Maintenant quoi ?

Maintenant quoi ?

Il faut 21 jours à l’homme[1] pour changer ses habitudes de vie et cela fait plus de 70 jours que le Québec a déclaré l’état d’urgence sanitaire à la suite de l’annonce d’une pandémie mondiale. Je me suis isolé dans mon condo les quatre premières semaines de cette crise. J’ai changé ma façon de travailler, de consommer et de me divertir. Certaines de ces nouvelles habitudes ne changerons pas.

Après un mois d’ennuis tout seul, en confinement, en me disant que ce mauvais moment allait passer et que nous allions revenir à la normale bientôt, je me suis résigné. Le virus est là et ce n’est malheureusement pas demain la veille que nous l’éliminerons. Un de mes client m’a fait réaliser que mon métier est un service essentiel. Si une rencontre en personne est obligatoire en rapport avec sa situation financière, nous devons le faire, nous prendrons les précautions nécessaires.

Depuis mon retour à la banque[2], j’ai réalisé l’impact d’être auprès de mes collègues et de nos clients. Nous avons développé un esprit d’équipe solidaire afin de respecter les règles de distanciation sociales. Nous avons instauré une chorégraphie et des moyens de communication sécuritaires et efficaces. Les rencontres clients ont lieu par vidéo conférences plutôt qu’en personne, à l’aide de signatures électroniques. Nos méthodes de travail ont évolué grâce à nos leaders. Les entreprises qui pourront s’adapter rapidement sortiront gagnantes.

Les scientifiques les plus optimistes prévoient un vaccin dans les 12 à 18 prochains mois. Même les experts de la Maison Blanche, actuellement en quarantaine, ne prévoient pas de cure d’ici la fin de l’année. Je ne crois malheureusement pas au Père-Noël, le virus ne va pas s’en aller de lui-même sans ne jamais revenir. Mais rassurez-vous, nous ne sommes pas condamnés à l’isolement pour autant. Il n’en revient cependant qu’à chacun d’entre nous d’agir pour éviter la contamination.

 Après cette longue introduction, nous devons vivre avec la COVID-19, pour combien de temps ? Nul ne le sait. Et on doit se demander comment opérer la réouverture afin de garder un équilibre. Il faut donc vivre avec.

Situation économique au Canada :

Selon Stéfane Marion, économiste en chef de la Banque Nationale, la seule crise à laquelle on peut se comparer est celle de la grippe espagnole, nous n'avons aucun autre comparable. Fermer l’économie a entraîné la fermeture des grandes villes, surtout dans le secteur des services, ce qui représente un recul de 27% du PIB. Une récession atypique. Les industries les plus touchées sont l’hébergement et la restauration, les arts et spectacle, le transport aérien et les ventes au détail. Ça représente 7% de notre économie mais 22% en terme du nombre d’emploi. Ce qui aura un impact considérable sur les pertes d’emploi et la consommation.

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Les pertes d’emploi sont de l’ordre de 4 millions au Canada et 27M aux USA, ce qui correspond à une perte de 20 ans de création d’emploi aux États-Unis, comparativement à 15 ans pour le Canada. Le système de sécurité social étant moins généreux aux USA qu’au Canada, ils auront plus de difficultés à se remettre rapidement de cette crise. Les écarts entre les riches et les pauvres va continuer de se creuser.

Suite à l’injection des capitaux par les banques centrales (rachats de tires), nous avons atteint un niveau de liquidités confortable. La Banque du Canada maintiendra les taux d’intérêts bas pour les dix prochaines années, en deçà de l’inflation. C’est la définition mathématique des taux négatifs. Les rendements des titres à revenus fixes seront anémiques. C’est donc dire que les titres en actions sur les marchés boursier seront nécessaires dans un portefeuille pour générer des rendements à long-terme. Les actions à dividendes seront de loin une meilleure option que les CPG (certificats de « pauvreté » garantis) à long-terme.

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Pourquoi pouvons-nous rouvrir l’économie aussi rapidement ? Les travailleurs par leur âge, sont moins touchés par la COVID-19. Le risque persiste, mais nous ne pouvons pas rester sur pause éternellement. On peut s’attendre à une reprise économique assez forte dans les prochains mois. Stéfane Marion s’avance, avec un doute raisonnable, d’un retour aux sommets des marchés d’ici les 12 prochains mois. Il peut se tromper, mais je suis d’accord avec lui. Nous serons toutefois dans une nouvelle économie. Les entreprises qui étaient en difficultés avant la crise ne survivrons pas. Malgré le coup de pouce de l’état.

Buffet & Munger - Omaha Nebraska

Pour la première fois dans son histoire, l’assemblée annuelle de Berkshire Hathaway s’est tenue virtuellement avec la collaboration de Yahoo Finance qui a présenté un reportage LIVE. Une innovation qui a permis à des millions d’investisseurs d’assister à cette événement. Les années précédentes, la ville était envahie de centaine de milliers de visiteurs, mais pas cette année. Leur message fut axé sur la résilience des américains (et de l’humain en général selon moi) devant l’adversité, en nous rappelant que les États-Unis furent fondés il y a à peine 245 ans. Buffet évalue la richesse collective a environ 1 milliards de dollars à l’époque de George Washington. On évalue aujourd’hui la richesse américaine à 105 990 milliards.

Il s’est défait de toutes ses participations dans les compagnies aériennes, malgré des pertes de 70%. Pourquoi vendre les Airlines ? J’aime ces deux vieux shnouk parce qu’ils ont la mémoire longue. Après l’effondrement des tours en 2001, les compagnies aériennes se sont mises sous la protection des créanciers. Les actionnaires n’ont pas eu le choix d’échanger leurs actions dans un ratio de 10 pour 1, malgré le financement des gouvernements. Ce n’est pas une valeur sure en ce moment.


Le poids de la dette

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Le déficit fédéral sera de 252 milliards, 12,7% du PIB. Comparativement à 25G$ en 2019 (1.1%). Une dette que nous n’arriverons jamais à rembourser vous me direz. L’augmentation du déficit est principalement causée par la baisse des revenus de l’état, suite à la récession soudaine causée par les mesures de confinement et les dépenses extraordinaires adoptées par le gouvernement fédéral pour soutenir l’économie et gérer la pandémie. Patrick Leblond explique que la dette du Canada est détenue par les banques canadiennes et étrangères et les grands fonds d’investissements. Plutôt que de simplement émettre 252G$ en titres sur le marché, la Banque centrale émet de nouvelles obligations à taux 0 ou presque, tout en rachetant les anciennes obligations (à taux plus élevés) sur le marché secondaire à un rythme de 5G$ par semaine. Elle rachète aussi des titres de créances d’entreprises canadiennes. Cette stratégie nous permet de diminuer le coût de la dette puisque les taux d’intérêts ont baissé depuis la crise. Le fait d’être un bon élève à l’école avec une cote de AA+, nos titres sont en demande.

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La Réserve Fédérale américaine applique la même stratégie à un rythme de 400 000$ à la seconde. « … tant que les investisseurs sont disposés à acheter les obligations du gouvernement, ce dernier peut alors en émettre de nouvelles pour rembourser les anciennes qui arrivent à échéance. La dette est ainsi reconduite à son échéance et, ainsi, jamais effectivement remboursée. De plus, si l’économie croît plus vite que le déficit, le ratio de la dette par rapport au PIB diminue, comme il l’a fait au cours de la dernière décennie. »

Accélérer le futur

Cette pandémie a soudainement bousculé notre vie en changeant nos habitudes. Nous faisons presque tous nos achats en ligne, on reprend contact avec de vieux amis, virtuellement. Plusieurs d’entre nous travaillons de la maison. Il n’y a plus d’heure de pointe, on consomme moins de pétrole, il y a moins de pollution dans les villes. Toutes les réunions se font par vidéo-conférence, sans que personne n’ait à se déplacer, ce qui est plus efficace dans beaucoup de cas. Nous avons toujours un coach d’entraînement, mais nous le voyons le Zoom. Notre esprit solidaire nous pousse à consommer local, on remet en question la chaine d‘approvisionnement mondiale et repensons notre autosuffisance alimentaire. Nous sommes plus sensibles à l’environnement, plus généreux, plus compréhensifs.

Nous ne serons pas pris avec les enfants à la maison pour toujours, mais nous ferons probablement plus de télétravail. Les réunions se feront par vidéoconférences afin de respecter la distanciation sociale. Plutôt que de louer de grands espaces de bureaux au centre-ville, serait-il plus rentable de payer aux employés un forfait télécom et un bureau à la maison? Sans prévoir la disparition des tours à bureaux, les entreprises n’auront pas besoin d’un espace de travail réservé pour chaque employé.

Les chercheurs ont fait des pas de géant en recherche et innovations au cours des 3 derniers mois, plus qu’au cours des 3 dernières années. MILA est un des millions d’exemples. La crise les pousse à améliorer leurs processus et mieux gérer leurs liquidités. Les grandes entreprises manufacturières doivent prévoir une deuxième vague de contamination communautaire. Surtout si leurs usines sont aux États-Unis. Si j’étais CEO d’une de ces entreprises, je mettrais tout en place immédiatement pour être près et rester ouvert pour continuer à faire des affaires.

Conclusion

Les marchés boursiers sont en hausse grâce à un élan de positivisme, que je partage. Nous sommes dans une réouverture progressive des économies partout dans le monde et les entreprises et les clients semblent s’adapter. Oui il y a des délinquants, il y en aura toujours. Malheureusement pour eux, la loi de Darwin s’appliquera, triste pour ceux qu’ils vont infectés.

Nous aurons une reprise économique progressive en Swoosh ou Nike. Les marchés anticipent rapidement la reprise, mais nous ne sommes pas de retour en eaux calmes. Nous vivrons encore des séances de volatilités à la hausse et à la baisse. L’aide des gouvernements et des banques centrales porte fruit. La baisse de mars anticipait le pire, maintenant nous avons l’espoir d’un vaccin.

Si une 2e vague survient et que nous devons retourner en confinement, les petits restaurants, bars et salles de spectacles et boutiques locales risquent de mourir. Les emplois perdus sont à faible salaire, cette tranche des travailleurs était déjà en situation précaire avant la pandémie. Tandis que certains travailleurs à hauts revenus continuent de travailler. L’écart se creuse entre les riches et les pauvres.

Imaginez combien de personnes il est nécessaire pour faire vivre les festivals l’été à Montréal. Pour survivre, l’industrie du tourisme a besoin d’une solution à court et à long-terme.

L’idée d’un revenu minimum garanti doit selon moi être débattue et considérée. Nous éviterions de nous perdre dans des centaines de programmes sociaux incompréhensibles. Une bonne fiscalité peut nous enrichir tous.

La pandémie actuelle aura nécessairement un grand impact sur le « dessin » de l’économie du futur. Il n’y aura pas de retour à la normale. Nos façons de vivre, de travailler et de penser ont changé. Nous avons dépassé les 21 jours. Il y a certaines choses pour lesquelles nous ne reviendront pas en arrière.





Mise en garde, les propos qui suivent sont le fruit de mon analyse personnelle, suite à mes lectures et visionnement des derniers jours. Mes commentaires ne sont en aucun cas endossés par mon employeur. Il en revient à donc à vous de faire votre idée suite à cette lecture. Merci de votre compréhension.





[1] Je fais ici référence à l’homme en tant qu’espèce terrestre, ne faisant pas référence au genre. Je vous confie qu’aujourd’hui, je me sens comme une simple créature vivante vulnérable devant un ennemi invisible. Un être vivant terrien comme un autre.

[2] Les succursales bancaires existent encore et nous sommes sur place, tous. Les employés pouvant travailler à distance le fond. Ils sont plus de 13 000.

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