Le Syndrome de la chaussure neuve

Texte écrit depuis l’Archipel français de Saint-Pierre et Miquelon, Pointe du Diamant

Ce texte, j’ai voulu vous l’écrire depuis des semaines mais il fallait le bon moment, le bon lieu et évidemment, l’inspiration, cette même inspiration qu’on prend avant un envol.

Le lieu, pour écrire, je l’ai cherché. Chaque jour je me disais « Tiens, ici, c’est pas mal », mais je ne m’arrêtais pas. Tous les lieux pour écrire étaient « pas mal », mais visiblement, ce n’était pas le « bon moment ». 

Aujourd’hui, je me suis levée en me disant « C’est le bon moment, c’est le bon jour, je vais aller au bon endroit « du jour » ». Tout aurait pu me faire dévier de ma route. Mon chien qui m’accompagne aurait pu se sauver et j’aurais raté « le coche ». La table où je suis installée, face à la mer (ah ben oui, quand je dis le bon lieu…) aurait pu être prise. Mon thermos de café (oui, j’ai aussi prévu cette douceur) aurait pu couler dans mon sac avec l’ordinateur….bref, autant de choses dans une infinité de possibilités qui auraient pu arriver mais non. Je suis là à vous écrire depuis l’archipel français de Saint-Pierre et Miquelon, qui, tel un coin à champignons, semble rester dans l’ombre et dans le secret.

En tout cas, c’est d’ici que sortent mes mots et c’est précisément d’ici que j’ai choisi de vous parler du syndrome de la chaussure neuve.

Drôle d’expression. Non, je n’ai pas la folie des chaussures neuves. Je serais même plutôt du genre qui a des chaussures depuis plus de 20 ans - comme des chaussons - et qui a du mal à s’en séparer et surtout qui les porte toujours. Cette métaphore de la chaussure neuve qu’on donne au changement de vie est finalement une image parlante quand on sort de sa zone de confort.

Je peux en parler, je viens d’opérer un changement de vie radical.

Des fois, on garde des chaussures qui nous ont toujours fait mal aux pieds…comment pourrions-nous continuer d’avancer sereinement, dans la douleur ?

La chaussure neuve vous séduit mais vous avez peur d’avoir des ampoules ? Le prix à payer est trop couteux ? Pensez-vous attendre les soldes ? le « bon moment » ? et si l’offre passait et qu’il soit « trop tard » ?

Et si au moment où vous vous décidez, il n’y a plus votre pointure ? Question de timing…

Se choisir et « s’acheter » des chaussures neuves c’est toucher aux notions de choix, d’essai, de réflexion, d’effort… 

Oui, il faut une décision.

Parfois, cette paire de chaussures - neuves, inédites - ne plaira pas à notre entourage. Pas leur style, pas leur goût. Ou parfois votre entourage sera jaloux de ne pas les avoir prises avant vous, ou de ne pas les avoir vues. Parfois, elles ne sont belles que parce que c’est vous qui les portez. C’est vous qui les sublimez. Elles n’ont pas la même allure dans une vitrine qu’à votre pied ou sur quelqu'un d'autre.

Chacun a ses besoins, sa forme de pieds, d’orteils. Tordus, pas tordus, oignon, pas oignon, arthrose, sportif, dodu, fin…chacun, chacune a ses propres besoins pour être bien. Au lieu de critiquer, saluons et admirons ceux qui cherchent et trouvent ce qui leur correspond. C’est peut-être ça au final que nous critiquons : notre comportement à ne pas changer, même si on a mal aux pieds…

On a aussi le droit de changer de goût, de mode, de style…

Oui vous serez fiers d’avoir « osé ».

Oui, vous aurez mal aux pieds quelques temps, le temps de s’habituer. Et peut-être que dans 20 ans, vous les aurez toujours. Peut-être même que de temps en temps vous aurez des cailloux dans la chaussure. 

Au pire, si à la longue elles ne vous conviennent pas, vous pourrez en essayer d’autres; sans les prendre, jamais vous ne saurez…

Je vous assure que marcher sans avoir mal aux pieds, c’est carrément le panard !

Texte écrit en direct de ma nouvelle vie, avec mes chaussures de 1995 aux pieds !