La parole à... Carole Martinez

La parole à... Carole Martinez

Carole Martinez est écrivaine. Elle est en résidence d'écriture au Musée Unterlinden dans le cadre de l’exposition-anniversaire à venir « 170 ans - Ça se fête avec vous ! » qui aura lieu du 14 octobre 2023 au 4 mars 2024.

Vous aviez écrit une BD, en 2019, « Bouche d’ombre, Louise 1516 » où Grünewald faisait partie de l’intrigue. Quand le Musée Unterlinden a pris contact avec vous pour vous proposer cette résidence, quelle a été votre réaction ?

Le Retable m’accompagne depuis plus de dix ans. Le Musée Unterlinden ouvre ses portes aux écrivains pendant le salon du livre et, chaque fois que j’ai été invitée, Pantxika De Paepe nous a présenté en nocturne le chef-d’œuvre de Grünewald. J’ai été saisie à la fois par le Retable d’Issenheim et par la passion de notre guide. Il m’a bouleversée et inspirée. J’ai voulu le faire entrer dans mon travail d’autrice, car il remuait en moi des choses profondes. Bouche d’ombre est une bande dessinée un peu folle qui m’a offert la chance de revenir au musée et de discuter plus longuement avec sa conservatrice. À l’époque, nous avions parlé d’une éventuelle résidence. Et j’imaginais que je dormirais quelque part dans le musée. Quand vous m’avez contactée pour cette résidence, je n’ai pas hésité une seconde. Je vous attendais. Mais on ne dort pas au Musée Unterlinden.

Vous êtes la première écrivaine à être en résidence au Musée Unterlinden. L’exposition-anniversaire a permis cette résidence inédite. Comment avez-vous vécu cette semaine passée au musée ? 

J’ai été accompagnée par une équipe extraordinaire et certains d’entre eux m’ont offert une visite tout à fait personnelle du musée, chacun la sienne, avec ses coups de cœur. Je les ai suivi dans leur vie quotidienne, ils m’ont ouvert toutes les portes, l’écriture est une clé. J’ai cheminé dans les réserves, dans les salles fermées au public, je suis entrée dans les œuvres avec leur regard, leur souvenir, leur passion, leur savoir. On m’a ouvert le ventre d’un clavecin qui est un sujet de roman à lui tout seul. J’ai pu assister dans les sous-sols à l'analyse d’un crâne, sous l’œil attentif de Chloé Héninger, responsable des collections archéologiques. Une datation faite il y a 20 ans n’avait rien donné (le crâne en question, trouvé au milieu d’ossements de mammouth remonterait d'après la 1ère datation à 1950, ce qui est tout bonnement impossible). Les scientifiques vont donc tenter une nouvelle datation. J'ai pu aussi rencontrer Julie Sutter qui restaurait un panneau du 15e siècle. Les siècles, les millénaires se percutaient. J’ai pu discuter avec Julie alors qu'elle enlevait les vernis, la patine du temps. J’ai adoré vivre dans ce lieu et rencontrer ses habitants, même si je n’y ai pas dormi.

Pouvez-vous nous parler de votre première « rencontre » avec les 11 personnalités de l’exposition-anniversaire qui ont fait le Musée Unterlinden ?

Je rencontre les onze personnalités auxquelles je dois donner voix, peu à peu. Elles sont tellement différentes, travaillées par des époques différentes, habitées par des passions différentes, mais toutes ont offert leur énergie d’une manière ou d’une autre à ce musée magnifique et en ont fait le lieu fou qu’il est aujourd’hui. Artistes, galeristes, présidents de la Société Schongauer, conservateurs, amateurs d’art … Je tente de leur prêter ma plume. C’est un étrange exercice qui me fascine.

Marc Donnadieu

chercheur, enseignant, critique d’art, commissaire d’expositions indépendant, conseil en art et création

1 ans

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