In genea veritas (2)
Quelques contre-vérités - épisode 2
6- Nos ancêtres se mariaient très jeunes
De toute exagération, retenons-nous dans ce domaine. Si nous pouvons effectivement rencontrer quelques mariages dans lesquels les mariés sont fort jeunes, ce n’est pas une généralité à appliquer à tous. Notre société actuelle décale le mariage, ou l’union, et donc les naissances, dans le temps, faisant apparaître nos aïeux, évidemment, comme moins âgés lors de leur union. Au Moyen-Âge, même si l’on pouvait faire des promesses, des fiançailles, on ne peut se marier qu’à partir de 12 ans pour les filles et 14 ans pour les garçons, la Révolution portera cette limite à 13 ans pour les filles et 15 ans pour les garçons, de nos jours le chiffre est porté à 18 ans pour les deux sexes ; mais ces limites ne sont en aucun cas des obligations. Ces modifications révèlent bien sûr des mentalités, des habitudes, des besoins évolutifs dans la période ; le mariage n’est plus synonyme d’émancipation, d’installation sur une terre, ou, dans une situation fixe, de durée de vie moins importante. Nombre de nos aïeux, au XIXe, passaient les obligations militaires avant de se marier. Nos parents se mariaient donc plus jeunes que maintenant, mais en fonction d’une époque et d’us que nous avons décalés dans le futur ; pour retrouver des mariages d’enfants, comme nous les considérons aujourd’hui, il faudra remonter plus en arrière dans le temps. Par contre, on rencontrera beaucoup de remariages, voire très tard. Rester seul était une contrainte financière que peu arrivaient à supporter.
7- La particule « de » signe de noblesse
Non, la plupart des noms de familles nobles sont précédés de cette particule, mais on ne peut pas dire que le « de » est signe de noblesse ! Ainsi, nombreux sont les registres où les personnes sont désignées par un « de » représentant leur origine, c’est-à-dire « de » tel village, « de » telle terre, « de » tel endroit. Pierre de Martel est un paysan habitant le village de Martel, il n’est pas noble. On retrouvera cette manière de procéder dans la dénomination des différentes branches d’une famille noble : PRAIRE de la ROCHE, PRAIRE de MONTAUT, PRAIRE de TERRENOIRE, PRAIRE du REY … une noblesse bourgeoise où l’on pourrait presqu’évoquer l’achat des terres en ne lisant que les noms de la famille ! Cette notion de territoire définie par le « de » est d’ailleurs si présente que nous n’y faisons plus attention. Nos familles royales sont nommées de FRANCE, d’ANJOU, de POITIERS, de SAXE, de VERMANDOIS, de NORMANDIE, de PROVENCE etc … Capétiens, Bourbons, Valois avec plus ou moins la présence de la particule, Hugues CAPET, Louis de BOURBON, Marguerite de VALOIS. Reconnaissons donc que la plupart des noms nobles sont précédés de cette particule, mais ne définissons pas notre Pierre de MARTEL, paysan de père en fils, comme un baron local.
8- Nous sommes tous cousins
Contre-contre-vérité que celle-là. Car si nous sommes à peu près tous, pour une raison ou une autre des descendants d’un oncle ou d’une tante perchés sur une de nos branches communes, c’est-à-dire cousins à une quelconque génération, nous n’en demeurons pas moins aussi éloignés les uns des autres que ce que peuvent l’être les milliards d’individus vivant sur la planète. La mode généalogique aidant, et Internet en particulier, on a vite fait de trouver ce genre de parenté, et le quidam de se targuer de quelques milliers de cousins. Le terme ainsi employé permet de se situer dans une grande famille, et ainsi de retrouver des personnages communs aux différentes généalogies en les rapprochant. Par contre, tous ces gens-là sont bien loin de mes cousins, les germains, et de leurs enfants ou petits-enfants. Tout le monde reste cousin ! Mon voisin devient mon cousin, mon médecin, mon patron également. C’est un sport nouveau : trouver les relations entre des personnages tels que des politiques se présentant à une élection, des rois et des chanteurs, des sportifs et de grands criminels, afin de les faire tous cousins. Je ne mettrai donc pas de liens d’affinités à l’image que je me donne du terme de cousin employé dans le sens de parent à un degré variable, mais les conserverai pour mes proches en attendant, pour les premiers, qu’une belle cousinade me fasse rencontrer toutes ces personnes qui, dorénavant, font partie de ma famille.
9- Nos ancêtres ne bougeaient jamais
Certes, la plupart d’entre eux naissaient, se mariaient, mouraient dans le même village, la même ville. Mais il est toutefois raisonnable d’envisager la venue d’un étranger, le départ d’un membre de la famille pour de multiples raisons : religieuse, militaire, professionnelle, d’aventure, de promotion sociale, rejoindre un parent … Et si la distance réduit les chances de retrouver un ancêtre loin de la maison, elle n’en est pas rédhibitoire pour autant. J’ai eu l’occasion de réaliser quelques généalogies pour lesquelles les demandeurs portaient haut leur fierté d’appartenir à une région précise où ils étaient implantés, disaient-ils, depuis des lustres ; une fois la recherche généalogique faite, je constatais qu’ils étaient originaires de l’autre bout de la France. Les particularités et coutumes régionales, le fait de vivre en ville ou à la campagne, le niveau social provoquent plus ou moins ces migrations. L’évolution technologique, en particulier dans le domaine des transports, développera ces déplacements de population dans les deux derniers siècles, tout comme le fera l’exode rural et la recherche d’une meilleure vie que celle de la campagne connue par la plupart de nos aïeux. Nos ancêtres bougeaient donc, même si ce n’était que pour aller chercher compagne dans le village voisin, et leurs déplacements sont les premiers écueils rencontrés par le généalogiste amateur. Retrouver le mariage et la nouvelle installation du jeune couple hors du village natal du jeune marié est un exercice dans lequel se plaira le généalogiste. A vos cartes !
Et beaucoup d'autres choses sur www.soirat.com