Le serious game un outil de formation

Le jeu, souvent associé à l’enfance, n’a pas sa place dans le monde adulte, celui du travail et de la formation. Idée reçue ou fondée ?

Les psychologues ont pu montrer le rôle décisif du jeu dans le développement psychologique de l’enfant. Ils ont particulièrement insisté, à l’instar de Winnicot sur le jeu spontané du jeune enfant qui manipule des objets, les transforme, les détourne. Dans le « play » il s’agit jouer pour soi, de « jouer pour jouer ». L’enfant joue par besoin et par plaisir ; sans but ou règles précis tels qu’on les trouve dans le « game ». Le jeu libre est une production imaginaire, une expression symbolique qui assure une fonction réparatrice et libératrice, crée des « espaces transitionnels ».

Dans les jeux libres de « faire semblant » l’enfant n’est pas dupe. Il ne confond pas la fiction avec la réalité. Il incarne des personnages, simule leurs émotions, mais il sait pertinemment que « c’est pour de faux ! ». Cependant, c’est dans cet espace fictif que l’enfant apprend des « choses concrètes ». Il s’approprie progressivement des rôles sociaux (imitation), avec leurs règles qu’il intègre dans divers scénarios avec la présence physique ou symbolique d’autres partenaires (enfants ou adultes). Source de créativité et de construction de la personnalité, l’activité ludique chez l’enfant ouvre sur la réalité.

Le « game » consiste à réaliser un but en suivant des règles du jeu fixées préalablement par d’autres personnes que le joueur. C’est en jouant que celui-ci va progressivement découvrir les règles à suivre pour réaliser le but à atteindre (jeu de l’oie, de cartes, d’échecs...). Le serious game à visée formative propose par le truchement de la vidéo simultanément une activité ludique et un contenu (informationnel, notionnel…) associé à un domaine de connaissances ou d’expertise que le joueur doit s’approprier. C’est dans cette intention formative que réside le caractère sérieux du jeu.

Le « game » diffère selon les objectifs pédagogiques poursuivis par les concepteurs. La pratique du « game » peut viser la transmission et l’appropriation de connaissances particulières en formation initiale ou continue ; l’entrainement ou la recherche de ressources pour améliorer la performance individuelle dans une situation particulière (par exemple, l’accueil de clients) ; le développement de compétences professionnelles, dans ses dimensions individuelles et collectives (coopération, « team building » versus compétition inter équipes) dans la reproduction virtuelle d’une situation réelle (par exemple : la simulation d’un service dans une entreprise). Autant de situations qui permettent aux joueurs de s’approprier des savoirs et des savoir-faire jugées utiles par le concepteur dans les situations réelles actuelles ou à venir.

La plupart des travaux sur les SG négligent le rôle de la vidéo en tant que médium spécialement construit pour mobiliser à la fois l’esprit et le corps. C’est pourtant bien par la manipulation d’objets (dimensions visuelles, motrices…) et les échanges langagiers (pour soi et pour les autres) que les joueurs accèdent à des informations, des connaissances qu’ils s’approprient en pratiquant le jeu. A l’intar de l’enfant qui se donne pleinement dans son jeu, avec le serious game le joueur adulte s’engage par lui-même dans la tâche proposée. C’est ce que les spécialistes appellent la capacité immersive des SG. Cette capacité, liée à la qualité du contenu présenté sous forme vidéo (design, graphisme), affecte le joueur. C’est particulièrement remarquable dans l’éducation thérapeutique des patients diabétiques où le corps, porteur d’émotions remobilisées par le jeu est aussi porteur de la maladie. L’outil de formation SG implique la manipulation active d’objets et l’échange langagier qui permettent aux participants de poser des questions inédites, de repérer des informations utiles à leur traitement, de découvrir des « recettes », etc. Ce que ne permet pas l’accueil informationnel « classique » qui rationnalise la maladie, mais exclut le corps des patients.

Pour répondre à la question de départ relative à la place du jeu dans le travail et la formation, les SG, utilisés comme outils de formation, réhabilitent l’idée de ludicité. Dans ce cas, elle n’est pas dérivative, insignifiante ou non productive. C’est le mécanisme qui permet d’engager des individus dans des tâches dont ils ignorent l’issue et qui les maintient dans l’activité de recherche d’informations, de traitement de connaissances pour réaliser un but personnel (cas de l’éducation thérapeutique) ou professionnel (développement de compétences utiles dans des situations concrètes vécues ou à venir).

L'équipe de Serious Games Community


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