LA BANQUE PRIVEE A -T- ELLE ENCORE UN AVENIR ?
Ces dernières décennies, le monde discret de la Banque Privée a été une activité de niche rentable, pour les acteurs l’exerçant.
Des niveaux de commissions élevées, des marges de crédit confortables, un niveau de risque faible et une consommation de fonds propres minime pour les banques en ont fait une source de profit de plus en plus importante. Et malgré un service client juste dans la moyenne, très éloigné d’un 5 étoiles de l’Hôtellerie bien qu’elles aiment s’en servir de référence, les Banques Privées ont profité financièrement de cette situation pour conforter et sécuriser une part de leur PNB.
Il ne s’agit pas ici de critiquer cet état de fait qui a été jusqu’à peu de temps, un modèle dominant hérité d’une longue tradition dans le domaine bancaire : assurer un service client avec des prestations au juste niveau en percevant des frais (MNI ou commissions) d’un niveau acceptable par les clients sans pour cela être toujours justifiés. Et cela est d’autant plus vrai pour de nombreuses Banques Privées.
Mais aujourd’hui le contexte a changé.
Une réglementation plus sévère ( MIFID 2) a obligé les banques a plus de transparence sur les frais et commissions, jusqu’à en supprimer certaines, qui étaient très rentables pour les Banques Privées.
L’environnement de taux bas, initié depuis 2008 par la BCE, a également bouleversé la rentabilité des crédits pour n’en faire presque plus qu’une activité d’appel avec un niveau de marge très faible voir parfois négatif.
L’obligation d’une meilleure connaissance client (Directive UE 2015/489) a engendré une forte baisse du temps commercial disponible des Banquiers Privés, les banques ayant tardivement pris en main le sujet et n’ayant pas suffisamment travaillé la digitalisation des parcours clients permettant de développer le ‘’Self Care’’ et la simplification de ces derniers. Cette diminution du temps commercial a eu pour conséquence un niveau d’activité plus faible et donc une moindre rentabilité.
Enfin les attentes clients en Banque Privée ont également fortement progressé ces dernières années avec un souhait de plus d’expertises, plus de proactivité et de conseils, venant aussi modifier en profondeur le métier de Banquier Privé . Le passage du Banquier Privé ‘’homme-orchestre’’, capable de répondre à toutes les demandes clients, à celui de Banquier Privé ‘’chef d’orchestre’’ coordonnant différentes expertises mises à son service et ceux des clients, peut être compliqué pour les « anciens » regrettant ‘’le temps d’avant…’’, les banques n’ayant pas toujours accompagné le ’’swing du changement’’ pourtant nécessaire.
Tous ces changements ont eu pour conséquence une baisse sensible de la rentabilité de la Banque Privée, au point pour certaines d'avoir un coefficient d'exploitation supérieur à 100 %.
Dans ce contexte tout dirigeant ou responsable de Banque Privée peut légitimement se poser une question : ma Banque Privée a-t-elle encore un avenir ?
Si la question ne se pose pas trop pour les acteurs majeurs qui ont pu s’adapter, repenser leurs organisations, investir dans les parcours digitaux, car elles en avaient les moyens et l’expérience permettant la réflexion, elle est légitime pour toutes les structures de Banque Privée plus récentes, nées d’un effet de tendance de marché, encore peu structurées, surtout tournées vers l’opérationnel, avec des encours plus faibles, et donc plus en risque sur leur rentabilité.
A la question ‘’la Banque Privée a t elle un avenir ?’’, la réponse est ‘’Oui il y a un avenir pour la Banque Privée, et plus particulièrement pour les ‘’Petites Banques Privées récentes ».
La solution n’est pas uniquement dans la concentration comme le laisse à penser certaines fusions récentes dans le secteur. Le ‘’Small is Beautiful’’ en Banque Privée est possible dès lors que ces dernières reprendront leur destin en mains en construisant de nouvelles stratégies pertinentes permettant de repenser le modèle économique mis à mal par tous les changements récents. Elles pourront alors poursuivre leur développement, retrouver l’attractivité, la compétitivité, et la profitabilité sur un marché devenu plus concurrentiel, chaque établissement ayant aujourd’hui sa ‘’Banque Privée’’.
Le temps de la rentabilité sans peine est révolu et le risque de ne rien faire pour celles qui choisiraient cette voie sera celui de la loi des rendements décroissants. Demander toujours plus d’efforts aux équipes en place pour compenser la moindre rentabilité, obtenir le même résultat, la perte de clients allant chercher un meilleur service ailleurs, ne dure qu’un temps !
Ces nouvelles stratégies pertinentes passent par une réflexion stratégique qui s’appuiera sur plusieurs leviers qui seront les moteurs d’une renouveau efficace, gage d'un développement commercial renouvelé, orienté sur des services clients à valeur ajoutée, créateur de valeur.
Repenser le fonds de commerce Banque Privée : Montée en Gamme, renouveau du Fonds de Commerce, ouverture à de nouvelles cibles de clients sont des items indispensables à retravailler pour déconcentrer le fonds de commerce et poursuivre son développement. Aujourd’hui près de 75% des clients en Banque Privée ont 60 ans et plus. Or d’ici à 10 ans, 50 % des fortunes française seront issues de la génération des Millenials. Comment les capter ? Il faut également séduire de nouvelles cibles, notamment celles des entrepreneurs car c’est là que se concentrent les fortunes de demain. Il est aussi nécessaire de sortir d’un modèle de Gestion hybride Gestion de Fortune et Mass Affluent très souvent rencontré, car à vouloir trop étreindre, on sert mal tout le monde… Un Client avec 700 K€ d’épargne sous gestion ne demande pas plus de temps qu’un client avec 350 K€ mais rapporte le double…
Disposer dune offre de services avec davantage de valeur ajoutée : élargir l’offre de services vers des services à plus de valeur ajoutée partagée notamment dans la gestion d’actifs – s’ouvrir à l’architecture ouverte intelligemment – placer l’Ingénierie Patrimoniale au cœur du dispositif de la Banque Privée – valoriser les outils informatiques et digitaux mis à disposition à leur juste valeur de ROI par une utilisation plus intensive. Un exemple sur ce sujet : la société #Harvest a développé un outil d’agrégation de comptes ‘’O2S’’ permettant au Banquier Privé d’avoir une vision élargie des avoirs du client, de transpariser les allocations d’actifs, de chercher la meilleur adéquation du couple rendement/risque en fonction du profil du Client, de développer un CRM financier performant. Bien utilisé et après une période d’apprentissage, il permet d’améliorer le PNB d’un client de l’ordre de 20 % !
Faire du Banquier Privé le chef d'orchestre de la relation Client : il ne faut pas se tromper d’objectif, en Banque Privée la clé de voute restera l’humain. Le Banquier Privé doit être le pilote de la relation client, et non l’expert. Il doit développer une empathie relationnelle forte pour être l’interlocuteur privilégié du client, , s’intégrer dans le cercle de conseils, être en capacité de proposer et de coordonner les différentes expertises patrimoniales, et financières de la Banque. La force du Comportemental sera un atout déterminant dans l’établissement d’une relation d’affaires partagée et symétrique.
Repenser l'organisation Commerciale pour plus d'efficacité: définir une nouvelle stratégie pertinente pour la Banque Privée passe par le levier d’une organisation commerciale efficiente et adaptée. Ainsi Méthode Commerciale – Animation Managériale – outils de Pilotage doivent être revisités pour être en ligne et viser un seul et même objectif : la Satisfaction du Client et l’Excellence Commerciale qui doivent être au cœur de du dispositif. Un exemple : l’apparition des nouveaux outils digitaux mis à disposition des banquiers privés font qu’ils ne savent plus très bien lesquels utiliser et à quelles occasions : revisiter la méthode commerciale pour établir un parcours client cohérent est indispensable. De même les outils de pilotage et l’animation managériale doivent être au service du Comment et pas seulement du combien car la progression des équipes passent avant tout par leur capacité à progresser
Adapter les Formations et les compétences aux nouveaux enjeux : formations académiques, techniques, comportementales doivent également être adaptées pour répondre aux nouveaux enjeux. Pour le Banquier Privé, un enjeu majeur de demain sera sa capacité à être crédible face à un Entrepreneur. Il faut aussi faciliter le swing du changement pour passer du statut d’Homme-Orchestre celui du chef d’Orchestre, indispensable pour être le pilote de la relation client. Le Manager de Banquiers Privés ne peut plus être seulement le primus inter-pares excellent technicien. Il doit avoir la capacité d’embarquer son équipe, de coacher les individus, d’être le gardien du temple de la stratégie de la Banque.
La Banque Privée de demain sera humaine et digitale ou ne sera pas. Le temps du ‘’spleen du Digital’’ est révolu. L’enjeu est de transformer cette avancée technologique en opportunité pour gagner du temps sur l’administratif et le fiabiliser dans le cadre règlementaire, pour simplifier les parcours clients dans les processus de souscription, pour faciliter les échanges d’informations, pour créer davantage d’inter-activité avec le client avec une plus grande pro-activité commerciale. Le Banquier Privé de demain sera aussi 2.0, c’est une certitude.
La Banque Privée de demain a un bel avenir devant elle si elle prend le chemin de la transformation nécessaire. Elle dispose de tous les atouts pour réussir. La conjugaison intelligente et habile de ces différents leviers créera un cercle vertueux autour d’une clientèle recomposée sur les enjeux de développement, sera génératrice de satisfaction au travers de services à valeur ajoutée mieux rémunérés. Les Banquiers Privés retrouveront l’essence même de leur métier : l’excellence commerciale dans la relation client.
Le ‘’Full digital’’ ne concernera qu’une minorité de clients plus à la recherche de prix que de conseils. Les problématiques de Banque Privée ne trouveront pas leur solution dans de simples équations informatiques, aussi performantes soient-elles. Car l’essence même de la Banque Privée, au-delà de la compétence et de l’expertise, c’est la capacité de se mettre au service des clients, pour les aider à bâtir, préserver, et transmettre le moment venu le patrimoine familial en tenant compte des particularités de chaque situation.
Alors entrons ensemble dans la Banque Privée du XXI siècle, elle a un bel avenir qui tend les bras tous les acteurs.
Auteure de théâtre.
4 ansLes banquiers privés sont parmi mes meilleurs clients donc tant mieux s’ils ont l’avenir devant eux 😉
Assistant-Director HSBC continental Europe Connect
4 ansPertinent !
Thérapeute psychocorporel, je vous accompagne corps et esprit pour découvrir ou redécouvrir vos talents et vos forces, pour apaiser vos pensées incessantes et retrouver votre sérénité.
4 ansPermettre aux équipes de s’adapter à cette nouvelle donne est indispensable, les accompagner pour monter en compétences. Je suis comme toi persuadée qu’il y a un avenir pour la banque privée , le virage est déjà pris notamment par nos clients. Ne construisons pas de muraille qui sous la force de l’évolution exploseraient...Apprenons plutôt à surfer pour aller plus loin 😊
Responsable Formation - Réseaux commerciaux | GRESHAM Banque Privée - INTENCIAL Patrimoine - Retraite Supplémentaire
4 ansExcellent article - Bravo
Responsable Équipe Banque Privée
4 ansNotre établissement a su prendre le virage de la transformation et je vous confirme que la Banque Privée chez BNP Paribas a encore un bel avenir, avec l humain en chef d’orchestre 😉