La « faim du travail », cessons de lutter, construisons le monde qui va avec !
Data gueule propose une vidéo ainsi intitulée dans laquelle elle donne une large part à Bernard Stiegler. Au niveau des constats, rien à dire. Mais, l’analyse des causes mérite un débat, car d’une juste analyse découlent de bonnes solutions.
La fin du travail
Commençons par prendre un café. C’est la machine qui le prépare, à la température idéale et avec l’amertume choisie. Peu importe. Ce qui compte dans l’idée de prendre un café, c’est la pause, la causerie, le temps de la réflexion… Nous ne pensons pas à cette machine, ni à ce café et ni l’eau. Pourtant ils sont la résultante de tant d’innovations, de négociations et de gestes répétitifs. Nous n’y pensons pas, non pas parce que nous sommes des ingrats vis-à-vis de nos aînés, mais simplement parce que nous aspirons à d’autres challenges.
Le salariat, tel que nous l’avons stabilisé au 20ème siècle se désagrège au fur et à mesure que la robotisation prend en charge la satisfaction de nos besoins physiques et physiologiques. Officiellement, cette robotisation est faite pour améliorer la productivité. Elle est rendue possible par la miniaturisation, la puissance des logiciels et le brassage de données toujours plus fraîches, abondates et diversifiées.
Certes, pour le moment, cette robotisation exubérante dépasse l’homme, en prétendant exacerber ses préférences. En réalité elle l’y enferme au mieux des intérêts des entreprises qui le servent. Mais, ça, c’est maintenant où toutes les naïvetés sont encore exploitables. Déjà la prise de conscience s’amorce avec, par exemple le succès du film Snwoden et la résistance s’organise.
L’émergence des tâches contributives
Nous abordons une nouvelle phase de notre développement, celle où nous banalisons les tâches productives au point d’être d’accord pour les reléguer à des machines et ce afin de commencer à nous consacrer aux tâches contributives, celles qui nous permettent de « réussir notre vie ».
Les tâches contributives, ce sont celles dédiées au long terme et à la cohésion de la communauté : la famille, le partage du savoir, l’innovation, la démocratie ou encore la spiritualité. Ces tâches n’ont guère de place dans le monde du travail, c’est-à-dire le « travail » récompensés avec de l’« argent dette ».
Notre système actuel ne s’occupe pas de savoir comment sont prises en compte les tâches contributives alors qu’elles deviennent de plus en plus une source de compétitivité pour les nations.
Notre défi consiste à donc à faire évoluer notre système social et monétaire de manière à ce qu’il récompense aussi les tâches contributives.
Des solutions en vue, mais complexes
Le revenu de base et les monnaies complémentaires sont régulièrement convoqués dans ce débat. Méfions-nous des raisonnements simplistes qui aboutissent au contraire de l’effet recherché :
- Le revenu de base ne doit pas avoir pour finalité de simplifier la gestion de la pauvreté par les acteurs de la finance, mais au contraire de rendre à chaque humain la part de la rente résultant des progrès qui font que les robots remplissent les tâches que nos aînés ont durement mises au point,
- Les monnaies complémentaires n’ont pas pour vocation d’enfermer les économies dans des systèmes complexes, mais au contraire de compléter tous, les modes d’encouragement aux actions positives faites par les citoyens. Il s’agit de dépasser le modèle productif pur comme actuellement.
La justice, la démocratie, l’innovation, la bienveillance, la spiritualité ou encore la pollinisation des savoirs demandent du temps. Il suffit de libérer le temps passé à chercher du travail qui n’existe presque plus. Alors, une nouvelle forme d’abondance va émerger. Elle n’est plus basée sur le toujours plus, mais le toujours mieux.
L’estime de soi, moteur du changement
L’évolution espérée de nos institutions doit permettre aux hommes de donner à nouveau du sens à leur vie puisqu’il recommande à chacun de regarder à nouveau vers le long terme.
Selon la pyramide de Maslow, nous abordons une nouvelle strate de nos aspirations : l’estime de soi.
Cette « estime de soi » n’a rien à voir avec le narcissisme ni la soif de pouvoir et d’argent. Cette « estime de soi » fait appel à la récompense sociale que l’on éprouve lorsque ce que l’on fait est bon pour la communauté et que la communauté en tire profit.
L’évolution de la société qui en résulte n’est pas faite pour les narcissiques et les êtres avides de pouvoir et d’argent. Elle est faite pour ceux qui ont envie et qui apprennent à co-construire, co-produire, co-gérer, co-agir…
Il faut les co-récompenser.
La fiscalité dans tout ça
La fiscalité a eu pour objectif de donner les moyens à la communauté de rendre chacun plus efficace dans ses initiatives et de protéger le bien commun.
Depuis l’ère industrielle, cet objectif a été complexifié à outrance et, sans doute, dévoyé de-ci de-là.
Les tâches contributives facilitent les tâches régaliennes. Il suffit d’inventer les monnaies qui permettent de se passer de fiscalité. Or, des pistes sont désormais possibles !
Avocat IT & Données personnelles - DPO - Médiateur commercial - Fondatrice du Cabinet RSC AVOCAT
8 ansTrès intéressant. Sara Sebban
Artisan (Logiciel) / Libre penseur
8 ansJe partage votre avis (depuis au moins 20 ans) mais malheureusement pas votre optimisme...
Employee
8 ansJe suis d'accord en général avec l'article et je voudrais dire que je pense qu'il faut lutter dans la vie. José Martí (January 28, 1853 – May 19, 1895):"Si no luchas, ten al menos la decencia de respetar a quienes sí lo hacen"translation:"If you do not fight, have at least the decency to respect those who do " MERCI
Délégué général
8 ansMais demain, une part des "tâches" contributives seront réalisées par l'IA.