La télévision, plus que jamais, tissant les liens de la vie

L’épreuve que l’humanité vient de vivre, nous aura obligé non seulement à repenser nos habitudes et nos comportements, mais, plus fondamentalement, à reconsidérer notre rapport à la maladie, à la mort… et surtout à la vie !

Si les pandémies nous sont familières depuis des siècles, ce virus, sans traitement connu, particulièrement contagieux et dangereux pour les plus fragiles, a provoqué l’anxiété et le sentiment d’impuissance que toute société, des gouvernants aux simples citoyens, ressent face à l’inconnu. Alors que la France se remettait à peine d’une fin d’année 2019 marquée par de vives tensions sociales, nos discussions, nos centres d’intérêt se sont soudainement focalisés sur cet unique objet.

Nos équipes de terrain, habituées à couvrir des catastrophes naturelles, des guerres, des actes de terrorisme, se sont transformées en reporters « de guerre de proximité », pour faire comprendre cet incroyable chaos, auquel notre système hospitalier, nos centres de recherche médicale, nos dirigeants politiques nationaux et locaux, étaient naturellement loin d’être préparés.

La prise de conscience que, au-delà de nos désaccords et frustrations, nous étions tous d’humbles mortels face à la maladie, fit basculer la narration et l’information vers de nouveaux horizons.

L’entraide, la solidarité, la générosité, le don de soi purent émerger comme souvent dans les crises extrêmes, pour montrer le meilleur de nous.  Alors que le média télévision était donné pour mort dans les années récentes, familles, fratries, communautés se sont retrouvées devant leurs petits écrans pour découvrir les dernières nouvelles, l’évolution de la maladie et partager les horribles statistiques égrenées chaque fin de journée.

Nos journalistes, aux côtés des soignants, ces « combattants en première ligne » et tous ceux prêts à aider dans cette épreuve, ont dû s’équiper de masques, de gel hydroalcoolique, de perches sur leur micro et essayer de faire de la pédagogie :

Comment trouver le bon équilibre entre le ressenti si dur du terrain et le discours évoluant au fil de la pandémie, des responsables politiques devant organiser, planifier, décider de nouvelles règles de vie ?

Comment partager des ondes positives, ce à quoi chacun aspire, face à des villes désertes, des hôpitaux surchargés, la détresse des soignants, voire des alignements de cercueils ?

En parallèle de nos pages d’information rallongées et modifiées en raison de l’actualité, la volonté chère à nos chaînes de distraire, divertir, d’éduquer, s’est trouvée bouleversée. 

Comment s’alimenter en nouveaux programmes et s’adapter à l’état d’esprit de cette époque si compliquée ? 

Comment divertir alors que tant d’entre nous souffrent et luttent pour leur vie ?

Comment montrer de façon responsable, des images de public heureux, de partage, d’embrassades alors que les consignes sont à la distanciation, à la prudence et interdisent tout rassemblement ?

Alors que nos grilles habituelles de programmes sont un savant cocktail de films récents, de séries inédites, de retransmissions en direct d’événements, comment faire face à cet arrêt subit dès la mi-mars de toutes les manifestations sportives et de tous les tournages d’émissions quotidiennes, de nouvelles séries ou de long-métrages ?

Comme souvent dans les moments de crise et de situation inédite, l’intelligence humaine et notre mémoire de jours heureux ont permis de réinventer des moments de partage, des souvenirs de bons moments et de créer des formats innovants… Petit à petit, le défi quotidien de surprendre, de satisfaire notre appétit galopant pour toujours plus de nouveautés, a fait place à des émissions au budget plus modeste, aux animateurs confinés pilotant l’émission derrière leur écran, inventant un nouvel art du dialogue à distance, avec légèreté, humilité et une simplicité retrouvée !

Face à la détresse et au manque de visibilité dans l’avenir, la télévision, compagne quasi permanente de notre quotidien réinventé, a participé à sa manière aux valeurs retrouvées de vie familiale, de voisinage, de joies simples, de bienveillance. Et elle l’a fait en s’adaptant à une nouvelle consommation, en choisissant de rediffuser des classiques du cinéma, en programmant des productions s’adressant à petits et grands plutôt qu’à des cibles commerciales adultes, ou en ne proposant qu’un seul épisode inédit par soirée au lieu de deux ou trois. Ce choix contraint et inédit a été récompensé par des scores d’audience incroyables qui prouvent la force et l’attachement au média qu’est une télévision décomplexée par rapport à l’écran digital.

Si tout le monde s’accorde à reconnaître que le monde de demain sera différent, nous aspirerons plus que jamais à faire de la télévision ce lien social, rassemblant le plus grand nombre de nos concitoyens, par son information vérifiée et contre vérifiée, comme par ses programmes.

Dans un monde « total vidéo », où nous retrouverons avec plaisir notre liberté de déplacement et nos usages de partage de contenus en mobilité, la combinaison du digital avec ce goût pour la télévision retrouvé, ouvre de nouvelles perspectives. Cette terrible épreuve aura au moins ouvert cet horizon : celui du rêve qui a toujours été le nôtre, de combiner la puissance du media TV accessible au plus grand nombre, avec la capacité d’individualiser la relation au contenu dans un mode digital.

La mission que nous nous sommes donnée dans le groupe TF1, consiste à « inspirer positivement la société », et prendra d’autant plus de sens, qu’elle permettra en des jours plus heureux, de nous retrouver collectivement autour de notre culture, de nos valeurs, dans le respect mutuel de notre diversité, et de notre confiance dans l’avenir : c’est ce qui donne la force à nos démocraties de résister aux épreuves de l’histoire.