-restaurant RiBiNN.
En 1980, l’entreprise se spécialise d’abord dans la charcuterie, puis diversifie son offre avec des plats chauds et des salades traiteurs.
Rencontre avec Anne Jacopin , responsable qualité et Gautier Jézéquel , co-gérant, pour comprendre ce qui se cache derrière le slogan de la marque Diguzh : Le goût en toute transparence.
Nous sommes guidés par la tradition familiale. La démarche en faveur du vrai goût s’est imposée dès le départ. Évidemment, nous nous sommes améliorés d’années en années mais la mission initiale a toujours été de refuser les additifs dans nos recettes.
Initialement, l’entreprise fait dans le négoce en charcuterie. Quand nous nous sommes tournés vers les salades traiteurs et les plats cuisinés, nous avons goûté ce que faisaient nos concurrents. On s’est vite rendu compte qu’on était bien loin de la cuisine proche du fait-maison.
Nous voulions retrouver le goût des plats d’antan dans nos recettes. Je vais être un peu dans la provocation, mais si les salades avec additifs étaient bonnes, peut-être que nous n’aurions jamais démarré la démarche de tendre vers des ingrédients simples.
Cuisiner des plats de bonne qualité, passe par de bon ingrédients. Ce qui nous guide, c’est avant tout la recherche du goût, celui qui se rapproche le plus du fait-maison.
Défendre le vrai goût est donc une évidence et se passer de chimie dans les recettes est vraiment possible. Je ne vous apprends rien en vous disant que la catégorie des plats préparés et salades traiteurs est l’une des pires sur l’axe de la naturalité. En comparant des carottes râpées ultra-transformées et des carottes râpées simples, la différence est notable et ce dès la première bouchée.
Pour garantir à nos consommateurs, des plats comme à la maison, nous nous devons de faire un travail de sourcing des ingrédients et de respect de la qualité de ceux-ci. Pas d’arômes ni d’additifs, que du vrai goût.
Au-delà de l’aspect plaisir de manger de vraies carottes râpées, il y a aussi la question de santé qui entre en jeu. Au début, on avait très peu de recul sur le sujet. Mais depuis une dizaine d’années, de nombreuses études ont montré des liens entre la consommation de produits ultra-transformés et le développement de maladies chroniques comme le diabète, l’obésité, etc.
Alors autant se faire plaisir avec des produits simples et bons, et rester en bonne santé.
En tant que responsable qualité, pouvoir dire qu’on est zéro additifs et ingrédients simples dans la catégorie traiteur industriel est une grande fierté, déjà en interne. Puis c’est un engagement fort pour nos consommateurs.
On sait qu’on va dans la bonne direction. Même si au départ, c’était une question d’intuition et de convictions, aujourd’hui, ce n’est plus à démontrer que le vrai goût (celui sans ingrédient ultra-transformé) est bien meilleur. Et pas que sur le plan gustatif !
On est sur des gros volumes de production pour pouvoir proposer nos recettes à l’échelle industrielle, mais nos usines restent finalement de très grandes cuisines comme si on était à la maison. Des légumes frais, bruts, déjà cuits, pasteurisés, découpés, surgelés, des épices, des condiments simples comme de la mayonnaise, des purées d'ail, etc. On a de grandes marmites, de très grands fours et tout ce qu’il faut pour bien cuisiner.
D’ailleurs, on fait régulièrement des portes ouvertes dans nos usines. Avant le Covid, on organisait ça toutes les semaines quasiment, puis on a dû réduire la voilure avec une moyenne de 6 visites par an ainsi que des visites privées pour les professionnels, les scolaires, etc. C’est génial de pouvoir rencontrer en direct les consommateurs. Souvent ils ne se rendent pas compte de tout le travail qui est mené en interne. C’est l’occasion de répondre à toutes les questions, d’expliquer la démarche et de prouver nos engagements de manière très concrète.
Vouloir faire simple est une évidence, réussir à faire simple sans les bons produits nécessite de la patience. C’est un travail de discussion et de négociation avec les fournisseurs pour réussir à créer des liens solides avec ceux qui acceptent de travailler sur des fiches techniques simples.
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La démarche est là, nous devons trouver les bons produits pour avoir les recettes les plus simples. On fait de la macédoine, des blanquettes de veau, du couscous, etc. Ce sont vraiment des produits du quotidien, pas besoin de réinventer nos gammes qui fonctionnent et qui font plaisir tant que le vrai goût y est pour nous c’est la clé.
A partir de 2008, nous avons mis un gros d’accélérateur mais cela a pris du temps et il a fallu attendre 2018 pour être proche du 0 additif et 2023 pour l’avoir totalement atteint. Un des gros défis est de faire comprendre aux fournisseurs nos besoins pour que les recettes puissent évoluer, et ça prend du temps !
Chez Brédial, nous voulons faire simple sur des produits du quotidien. Pas de grandes révolutions de la cuisine, que des recettes traditionnelles au goût du jour, le vrai goût évidemment.
Dans les années 2000 à 2010, les fournisseurs nous riaient au nez. Demander une sauce sans ingrédients ultra-transformés était mission impossible, enfin du moins, ils ne comprenaient pas. Aujourd’hui, on sait que c’est possible. Nos convictions n’ont jamais bougées et ce qui nous permet d’en être là où nous en sommes aujourd'hui.
En 2008, Gautier est allé voir un de nos fournisseurs pour demander de réaliser des essais sur des recettes de surimi sans glutamate, colorants, sorbitol et autres arômes. Ce produit est un exemple star chez nous quand on veut montrer qu’il est possible de faire évoluer les choses même chez nos fournisseurs.
Tout a commencé par des échanges plus ou moins constructifs avec notre fournisseur chez qui nous avions planté cette petite graine. Après des mois d’essais, ça y est nous avions enfin un produit sans arôme de crabe et autres additifs qui pouvaient entrer dans nos salades. Au goût ? Aucune différence avec un surimi bourré d’arômes, comme quoi, le vrai goût est souvent le plus simple. Évidemment, le défi est après d’expliquer au consommateur pourquoi le surimi dans sa salade n’est pas orange. Mais une fois le message passé et bien amené, c’est une évidence pour les consommateurs, on peut manger du surimi blanc, comme on peut manger du jambon gris sans sel nitrité. On perd en attractivité visuelle au profit du goût, ce sont donc des indices de qualité finalement.
Un autre défi auquel nous nous sommes confrontés est celui de la mayonnaise. Il nous aura fallu plus de 5 ans pour prouver à notre fournisseur, que non une sauce industrielle ne nécessite pas forcément de la gomme de guar, de l’amidon, des sulfites et autres pour être bien conservée.
En 2011, Gauthier a même fait l’expérience lui-même en produisant une mayonnaise dans nos laboratoires comme si elle était faite à la maison, puis on l’a conservée dans un frigo de bureau, ouvert régulièrement avec des conditions très éloignées d’excellentes conditions de conservation. En plus de 3 mois, cette mayonnaise n’avait pas bougé. On l’a même envoyé au laboratoire pour des tests microbiologiques, et rien du tout ! On a proposé une dégustation au commercial de notre fournisseur, il pensait que c’était son produit.
Mais comme les choses n'avançaient pas assez vite à notre goût sur le nettoyage de la recette, nous nous sommes renseignés sur le matériel nécessaire pour produire nous-mêmes nos volumes. Cela a amené Gautier à participer à un séminaire de formation en Allemagne sur les machines industrielles utilisées par notre fournisseur. A son retour d’Allemagne, il a partagé cette information avec le fournisseur pour lui prouver que nous étions déterminés. Cela a dû participer à les convaincre d’aller au bout de nos demandes.
D’autres recettes restent encore complexes à faire bouger, quand c’est le cas et que ces produits ne font pas partie de nos top ventes, on les retire du marché comme pour notre cervelas ou notre museau vinaigrette.
Revenir à l’essentiel du goût, c’est d’abord beaucoup de conviction. Faire dans l’opportunisme sur de tels enjeux ne fonctionnera pas. D’ailleurs, le côté formulation et refus de l’ultra-transformation, n’intéresse que très peu de nos clients. Cet axe technologique ne fait pas vendre, c’est bien l’axe du goût. Le but de nos recettes, c’est qu’elles soient bonnes sans artifices. D’ailleurs plus de 90% de nos clients achètent nos produits parce qu’ils sont tout simplement bons. Et ça c’est une belle victoire !
Pour que la démarche soit pérenne dans l’entreprise, il faut évidemment embarquer les équipes. Le sens du collectif est très important chez nous. On refuse les convictions molles, l’idée est de pouvoir challenger en permanence nos fournisseurs sur les produits que l’on reçoit et donc d’accompagner nos équipes à comprendre les fiches techniques et noter tout ce qui ne correspond pas à nos engagements sur l’axe de la naturalité.
On est fiers de pouvoir fabriquer les produits que l’on vend. Les engagements que l’on prend en interne se ressentent sur notre travail en production et après dans les assiettes. Évidemment personne n’est parfait, et ça nous arrive aussi d’acheter des produits pas 100% clean.
La vision étant de toujours fonctionner avec cette question de bon sens : nous développons des produits que l’on voudrait retrouver dans nos rayons.
Si vous ne connaissez pas Diguzh, vous devez goûter :
Propos recueillis par Chloé Dall'anese de GOÛM, décembre 2023