Les conditions d'introduction d'une requête aux fins d'Injonction de Payer en droit OHADA.

Les conditions d'introduction d'une requête aux fins d'Injonction de Payer en droit OHADA.

Face à un débiteur indélicat, plusieurs procédures s'ouvrent au créancier à l'effet de recouvrer sa créance. L'une d'elle et la plus rapide est l'Injonction de payer. L'Injonction de payer est une procédure par laquelle un créancier peut obtenir une décision de justice (Ordonnance) condamnant son débiteur au paiement de sa créance puis procéder à l'exécution forcée de ladite décision. Son aboutissement suppose l'observation par le créancier de certaines conditions prévues par l'Acte Uniforme OHADA.

L'article 1 de l'Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution dispose que : "Le recouvrement d’une créance certaine, liquide et exigible peut être demandé suivant la procédure d’injonction de payer". Toujours dans la même veine, l'Article 2 du texte suscité énonce que : "La procédure d’injonction de payer peut être introduite lorsque : la créance a une cause contractuelle ; l’engagement résulte de l’émission ou de l’acceptation de tout effet de commerce, ou d’un chèque dont la provision s’est révélée inexistante ou insuffisante".

Il transpire à la lecture combinée de ces dispositions légales que, le législateur OHADA fixe les conditions limitatives et impératives dans lesquelles, à l’initiative du créancier, doit s’exercer la procédure d’injonction de payer ; il en résulte que seule l’existence de celles-ci détermine l’opportunité et la recevabilité de ladite procédure.

A- Certitude d’une créance

1- Existence d’une créance certaine

Une créance certaine est celle dont l’existence ne souffre d’aucune contestation, dont l’existence est incontestable et actuelle ou encore qui est indubitable (CA Centre, n° 339/Civ., 16-5-2003 : La CITIMA c./ Sieur F. P., Ohadata J-04-203).

Le caractère certain d’une créance résulte :

  • De la production, par le créancier, de factures signées par le débiteur
  • D’une reconnaissance de dette notariée, de l’exécution et de la réception des travaux de construction convenus entre les parties
  • Dans le cadre d’une relation contractuelle, d’une obligation de somme d’argent dont le cocontractant est tenu dans le cadre normal de l’exécution du contrat envers le cocontractant qui en poursuit le recouvrement
  • De la production de chèques tirés au profi t du créancier et non encore encaissés par ce dernier (TGI de la Mifi , n° 17/CIV, 20-1-2004 : T. A. c./ N. P., Ohadata J-05-140) ;

2- Preuve du caractère certain de la créance

-Par une reconnaissance de dettes : L’opposition formée contre une injonction de payer au motif que la créance n’est pas certaine est non fondée lorsque le créancier produit, pour prouver sa créance, une reconnaissance de dette, une sommation de payer avec interpellation et une proposition du débiteur de se libérer de ses obligations de façon échelonnée (TPI Yaoundé, n° 300/C, 20-1-2000 : N. H. c./ T. J.-C., Ohadata J-04-441).

-Par l’absence de preuve du paiement : Une créance dont le recouvrement est poursuivi doit être considérée comme certaine, dès lors que le débiteur qui n’apporte aucune preuve de ce qu’il s’est libéré de sa dette, en conteste seulement le mode de calcul et d’établissement des factures, sans s’expliquer sur les règlements partiels déjà effectués (CCJA, n° 21, 17-6-2004 : SDV-CÔTE D’IVOIRE c./ Sté RIAL TRADING, Le Juris-Ohada, n° 3/2004, juillet octobre 2004, p. 11, note BROU Kouakou Mathurin ; Recueil de jurisprudence de la CCJA, n° 3, janvier-juin 2004, p. 130 ; Ohadata J-04-382).

B- La liquidité d’une créance

1- Existence de la liquidité d’une créance

Une créance est liquide :

  • Lorsque son montant est déterminable en argent
  • Dès lors que le quantum est déterminé dans sa quantité, chiffré (CCJA, n° 21, 17-6-2004 : SDVCÔTE D’IVOIRE c./ Sté RIAL TRADING, Le JurisOhada, n° 3/2004, juillet octobre 2004, p. 11, note BROU Kouakou Mathurin ; Recueil de jurisprudence de la CCJA, n° 3, janvier-juin 2004, p. 130 ; Ohadata J-04-382) ;
  • Lorsque le montant est mentionné avec précision
  • Lorsque le créancier a ajouté les intérêts de droit en sus de la somme due au principal, cet ajout n’ayant pas pour effet de remettre en cause son caractère liquide

2- Preuve de la liquidité de la créance

-Non contestation du montant bancaire

  • Le montant de la créance invoquée est celui produit par les comptes du banquier dès lors que :
  • Le débiteur ne conteste pas que son créancier (une banque) a établi le solde définitif conformément aux stipulations de la convention de compte courant qu’ils ont conclue, et ne produit aucune pièce contredisant le montant arrêté par le créancier. Le solde débiteur arrêté par la banque doit donc être retenu comme montant de la créance en principal (CCJA, n° 25, 15-7-2004 : Dame M. c./SCBCL, Ohadata J-05-168, Le Juris-Ohada, n° 4/2004, octobre-décembre 2004, p. 2, note BROU Kouakou Mathurin ; Recueil de jurisprudence, n° 4, juil.-déc. 2004, p. 16)
  • D’une part, le débiteur allègue, sans le prouver, que son compte bancaire est un compte courant, et que, d’autre part, en ce qui concerne la liquidité, il ne produit aucune pièce susceptible de contredire les relevés de compte établis par le créancier, alors qu’il a été informé par des lettres de la détermination et de l’évaluation dudit montant (CCJA, n° 08/2005, 27-1-2005 : SGBCI c./ GETRAC, Ohadata J-05-190, Le Juris-Ohada, n° 1/2005, janvier-mars 2005, p. 21).

-La preuve de l'établissement d’un paiement partiel

Selon l’article 1315 du Code civil applicable au Cameroun, « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver », il convient de recalculer le montant de la créance en tenant compte des remboursement déjà effectués par le débiteur dans la condamnation à intervenir.

C- Exigibilité d’une créance

Une créance est exigible lorsque :

  • Elle est arrivée à échéance
  • Elle est matérialisée par des billets à ordre impayés
  • Le débiteur ne peut se prévaloir d’aucun délai ou condition susceptible d’en retarder ou d’en empêcher l’exécution ; la créance litigieuse est exigible dès lors que le débiteur ne se prévaut ni d’un terme conventionnel ni d’un moratoire, la convention ayant prévu qu’en cas de retard de paiement, la totalité des comptes devient immédiatement exigible (CCJA, n° 21, 17-6-2004 : SDV-CÔTE D’IVOIRE c./ Sté RIAL TRADING, précité, Ohadata J-04-382). Dans le même sens, (CCJA, n° 018/2006, 26-10- 2006 : SAFCA c./ 1) Sté CTS SARL, 2) M. M. R. A., 3) P. M. L. N. D., Rec. de jur. n° 18/2006, p. 16, Le Juris-Ohada n° 1/2007, p. 11, Ohadata J-08-93) ;
  • Lorsque le débiteur n’indique pas le terme suspensif qui affecterait la créance, et ne prouve ni l’existence, ni l’acceptation par la créancière de la lettre de change alléguée (TPI Douala-Bonanjo (Cameroun), n° 89/COM, 12-12-2008 : NBC HOLDING S.A. c./ ECOBANK CAMEROUN S.A, Ohadata J-12-229) ;
  • Lorsque le titulaire peut en exiger immédiatement le paiement ; une mise en demeure de payer les impayés de loyers adressée à un preneur et restée sans réponse emporte l’exigibilité de la créance du bailleur (CA Ouagadougou (Burkina Faso), ch. com., n° 041/99, 19-6-2009 : K. B. G. c./ SOPAFER-B, Ohadata J-10-217 ; CA Littoral (Cameroun), n° 107/ CC, 1-9-2008 : Mr N. E. c./ Sté des entreprises de provenderie et d’élevage du Cameroun, Ohadata J-09-134) ;
  • Lorsque, même très ancienne, elle résulte d’un prêt consenti sans intérêt et sans échéance de paiement car cela ne signifie pas que la date d’échéance est indéterminée ; a partir du moment où une sommation de payer a été délivrée aux débiteurs qui ont reconnu la créance en proposant des modalités de paiement, sans s’exécuter, la créance devient exigible.

Il s'agit des conditions impératives dont le non-respect par le créancier entraîne purement et simplement le rejet de sa requête aux fins d'injonction de payer.

Procédures simplifiées de recouvrement

Injonction de payer

Conditions

MBOMBOCK Thomas TANG

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