Faire voeu de vie
Je ne laisserai pas passer 2020 sans exprimer la gratitude que je lui dois.
Malgré le consensus massif pour une mise rapide au débarras de cette année sans fin, voire son "annulation rétroactive", qui rejoindrait le recours inconscient de l'obsessionnel pour se déresponsabiliser de la part de jouissance qu'il a engrangé à penser et agir dans le sens de la vie. Sans en préempter le sens vers le bon, le juste, le vrai.
La vie est à double sens souvent, à contresens de nos voeux, puisamment.
Une année hors de contrôle
Une année hors de contrôle est une année pleine de vie et à l'oeuvre vraie. Aurions-nous subi pour autant ? Nombre d'entre nous avons fait preuve d'adaptation sans que cela rime au fond avec soumission. Nous avons réinventé un métier, une relation, un projet, un horizon. Nous avons essayé et adopté ce qui semblait inapproprié, absurde ou fou il y a seulement quelques mois. Cela s'est révélé drôle à vivre, insouciant, libérateur souvent de nouvelles correspondances avec les autres et avec l'environnement.
Une année d'ensemble
Pour parler de ce que je connais bien, je vous ai accompagnés en tout moment, tels que vous êtes, sans les tensions des imprévus, des absences, des oublis. Au bout du fil, votre parole avec le souffle ressenti à quelques degrés de plus ; en fond d'écran, votre intimité ni jalouse ni obscène, belle du grain de lumière recherché pour être vu.
Pour parler de ce que j'ai (re)découvert, j'ai beau être loin des lieux de mes origines et de bien de périodes de ma vie, ce temps ne sont ni l'avant ni l'après ; ces lieux ne sont pas des non-lieu non plus. La vie, non seulement, continue, mais elle revient à chacun de nous, dans notre irréductibilité absolue.
Grâce aux actualités et aux réseaux investis comme jamais, j'ai suivi quasiment au jour le jour les péripéties des célébrités préférées et des anonymes de mon coeur en France, Navarre, Castille, Guadeloupe et Saint Domingue. Java, L.A. et Norvège. Tous des lieux où des êtres chers demeurent. Et bien d'autres lieux me reviennent. J'ai pris attache et parole, "visio" par moments, avec tant de perdus de vue de toutes ces années d'éloignement factice qui ont précédé. Ensemble, je me sens rassemblée.
Une année dérangée
Pour parler de ce qui m'a échappé, je pense à ma maman et quelques autres belles âmes évaporées derrière le rideau du coronavirus, pour d'autres maux bien plus personnels, réduits à néant par l'épidémie planétaire, parties trop tôt, parties sans prendre le temps d'un merci, parties sans trop le savoir. Ni elles ni moi. Je continue de l'apprendre à chaque réveil, à chaque nouveau pas. Libres jusqu'à l'infini elles et moi. Cela ne m'arrange pas, et alors ? Dérangée, je suis libre une nouvelle fois.
Et cette année aussi, j'ai choisi Panodyssey - cet article en est issu - pour égarer encore davantage mes esprits dans un lieu où il fait bon vivre : Pablo fatal error en illustration de cet écrit est l'illustration que je préfère de ce site CHIC !
Deux mille vint, deux mille ne s'en va pas. Et un, s'y ajoute. Dans une "reconnaissance projective" qui nous engage dans le sens de la vie. A sa merci.
Eva Matesanz est psychanalyste, chargée d'enseignement universitaire dans le "monde des affaires" et auteure de quelques oeuvres dans le domaine de la psychodynamique humaine et de l'écosystémique naturelle. Elle travaille et réfléchit en groupe libre avec Jean-Louis Muller, Minh-Lan Nguyen, André de Chateauvieux, Stéphanie Flacher également présents sur Panodyssey, Loïc Deconche et Christophe Martel.