L’ABUS DE MAJORITÉ D’UNE DELIBERATION  D’ASSEMBLÉE 
SE PRESCRIT PAR TROIS ANS

L’ABUS DE MAJORITÉ D’UNE DELIBERATION D’ASSEMBLÉE SE PRESCRIT PAR TROIS ANS

Cass. com. 30-05-2018 n° 16-21.022 FS-PB

I. LES FAITS

A l’occasion d’une assemblée générale en date du 27 juin 2008, les associés d’une Société à Responsabilité Limitée (SARL) avaient accordé une rémunération au gérant.

Cette rémunération sera confirmée à l’occasion des assemblées générales annuelles suivantes.

Le 26 décembre 2011, un associé minoritaire demande l’annulation de ces délibération selon-lui constitutive d’un abus de majorité et sollicite par conséquent le remboursement par le gérant de la rémunération perçue.


II.          LA PROCEDURE

La Cour d’appel rejette l’ensemble des demande de l’associé minoritaire en considérant que tant les demandes d’annulation pour abus de majorité des délibérations que la demande de réparation se prescrivent par 3 ans.

La Cour de cassation approuve partiellement la Cour d’appel en ce qu’elle a jugé que la demande de nullité d’une délibération pour abus de majorité se prescrivait par 3 ans.

Elle casse cependant l’arrêt de la Cour d’appel en précisant qu’elle aurait dû rechercher en l’espèce si  les demandes d'annulation formées pour chacune des décisions annuelles accordant une rémunération étaient prescrites.

Enfin, elle précise que contrairement à ce qui avait été jugé par la Cour d’appel, l’action réparation du préjudice causé par l'abus de majorité se prescrit par cinq ans et non par trois ans.


III.          LA SOLUTION

Il résulte de l’article L235-9 du Code de commerce que l’action en nullité d'actes et délibérations se prescrit par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue.

A notre connaissance, la Cour de cassation vient pour la première fois préciser que l’annulation fondée sur un abus de majorité était également soumise à la prescription triennale.

Cela n’était pas évident car l’abus de majorité repose non sur la violation d’une règle générale ou spéciale du droit des sociétés mais sur la théorie générale de l’abus de droit. L’on aurait ainsi pu la soumettre à la prescription de droit commun de 5 ans.

Cependant, dans la mesure où l’article L235-9 C.com ne précise pas la cause de nullité, l’on doit approuver cette clarification permettant de traiter uniformément la prescription de toutes les causes de nullité des délibérations sociales.

La Haute juridiction vient d’ailleurs préciser à l’occasion de cette affaire que le point de départ du délai de prescription devait être fixé au jour de la décision d’assemblée et non à la date de la décision accordant pour la première fois une rémunération.

S’agissant enfin de la prescription de la demande de réparation consécutive à la nullité de la délibération, la Cour de cassation vient opportunément rappeler qu’elle se prescrivait pas 5 ans ; la prescription triennale concernant uniquement la nullité et non la réparation de ses conséquences.

Ainsi en pratique, pour apprécier le bien fondé de la demande de réparation, le juge aurait dû se positionner sur le fait de savoir si la délibération était constitutive ou non d’un abus de majorité.

Dans l’affirmative, il n’aurait pas pu l’annuler mais il aurait pu - dû – condamner les auteurs de l’abus à réparer le préjudice de la société.


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