Le pouvoir de l'Amor Fati

Dans cet article, je vous propose de découvrir la puissance de l'Amor Fati. Le philosophe Epictète disait : "Ne cherche pas à ce que les choses se passent comme tu le désires mais désire que les choses soient comme elles sont". Je parle souvent de l'importance de la gratitude, c'est-à-dire de pouvoir avoir de la reconnaissance pour ce qui se passe dans notre vie. Pour vivre notre vie dans un état qui n'est pas celui où on espère que la vie soit comme on aimerait qu'elle soit mais finalement qu'on puisse apprécier la vie pour ce qu'elle est sans que les choses ne changent.

Aujourd'hui, je vais vous proposer d'aller un pas plus loin, quelque chose qui dépasse même peut-être la gratitude et c'est cette notion d'Amor Fati. "Amor Fati" définit peut-être l'essence, la substantifique moelle d'un groupe de philosophes grecs que l'on appelait les Stoïques. C'est un concept que l'on retrouve au travers de l'œuvre notamment d'Epictète mais qui a été finalement défini des siècles plus tard par Nietzsche. "Amor Fati" signifie l'Amour du Destin. Cela définit un état d'être où vous êtes capable d'embrasser, d'aimer les circonstances de vie, de les désirer telles qu'elles sont, à tel point que vous en ressortez grandi. C'est-à-dire que n'importe quelle circonstance qui se passe dans votre vie, si vous êtes capable d'être dans l'Amor Fati, dans l'Amour du Destin, vous pouvez embrasser ces circonstances, vous pouvez remercier la vie pour ces circonstances parce que vous réalisez à quel point elles étaient nécessaires dans le processus de votre vie pour en ressortir grandi. En fait, vous êtes tellement touché par ces circonstances, même si elles sont pénibles, même si a priori elles sont difficiles, voire potentiellement traumatisantes mais vous avez pu suffisamment vous élever, suffisamment avoir de recul, suffisamment percevoir les choses, que ça vous touche profondément émotionnellement, au niveau du cœur, ça vous tire même peut-être les larmes lorsque vous réalisez l'importance de cet événement dans votre vie, que vous êtes prêt sans l'ombre d'un doute à le revivre, voire même à espérer qu'il se passe aussi pour vos enfants.

C'est un niveau de réalisation qui transcende peut-être même la gratitude parce que ça peut être encore plus fort. Ce dont il faut se souvenir est qu'on ne contrôle pas nos circonstances. Par contre, on a toujours le contrôle sur la manière dont on va les ressentir. Cet Amor Fati, c'est lorsqu'on est capable de prendre une circonstance et d'en extirper un sens, un sens qui va au-delà même de notre propre existence mais c'est aussi à la fois la capacité de voir cet événement avec un regard d'enfant, un regard extérieur, un regard d'émerveillement. Un petit peu comme la personne toute aigrie qui marche dans la rue et il commence à pleuvoir, ça fait des flaques et elle se plaint parce qu'il pleut et qu'elle a les pieds mouillés à marcher dans les flaques et qu'il fait un temps exécrable, alors qu'en même temps vous voyez un petit enfant avec un grand sourire parce qu'il saute dans les flaques et il s'en met partout, il est tout mouillé et il est le plus heureux du monde. C'est ça l'Amor Fati. C'est ça l'Amour du Destin, c'est de pouvoir être dans le moment présent, d'embrasser ces circonstances de vie avec un degré de reconnaissance et d'émerveillement.

Alors vous me direz : "Docteur Pauli, c'est génial, j'adorerais pouvoir vivre ma vie comme ça, qu'est-ce qu'il faut que je sois, qu'est-ce qu'il faut que je fasse pour y arriver ?". Et bien je vais vous proposer 3 stratégies pour ça.

Stratégie 1 : Arrêter de se plaindre

Cette première stratégie n'est pas nécessairement facile à faire et juste entre nous, j'essaie d'y travailler énormément, c'est cette notion d’arrêter de se plaindre. Pour ce faire, il va falloir reprendre les rênes de notre mental et ça c'est quelque chose de très difficile. Peut-être que vous l'avez déjà réalisé si vous faites un travail personnel sur vous. Un exemple tout bête : vous êtes dans le trafic et à chaque fois que ça n'avance pas, vous vous énervez et ça vous affecte physiquement. Et puis au bout d'un moment, vous réalisez que vous êtes dans le trafic, ça ne vous touche plus autant mais votre mental est toujours en train de se plaindre, car lui n'a pas encore réussi à déconnecter.

L'exercice que je vais vous proposer de faire est un exercice de vigilance pour lequel vous allez déterminer une période de temps. Cela peut être 1 heure de temps pour commencer, peut être 2 heures, cela peut être une matinée, une journée, peu importe. Commencez avec une période de temps avec laquelle vous êtes confortable et là, vous allez être vraiment vigilant. La vigilance première que je vais vous demander est d'observer votre réaction aux choses et immédiatement, si vous voyez que vous partez dans une forme de plainte, on stoppe. Avoir le recul de pouvoir se dire "ok, là, il y a une partie de moi qui part dans le jugement, qui part dans le fait de se plaindre, je me détache, je ne suis pas cette partie-là de moi". Faites cet exercice régulièrement, prenez-vous un moment, observez, commencez avec 1 heure s'il faut, puis ensuite quand vous êtes à l'aise avec ça, 2 heures etc. et commencez à avoir ce recul, à développer cette compétence de pouvoir observer ce qu'il se passe et de vous plaindre de moins en moins.

Stratégie 2 : Flash Forward

Deuxième élément qui va nous aider lorsqu'on a une circonstance : le Flash Forward. Si vous êtes dans une circonstance ici et maintenant qui vous paraît traumatisante, qui vous paraît douloureuse, vous allez vous projeter dans le futur, vous n'allez pas rester dans l'événement. On va se poser la question : finalement, ça nous affecte maintenant mais dans 3 mois, est-ce qu'on y pensera encore ? Dans 6 mois ? Dans une 1 année ? Dans 20 ans ? Dans 50 ans ? Quel regard allons-nous avoir sur cette circonstance ? Vous allez voir que la plupart du temps, sur ces choses qui nous font réagir, qui nous déclenchent, qui nous empêchent d'être dans la gratitude, qui nous empêchent d'être dans l'Amour du Destin, en vous donnant cette perspective, en vous écartant, en vous élevant, en prenant de la distance à la vision, à la lorgnette de qui vous allez être dans le futur, ces circonstances ont très certainement très peu d'impact sur le long terme. Donc lorsque vous êtes pris, ne vous laissez pas embarquer dans la situation, prenez du recul, faites quelques grandes respirations et posez-vous la question : quel impact cela va avoir ? Quel regard aurai-je sur ce moment-là dans 20 ans ? Vous allez voir que dans la majorité des cas, c'est insignifiant.

Stratégie 3 : Prendre la vie comme un jeu

Troisième stratégie pour développer cet Amour du Destin, cet Amor Fati : prendre la vie comme un jeu. C'est très intéressant parce que si vous interviewez des personnes qui ont été dans des circonstances de vie extrêmes, des circonstances extrêmement difficiles, voire même dont la vie a été en danger, ça peut être des soldats dans des camps d'entraînement très difficiles ou des personnes par exemple qui étaient parties en montagne et qui s'étaient perdues et qui ont finalement pu redescendre saines et sauves, vous allez voir que ces circonstances étaient tellement demandantes pour le système, étaient tellement un challenge que le seul moyen qu'ils ont eu pour pouvoir s'en sortir a été de prendre cette circonstance comme un jeu.

Par exemple, ça peut être l'alpiniste qui s'est perdu et qui pour redescendre va prendre ça comme un jeu. Au lieu de marcher dans la tempête, de se focaliser sur la lourdeur et sur les pas qu'il doit faire, il le prend comme une forme de jeu. J'avais vu l'interview notamment d'un alpiniste américain qui disait : "J'ai commencé à développer ma danse, chaque pas était une forme de break dance, j'étais en fait dans l'imagination de me trouver dans une foule en train de leur démontrer ma nouvelle danse". On le voit aussi chez, par exemple, des participants Navy Seals qui ont des entraînements très difficiles où tout d'un coup on leur demande de faire 1000 pompes d'affilée parfois enchaînées avec des polichinelles, ils prennent ça comme un jeu. Au lieu de se focaliser sur les 1000 qu'ils doivent faire, ils se focalisent sur la capacité d'en faire 10 et dès le moment où ils en ont fait 10 : "Yes, je l'ai fait !", parce qu'ils prennent ça comme un jeu et la première étape dans les 1000, ce sont les 10 premiers, et ensuite ce sont les 10 suivants et à chaque fois qu'ils en font 10 de plus : "Yes !", parce qu'ils ont avancé d'une case sur ce jeu qui est venu de cette contrainte énorme de devoir faire 1000 de ces polichinelles d'affilée.

Ce sont des stratégies extrêmement puissantes, mettez-les en pratique, prenez du temps pour être vigilant et pour arrêter de vous plaindre, utilisez le Flash Forward et utilisez ce jeu de la vie.