Le Non-Recrutement : Savoir dire non au service du business

Le Non-Recrutement : Savoir dire non au service du business

« J’ai besoin de 10 profils pour la semaine prochaine »

Combien de fois ai-je entendu un responsable entrer dans mon bureau et prononcer cette phrase ?

Probablement des dizaines de fois… Ddans les premières années de ma carrière, je prenais simplement l’info et fonçais tout droit sur les différents outils pour sourcer un maximum de candidats possible… avec souvent peu de résultats… Cela générait de l’insatisfaction pour mes responsables et de la démotivation pour moi.

Non pas que je sois contre les challenges… mais avec un peu plus de recul aujourd’hui, je suis en mesure de mieux comprendre les attentes de mes clients et d’anticiper les éventuels problèmes. Il est souvent facile pour un recruteur de tomber dans un rôle de preneur d’ordres et d’être dans une démarche réactive face aux demandes.

Mais comment se placer dans une posture plus pro-active et assumer un rôle de partenaire stratégique du business ?

J’ajoute que ma vision est celle d’un recruteur in-house dans une SSII. Les recruteurs en cabinet ou issus d’autres secteurs d’activités auront sans doute une vision différente (ou complémentaire).

Le devoir de conseil

J’avais une discussion il y a peu avec un collègue qui me parlait de l’importance de parfois faire de la non-vente chez nos clients. Un exemple précis ce jour-là où, justement, le client avait mal exprimé son besoin. Le cahier des charges était imprécis et les attentes floues. Mon collègue m’expliquait alors, à juste titre, qu’il était donc dans notre devoir de refuser de lui vendre le projet tel qu’établi initialement, et de lui apporter notre expertise en le conseillant sur la manière de mieux identifier et exprimer son besoin. Nous jouons alors ici pleinement notre rôle de conseil auprès de nos clients. Nous perdons évidemment en business immédiat mais nous gagnons sur le long terme en construisant un partenariat fondé sur notre cohérence et notre crédibilité. En repensant à cette discussion récemment, j’y ai trouvé finalement de nombreuses similitudes avec notre activité de recrutement au quotidien, où le non-recrutement ne serait pas qu’une option.

Je suis persuadé qu’on a tous un exemple dans nos parcours d’un profil rejeté à l’entretien RH mais finalement recruté en raison des urgences business… combien se sont malheureusement terminés par des fins de période d’essai ? Si nous avions persuadé, avec des arguments concrets et factuels, qu’il valait mieux rejeter ce candidat plutôt que de forcer un recrutement, le poste n’aurait peut-être pas été pourvu dans l’immédiat certes ; mais nous aurions évité cette situation. Il aurait peut-être fallu attendre quelques semaines de plus pour trouver le bon candidat. Sur le long terme, tout le monde est gagnant. Je pense d’ailleurs que ce type d’exemple peut être largement réduit, voire disparaître si le recrutement travaille plus en amont avec le business et joue pleinement son rôle de conseil.

Instruire le business

C’est justement le manque d’interaction entre recruteur et business qui mérite qu’on s’y attarde. Je reste persuadé que le recrutement ne doit pas être rattaché à la RH mais connecté directement au business. La relation avec les opérationnels doit démarrer bien avant la prise de brief sur les besoins. En n’adoptant pas une démarche proactive et en ne travaillant pas en partenariat avec le Hiring Manager, le recruteur manque l’opportunité de pouvoir connaître son environnement et ses enjeux.

Pour se placer dans une véritable démarche de conseil, le recruteur se doit de bien connaître le business de son entreprise. Comprendre quel est son talent pool, maîtriser les outils qui lui permettront de gagner en efficacité. Il doit prendre l’initiative d’organiser des entretiens réguliers avec les Hiring Managers même s’ils n’ont pas de besoin dans l’immédiat pour anticiper les futures demandes et comprendre leurs attentes, le tout saupoudré de data pertinentes et cohérentes. Ainsi, il est en mesure de savoir quel type de candidats correspond à l’activité cible ; quitte à parfois opposer des arguments concrets à des situations où le business souhaite forcer un recrutement... et donc faire de la non vente sur certains candidats.

Conclusion :

Construire une relation de confiance et adopter une démarche de conseil vis à vis du business prend du temps. Les recruteurs les plus efficaces sont ceux qui ont su développer une collaboration efficace avec les Hiring Managers en leur apportant une vraie connaissance du marché et leur expertise dans l’identification et l’attraction des meilleurs talents… quitte à parfois savoir leur dire non.




Matthieu Pédurthe

IT HRBP & Cofounder slack "HR We Can"

4 ans

Il faut absolument développer la communication, au sens strict du terme : "mettre en commun", apposé des visions pour construire "une vérité plus grande". Chaque job à son rôle de conseil auprès des autres acteurs. Pour cela il faut que chacun fasse preuve d'humilité 🙏🏻

Sébastien Skorupski

Ingénieur logiciel senior

7 ans

Excellent article, C'est un sujet qui me parle parce qu'on peut le transposer à d'autres métiers. Sans aller jusqu'à parler de soumission, nous sommes souvent amené à adopter une démarche "passive" vis à vis d'un supérieur ou d'un client tout simplement parce qu'on a peur de décevoir. Il ne faut pas oublier que dans l'esprit des gens "le clients est roi" est encore une idée préconçue fortement présent dans notre inconscient. Mais comme tu l'illustres dans ton article on ne rend service à personne en agissant de la sorte, on tire tout vers le bas et le risque c'est que la médiocrité devienne une norme et qu'on ne se sente plus à sa place au travail.

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