Etre stratège, c’est savoir brûler ses plans
En stratégie, vous avez déjà certainement participé à la réalisation d’un plan. Beaucoup d’organisations produisent en effet des plans stratégiques, et l’on demande systématiquement à tous les futurs entrepreneurs de présenter un business plan à leurs investisseurs potentiels.
Par Frédéric Frery, professeur à ESCP Europe
Planifier, c'est chercher à réduire l'incertitude
Dans les années 1970 et 1980, il existait dans toutes les grandes entreprises et administrations des départements entiers de planification stratégique, qui réunissaient des dizaines d’analystes chevronnés chargés de produire des plans. De même, la France s’enorgueillissait encore il y a une dizaine d’année d’un Commissariat général au plan, qui depuis a été rebaptisé Commissariat général à la stratégie et à la prospective. Le plan semble donc être indissociable de la réflexion stratégique. Or, savez-vous qu’avoir un plan peut en fait nuire à votre succès stratégique ?
Bien entendu, l’exercice de planification est utile, voire indispensable. Il implique d’analyser précisément votre environnement concurrentiel, d’évaluer les ressources et compétences de votre organisation et de construire des scénarios d’évolution vraisemblables. Planifier, c’est chercher à comprendre afin de prendre les décisions les plus pertinentes. La planification vous permet d’être moins désarmé face à l’incertitude.
La stratégie, c'est accroître sa liberté de mouvement
Cependant, comme l’a souligné avec raison Henry Mintzberg, une fois que vous avez défini un plan, vous risquez de vouloir l’appliquer, même si dans l’intervalle votre contexte concurrentiel, réglementaire ou technologique a évolué. Dès lors, à vouloir vous en tenir au plan, vous risquez de devenir aveugle à la réalité. En fait, avoir un plan vous enferme, là où l’essence même de la stratégie consiste justement à accroître votre liberté de mouvement.
Soyez-en certain : un plan ne résistera pas à l’imprévu. Planifier vous permet d’envisager ce qui pourrait se passer, mais jamais ce qui va effectivement arriver. Le général prussien Helmut von Moltke déclarait ainsi : « Aucun plan n’a jamais survécu au premier contact avec l’ennemi ». Ce que le boxeur américain Mike Tyson a traduit par « tout le monde à un plan, jusqu’au premier coup de poing dans la tête. »
"Les plans sont inutiles, la planification est indispensable"
Dans ces conditions, que faut-il faire ? Le Général Eisenhower déclarait avec raison « les plans sont inutiles, la planification est indispensable ». En fait, la réponse consiste certainement à valoriser la planification – tout en veillant à ce qu’elle reste un exercice de réflexion et qu’elle ne devienne pas un processus bureaucratique – mais à brûler les plans, qui sont des simplifications trompeuses. Être stratège, c’est n’accepter qu’une seule certitude, celle de l’incertain.
Par conséquent, la prochaine fois que vous écrirez un plan, écrivez-le au crayon, ne l’écrivez pas à l’encre.
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Responsable service tourisme
7 ansEn montagne, les accidents sont souvent lié aux décisions de prolonger une ascension sans prise en compte des éléments de contexte... on l'appelle la persistance dans l'erreur! Savoir analyser, comprendre, s'adapter, voire renoncer doit être intégré à la stratégie!
Courtier en solutions de crédits et assurances emprunteur. Certifié IOBSP I et IAS III
7 ans... c'est pour cela que dans l'art militaire la stratégie n'est que le stade le plus éloigné de l'élaboration, la vision lointaine d'un objectif dans le temps, donc nécessairement moins précise > elle reste donc ouverte quand aux aléas, aux modes opératoires et aux ressources à allouer pour arriver à cet objectif dans le temps. La tactique, elle (et on utilise très souvent à tord le terme stratégie pour 2 niveaux bien distincts) définie les moyens et les plans d'où découle le niveau opérationnel, qui doivent être en interaction permanente afin de coller au mieux à la réalité du front, utiliser les opportunités ou au contraire réagir à un imprévu négatif. Si l'on replace les plans au niveau où ils doivent être, c'est à dire en tactique alors je suis d'accord, ils faut savoir les brûler et s'adapter MAIS toujours en gardant la vision stratégique de objectif final sans quoi l'organisation navigue à vue et à de forte chance 1- de stagner 2- d'échouer dans le long terme. Ce qui se passe de plus en plus dans de nombreuses entreprises à la vision callée sur les rythmes des rapports aux actionnaires .... donc ETRE TACTICIEN, c'est savoir brûler ses plans ;-) ... pour atteindre ses objectifs STRATEGIQUES
Belgium Sales manager
7 ansA mon sens, le plan est une photographie à un instant T de la meilleure stratégie pour atteindre un objectif. Idéal pour accompagner un business plan, cette opération nécessite des compétences d'analyse et de connaissance du marché. En phase d'application, la photographie laisse place à des situations animées auxquelles doit s'adapter notre stratégie. Les managers opérationnels doivent faire preuve d'imagination de réactivité et d'adaptation pour bâtir des scénari os réalistes quitte à limiter son objectif : .Avancer à petits pas permet d'atteindre un objectif par étapes .Courir après un objectif plannifié et devenu inatteignable ne fait que repousser une mauvaise échéance Avis personnel évidemment
Depuis 40 ans je conseille les pme/eti et leurs dirigeants
7 ansBonjour Frederic, belle intervention à l'Apm il est vrai. Un plan rigide , destiné à être exécuté avec précision est de toute façon un exercice théorique, chacun en convient. En revanche je souhaite souligner qu'il est très rare que les entreprises gagnent La confiance des financiers sans business plan, et que son respect ( pas son application stricte) est attendu. Ceci bien sur n'exclut pas l'agilité , mais il est bon de l'évoquer avec ses financeurs. Par ailleurs comme vous le soulignez, c'est un bon moment pour s'interroger avec son équipe et ses actionnaires sur les choix à opérer.
Il serait intéressant de nous proposer quelques publications complémentaires à lire et méditer