Je ne crois pas à la « démission silencieuse », au « quiet quitting ».
Attention, je ne prétends pas que le phénomène n’existe pas, je dis simplement que je ne crois pas que ce soit la solution.
Je pense que c’est une fausse bonne idée.
La mauvaise réponse à une bonne question.
Pour ceux qui auraient passé les derniers mois dans une grotte sans accès aucun à internet ou aux réseaux sociaux, le « quiet quitting » est l’idée selon laquelle le travail occupe trop de place dans notre vie, et qu’au lieu de trop s’y investir, il est préférable de se désengager en ne faisant que le strict minimum.
Pourquoi est-ce un mauvais calcul ?
- Croire qu’en décidant de se désengager et d’en faire le moins possible va améliorer notre qualité de vie au travail est une illusion. En fait c’est même l’inverse qui se produira et cela n’aboutira qu’à vider le job de sa substance. C’est comme revenir à une taylorisation de notre activité, une robotisation des tâches consistant à ne faire que ce qui est strictement attendu. Adieu la touche personnelle du collaborateur, sa capacité à apporter des solutions, des idées nouvelles ou à challenger l’existant. Adieu la magie qui peut émaner de l’envie de réaliser quelque chose qui n’est pas à l’agenda. Adieu l’énergie contagieuse née de la créativité et de l’audace d’individus engagés et passionnés. Et bye bye le leadership personnel.
- La pandémie a fait émerger un nouveau phénomène, celui de la grande démission. L’idée selon laquelle on se pose des questions sur nos priorités, ce qui est important et ce qui l’est moins. Au cœur de cette réflexion émergente se trouve la question du sens. Quel est le sens de mon travail ? De mon activité ? De mon quotidien ? Cette tendance sociétale et comportementale, qui semble être plus profonde que conjoncturelle, n’est cependant pas compatible avec le « quiet quitting ». Alors que ceux qui optent pour la grande démission (à tort ou à raison) font finalement le choix de se mettre dans l’action et d’aller chercher du sens ailleurs, ceux qui optent pour la démission silencieuse ne font que tourner le dos à un potentiel inexploré. Ce n’est pas en atrophiant mon quotidien, en m’enfermant dans un bocal et en me prostrant dans l’inaction que je vais donner un sens à mon job. Au contraire, en faisant ça j’ampute mon quotidien de son potentiel, et je me prive de ce qu’il pourrait avoir de passionnant. Bref, je me tire une balle dans le pied.
- Dans son livre "The Heart of Business",
Hubert Joly
, ancien CEO de Best Buy, va encore plus loin en affirmant que le « travail peut participer à notre quête de sens » et qu’il faut le considérer comme « une opportunité de se réaliser ». Professionnellement et personnellement. Celui qui a redressé Best Buy en articulant la stratégie autour de la création de sens est convaincu que le travail peut-être un vecteur de réalisation de son identité. Il affirme également que l’idée selon laquelle la vraie vie serait celle qui commence après les heures de bureau ou durant les vacances est une aberration. Comment en effet croire qu’une journée insipide passée à ne faire que le strict minimum n’aura aucune incidence sur notre état d’esprit dès que nous basculerons dans notre sphère personnelle et familiale ? Les deux univers ne sont pas étanches et se contaminent l’un et l’autre, pour le meilleur ou pour le pire. Et dans les cas extrêmes, on peut même affirmer que démission silencieuse et santé mentale ne font pas bon ménage.
Même si elle reste très aspirationnelle, j’aime beaucoup cette phrase d’Edward Freeman, le père de la théorie des parties prenantes :
Ce qui est certain, c’est que ce n’est pas en devenant un adepte de la démission silencieuse que cela arrivera..
Je ne crois pas au « quiet quitting ».
Les opinions exprimées sont personnelles.