Management : et si c'est Anakin qui avait raison ?
C'est une histoire vieille comme le monde. Un jour, l'élève s'entraîne aux côtés du Maître. Ensuite, l'élève dépasse – parfois – le Maître et, ensemble, ils profitent du succès et de l'héritage qui découle de leurs exploits. Mais parfois, l'histoire se déroule autrement...
Si l'univers du cinéma permet très régulièrement de pouvoir dresser des parallèles avec le monde du sport - ou bien celui de l'entreprise -, il faut reconnaître que la saga Star Wars représente probablement la quintessence pour réaliser cette opération... Qui n'a jamais "imaginé" Dark Vador comme étant son CEO, ou bien, Obi-Wan Kenobi comme son Maître de stage ? Un doux "rêve", ou alors, l'annonce de réunions terrifiantes...
Aujourd'hui, nous allons prendre le temps de nous pencher sur le cas d'Anakin Skywalker, considéré par beaucoup comme le Jedi ultime, jusqu'à son changement de bord...
"Je veux plus, mais je sais que j'ai tort."
En tant qu'intervenant sur le sujet du management sportif, on m'interroge très régulièrement sur la fameuse "nouvelle génération" : comment pouvoir en tirer le maximum ? Comment comprendre ses "codes" ? Comment dialoguer avec elle ? Et surtout, comment parvenir à canaliser parfois une énergie débordante, couplée à une ambition sans limites ? C'est ici que nous allons prendre la direction de la planète Dagobah, où se succèdent les Jedis afin d'obtenir un entraînement des plus qualitatifs.
Pour ce qui est du cas d'Anakin Skywalker [qui, par la suite, deviendra donc Dark Vador], il représente à merveille le profil le plus complexe à gérer pour un manager : à savoir, un enfant avec un passé douloureux qui pèse encore sur son état de conscience vis-à-vis du monde qui l'entoure [l'absence de connaissance de son père, donnée à laquelle il faudra ajouter la perte de sa mère par la suite]. Ainsi, malgré un potentiel incontestable - avec l'image du futur meilleur guerrier de la galaxie -, le petit Anakin reste un enfant tourmenté et surtout, tiraillé entre les avis divergents à son sujet au sein de son propre camp...
Dès le départ - et c'est ici que le bât blesse pour le camp des Jedis -, Qui-Gon Jinn, le premier homme à percevoir le potentiel d'Anakin [avec notamment une scène mémorable de course de POD], doit faire face à l'avis de son propre disciple Obi-Wan Kenobi : « Cet enfant est dangereux, ils [les Jedis] le sentent tous, pourquoi pas vous ? » Réponse du formateur au sabre-laser : « Sa destinée est incertaine, il n'est pas dangereux ». En vérité, parce qu'il avait confiance en sa capacité à pouvoir l'encadrer convenablement, Qui-Gon Jinn savait probablement qu'en indiquant le bon chemin à Anakin, le petit Jedi suivrait les préceptes de son premier mentor. "La confiance" : voici le premier précepte qu'il faut accorder à son élève - et peu importe son âge. Dans le cas inverse, comment pouvoir obtenir une relation stable sur la durée ?
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Pourtant, malgré son ambition démesurée, Anakin était conscient de son état : "Je veux plus, mais je sais que j'ai tort".
Maintenant et parce qu'il paraît évident qu'une progression est avant tout le fruit d'un travail collectif, se pose la question du formateur d'une telle pépite ? Même s'il avait perçu "une grande peur" en Anakin, il faut admettre que Maître Yoda s'est trompé à son sujet... Premièrement, via l'encadrement. Comme l'explique le journaliste Alix Odorico : "Au départ, lorsque Qui-Gon Jin et Obi-Wan emmènent le jeune Anakin sur Coruscant pour le présenter en vue d'une formation, Yoda et le conseil refusent, le natif de Tatooine est jugé "trop vieux" pour suivre les enseignements Jedi, et Yoda décèle déjà en lui une forme de peur, émotion contradictoire avec le code Jedi et davantage affiliée avec le côté obscur de la Force. Mais Yoda et le conseil acceptent finalement et décident de respecter de façon posthume la demande de Qui-Gon. Anakin, qui devait être formé par Qui-Gon, devient donc l'apprenti d'Obi-Wan Kenobi."
Traduction : Anakin, considéré comme le plus puissant des Jedis en devenir, vient d'hériter d'un jeune formateur... Alors qu'il aurait pu obtenir la formation de l'un des plus grands formateurs Jedis. Une hérésie ! Ensuite : "Dans La Revanche des Sith, alors qu'Anakin est de plus en plus en train de douter et en proie à des visions révélant la mort de Padmé, il se confie à Yoda sur "ces prémonitions". Ce dernier lui rétorque alors qu'il doit "renoncer à tout ce qu'il craint de perdre" et "ne pas regretter ceux qui rejoignent la force", autrement dit, le mort de ses proches. Un principe Jedi qui combat les émotions, mais qui, dans ce cas précis, sème le trouble et la peur chez Anakin. Bien que les paroles de Yoda soient sages et emplies de philosophie, elles n'auront pas l'impact nécessaire pour écarter le Jedi du côté obscur. Aurait-il dû creuser davantage dans la psyché d'Anakin ?" La question mérite d'être posée... Et si on ajoute à cela le fait que le camp des Jedis a mis environ 35 décennies pour comprendre qu'en vérité, Palpatine était un Seigneur Sith... cela fait beaucoup.
L'âge, un vrai problème ?
Au final donc, sans la confiance nécessaire accordée par son camp - et en plus, malmené par son amour pour Padmé -, Anakin représentait une cible facile pour le camp des Siths [les "méchants", dans un monde manichéen...]. Émotionnellement instable, il aurait surtout mérité un meilleur encadrement de la part du board managérial des Jedis. Et cette donnée s'accentue forcément avec la mort de son premier mentor [vaincu par Dark Maul]. Le seul à véritablement croire en lui. Le seul à prendre sa défense avec véhémence. Mais finalement, comment Yoda a-t-il pu être aussi aveugle ?
Sur la nouvelle génération, on dit souvent qu'elle serait trop "pressée". Finalement, il est possible qu'elle soit parfois "bridée" à l'image d'Anakin. Reste à définir pour quelles raisons...
« Les joueurs actuels ont déjà des responsabilités. La génération des 20-23 ans évolue pour la plupart dans de grands clubs et baigne dans un quotidien d’exigence. Cette génération côtoie le haut niveau très tôt tout en assumant ses responsabilités. Il y a la partie footballistique mais le côté humain aussi, de faire face aux exigences du haut niveau sur le terrain et en dehors. C’est la chose qui m’agaçait le plus, quand on me disait ‘Patiente, tu as le temps, t’es jeune.’ Non, il faut tout prendre tout de suite, le plus vite possible » Didier Deschamps
Et si Anakin avait ressenti la confiance nécessaire ?