Le Tsar GPT va-t-il perdre sa couronne ?

L’irrésistible ascension de ChatGPT a commencé par un tweet. Le 30 novembre 2022, Sam Altman publie ce message sur son compte : « Aujourd'hui, nous lançons ChatGPT, essayez de discuter avec lui ». Incontestablement son idée de génie pour en faire un succès planétaire : transformer une IA générative conçue au départ pour faire avancer l'intelligence numérique pour le bien de l'humanité en un chatbot grand public.

Deux ans jour pour jour plus tard, ChatGPT cumule les records : plus de 250 millions de visites hebdomadaire dans le monde, une valorisation stratosphérique de 157 milliards de dollars mais un chiffre d’affaires de –« seulement »- 3 milliards de dollars pour un déficit attendu de 4 à 5 milliards. 

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Au-delà des statistiques impressionnantes, ChatGPT n’a pas seulement répondu à des questions complexes ou optimisé des workflows : il a aussi joué les Cyrano modernes, aidant des millions d’utilisateurs à naviguer dans leurs relations sociales ou amoureuses. Il s’est aussi improvisé psy, mentor, coach, assistant codeur, infatigable stagiaire, chef ou artiste en herbe et j’en passe !

Mais cet engouement s'accompagne d’un coût énergétique astronomique, soulevant de sérieuses questions sur la durabilité de ce modèle.

Comme je l’évoquais dans mes Flashs de la semaine #16, l’avenir pourrait bien appartenir aux SLM, ces « small language models ». Plus économes, ils semblent de plus en plus aptes à concurrencer, voire détrôner, les mastodontes que sont les LLM (Large Language Models).

Alors ChatGPT restera-t-il indétrônable ou verra-t-il un concurrent prendre sa place ?

Avec 3,7 milliards de visites mensuelles en octobre 2024, il domine encore le marché, loin devant ses rivaux comme Claude, Gemini, ou même Perplexity. Pourtant, la compétition s'intensifie : des challengers comme le français Mistral ou des fonctionnalités innovantes, comme les Artefacts d’Anthropic, remodèle le paysage.

Bien qu'il ne soit pas encore prêt à détrôner ChatGPT, Mistral s'affirme comme un concurrent de poids. La licorne française vient d’ailleurs de faire un pas de géant en établissant une base à Palo Alto, en plein cœur de la Silicon Valley.

C’est une étape clé pour attirer des talents en intelligence artificielle et renforcer sa présence sur le marché américain.

Un mouvement qui intervient alors même qu’OpenAI annonce en grande pompe son implantation à Paris.

Et avec son « Mistralship Startup Program », Mistral suit les  traces des géants de la tech. Ce coup de pouce offre 30 000 crédits de plateforme aux jeunes pousses, un accès VIP aux derniers modèles et un accompagnement sur mesure pendant six mois.

Avec cette initiative, Mistral plante son drapeau dans l’écosystème des startups, affirmant que le vent tourne peut-être… en sa faveur !

Bref, la compétition s’exacerbe sur tous les fronts pour Open AI aux Etats-Unis. Jugez-en plutôt : cette semaine, Amazon revient dans le game avec Olympus, un modèle d’IA orienté analyse vidéo et image. Attendu pour la semaine prochaine, il était initialement attendu en septembre, et j’en avais parlé dans la 1ere édition de Mes Flashs de la semaine.

Capable de suivre la trajectoire d’un ballon de basket ou de détecter des problèmes d’équipement industriel, Olympus vise des niches encore peu exploitées. Moins performant en génération de texte qu’OpenAI ou Anthropic, il parie sur ses compétences vidéo et des prix compétitifs pour se démarquer.

Qu’Amazon change la donne ou reste spectateur du match, les mois à venir promettent du sport !

 Au moment où Amazon se prépare à bousculer la scène avec Olympus, l’institut de recherche AI2, -fondé par Paul Allen en 2014-, dégaine son OLMo 2.

Entraînés sur 5T de données académiques et web de haute qualité, cette famille de modèles linguistiques open-source égale des poids lourds comme Llama de Meta.

Mais OLMo 2 ne se contente pas de rivaliser : il ouvre la voie en partageant son code, ses données d’entraînement et des outils complets pour les développeurs.

Une IA performante, éthique et open-source ? Voilà une piqûre de rappel, bienvenue pour les géants (fermés) du secteur !

Outre AI2 et son modèle OLMo 2 qui bouscule l’ordre établi avec l’open-source, une autre tentative de détrôner ChatGPT se dessine : xAi prépare une application autonome pour concurrencer le leader dès décembre.

Jusqu’ici limité à X, Grok, le modèle d’IA de la société, pourrait franchir une étape clé en s’ouvrant au grand public.

Reste à savoir si Elon Musk et ses 100 000 GPU Nvidia joueront une carte gagnante.  Ou s’agit-il d’un bluff de plus ?

Tandis que xAI d’Elon Musk avance ses pions avec Grok, Donald Trump voudrait couronner un « tsar de l’IA » (et ce ne sera pas Musk). Les spéculations vont bon train, certains évoquant Max Tegmark, partisan d’une pause dans l’IA, ou Michael Kratsios, ancien directeur technologique des États-Unis.

Mais le mandat du Tsar est clair : coordonner un « projet Manhattan » pour l’IA, accélérer les innovations et garantir la suprématie américaine face à la Chine. (voir Mes Flashs de la semaine #17)

Une chose est sûre : entre suprématie technologique, sécurité nationale, coordination multi-agences et contrôle des géants de la tech, le nouveau maître de l’IA américain concentrera entre ses mains une autorité considérable.

L’histoire, elle, jugera de la pertinence, et de l'ironie, de ce choix lexical. Mais ce sera un homme clé pour les géants de la Tech.

Si les États-Unis travaillent sur un « projet Manhattan » pour renforcer leur domination en IA, c’est peut-être parce qu’ils voient dans les avancées chinoises une raison légitime d’avoir peur.

Alibaba vient de dévoiler QwQ-32B-Preview, un modèle open-source capable de résoudre des problèmes complexes étape par étape. Avec une fenêtre contextuelle de 32K et des capacités avancées de raisonnement et d’introspection, il rivalise avec la série o1 d’OpenAI sur des benchmarks clés.

Ce modèle montre que la Chine s’approche dangereusement du niveau des leaders américains.

Si la Chine développe des modèles puissants comme QwQ, les agents d’intelligence artificielle, capables de coordonner et automatiser des tâches complexes, sont, sans nul doute, la prochaine nouvelle frontière à atteindre.

Fondée par d’anciens dirigeants de Google, Meta et Stripe, la startup dev/agents est en train de développer ce qui devrait être un moment Android pour l’IA, à savoir un système d’exploitation dédié aux agents intelligents.

Ces agents, capables de coordonner des actions comme rédiger des rapports ou planifier des voyages, fonctionneront sur divers appareils grâce à une infrastructure cloud.

Soutenue par 56 millions de dollars de financement, l’équipe promet de résoudre les défis liés à la confidentialité, aux interfaces utilisateur et au développement, jetant les bases pour une adoption massive des agents d’IA.

Et c’est le coup de flash de la semaine.

Toujours en tête, Anthropic lance le Model Context Protocol (MCP). Ce standard open-source permet aux assistants d’IA de se connecter directement à des outils et données externes, comme Google Drive, Slack ou GitHub.

Son atout ? simplifier l’intégration des LLM dans les systèmes existants en éliminant le besoin de connecteurs spécifiques pour chaque plateforme.

Avec le MCP, l’IA ne réfléchit plus seulement, elle agit – un petit pas pour Claude, mais un bond de géant pour des assistants réellement utiles

Ce protocole MCP, qui connecte l’IA à des bases de données et outils variés, pourrait aussi accélérer les découvertes médicales, en se couplant avec une puissance prédictive.

Une étude de l’University College of London révèle que des modèles d’IA, comme un prototype baptisé « BrainGPT », surpassent les neuro-scientifiques en prédiction de résultats scientifiques, avec une précision de 86 % contre 63 % pour les experts humains.

Ces systèmes exploitent des modèles cachés dans les données de recherche. Ils ouvrent la voie à des outils capables de valider les plans d’expérience avant de mener des études, ce qui pourrait permettre de gagner du temps et d'économiser des ressources.

 On entrevoit un futur où des agents spécialisés viendront même challenger des modèles comme ChatGPT, non seulement pour traiter l’information, mais pour révolutionner la science.

On termine Mes Flashs de la semaine avec celui qui a ubérisé le monde... et qu’on attendait pas dans l’IA.

Uber élargit son empire avec Scaled Solutions, une division dédiée à l’annotation de données pour l’intelligence artificielle, basée sur son modèle de travailleurs indépendants.

Ces gig workers, recrutés dans des pays comme les États-Unis, le Canada et l’Inde, étiquettent des données pour Uber, mais aussi pour des clients externes comme Aurora Innovation et Niantic.

Ce mouvement s’inscrit dans un écosystème de plus en plus dynamique où des outils comme le Model Context Protocol d’Anthropic et des projets comme ceux de /dev/agents tentent de bâtir des infrastructures solides pour une nouvelle génération d’agents IA.

En démocratisant l’accès à des données massives et étiquetées de qualité, Uber pourrait fournir la matière première essentielle pour entraîner des modèles IA capables de concurrencer ChatGPT sur des cas d’usage spécialisés ou émergents. Et accélérer l’arrivée de challengers dans la course à la domination de l’IA. 

Le Tsar ne va certainement pas perdre sa couronne tout de suite mais l’empire de l'IA se fragmente. Entre les agents ultra-connectés, les challengers spécialisés et les géants comme Uber ou Alibaba qui rebattent les cartes, chaque pion avancé redessine le terrain de jeu…

Au point que même le roi pourrait finir par se trouver sur le banc de touche ?

💡FlashExpert : Ce qu'il faut retenir de Slush par Nicolas Diacono

L’évènement tech mêlant startups et investisseurs a regroupé les 20 et 21 novembre, plus de 13000 personnes, dont 5500 startups et 3300 investisseurs, sous le thème de la métamorphose afin d’adresser les enjeux mondiaux liés à la santé, au changement climatique et à l’avènement de l’IA.

Comme chaque année, le moment phare de l’évènement est la présentation de Benedict Evans. Cette année, il est bien évidemment revenu sur l’IA et tout le buzz associé autour de l’IA générative. Toujours très critique autour des buzz dans le monde de la Tech, pour lui, il faut prendre un certain recul et le terme IA est tout simplement une nouvelle manière de parler de logiciel.

Reste à savoir si les LLMs vont devenir un outil d’infrastructure, de nouveaux APIs, des plateformes ou tout simplement une nouvelle manière de penser l’interface utilisateur. 

Si au début des années 2000 l’e-commerce faisait ses véritables débuts, qu’en 2010 on assistait au début des business SaaS, l’IA générative sera certainement la plateforme business des années 2030.

Pour Thomas Wolf, co-fondateur d’Hugging Face, en 2025 l’IA devrait avoir un impact immense dans le domaine de la santé et de la chimie.

A l’image de la startup Entalpic qui vise à décarboner la chimie grâce à l’IA. L’IA va devenir un outil essentiel pour la découverte de nouveaux médicaments, personnaliser les traitements, analyser les données biologiques et même découvrir de nouveaux matériaux/substances.

C’est donc en toute logique que la startup néerlandaise Oasys Now a remporté le million € de la « Startup Competition » de cette édition de Slush. Cette startup a développé une plateforme alimentée par l'intelligence artificielle pour l'identification et le recrutement de patients dans le cadre des essais cliniques. Une solution qui permet d’automatiser l’analyse des critères d’éligibilité des patients.

Dans la continuité, la startup Bioptimus a fait sensation avec son projet de créer un « ChatGPT » dédié à l’analyse des données biologiques afin de venir en soutien à la recherche médicale et au personnel soignant.

De son côté, ReVision Implant pourrait permettre aux personnes aveugles de recouvrés la vue (en 3D noir et blanc) dès lors que la cécité n’est pas liée à un dysfonctionnement cérébral, le tout grâce à des lunettes connectées, un implant cérébral et bien évidemment à l’IA.

Et si Ray Kurzweil avait raison avec sa prophétie de la singularité et l’allongement drastique de la vie humaine à partir de 2045. Etes-vous prêt à vivre 200 ans ?

Mais avant de vivre 200 ans, il va falloir que l’humanité s’attaque au changement climatique. Et encore une fois l’IA se trouve au cœur des débats pour son côté énergivore.

C’est ainsi que la startup Oriole Networks reconfigure les GPU/TPU pour qu’ils soient plus efficaces dans les applicatifs IA tout en étant moins énergivores.

De son côté, la startup française Sopht veut optimiser les ressources IT des entreprises pour en diminuer l’impact carbone. De nombreuses startups sont venus montrer leurs solutions pour optimiser la gestion énergétique grâce à l’IA mais la solution est peut-être tout simplement dans la manière de produire de l’énergie.

C’est ce que propose Aalo afin de révolutionner la production électrique en permettant d’avoir un réacteur nucléaire dans son garage pour un coût de production du Kw/H à 3 centimes.

Faut-il se préparer à avoir une mini centrale nucléaire dans sa maison ou dans son quartier pavillonnaire ?

🧡  Voilà c'est fini ! J'espère que 𝕄𝕖𝕤 𝔽𝕝𝕒𝕤𝕙𝕤 𝕕𝕖 𝕝𝕒 𝕤𝕖𝕞𝕒𝕚𝕟𝕖 vous ont plu. Et je vous dis à la semaine prochaine 👋🏻

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Emmanuelle

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