Monthly Review : Juin 2024
Les données économiques publiées en mai ont inversé certains mouvements marquants du premier trimestre, donnant l’image d’un contexte sans tendance bien affirmée.
L’inflation américaine – l’élément aujourd’hui central pour les marchés – a vu son mouvement de baisse initié l’année dernière s’inverser au premier trimestre, entraînant un réajustement significatif des longs taux. Les chiffres publiés en mai ont changé à nouveau la donne en suggérant que l’inflation pouvait se stabiliser – à des niveaux toutefois trop élevés pour être acceptables par la Fed. Cette nouvelle en demi-teinte a été considérée par les marchés comme un pas dans la bonne direction et a entraîné une détente des longs taux. Elle n’est cependant pas suffisante pour briser le statu quo de la Fed, d’autant que, même si l’inflation séquentielle rassure, le chemin vers le retour à la normale promet d’être long. D’une part, les effets de base vont peser sur les glissements annuels et, d’autre part, l’inflation des services semble bien ancrée au-dessus de 4 %. Les effets désinflationnistes (les anticipations des agents, la politique monétaire et l’amélioration de l’offre) ont probablement aujourd’hui perdu de leurs forces.
Sur le plan conjoncturel, le premier trimestre a largement surpris à la hausse aux US, mais les données récentes, particulièrement celles de la consommation, ont pointé vers un ralentissement. Les indicateurs avancés, qui semblent beaucoup moins prédictifs depuis la pandémie, ont également nettement reflué (particulièrement l’indice ISM). Il faut probablement se réjouir de voir la croissance se rapprocher enfin du potentiel, car c’est la condition indispensable d’une résorption sans douleur de l’inflation, d’autant que les récentes performances de la partie offre de l’économie américaine (poussées par la productivité et l’immigration record) ne vont probablement pas perdurer.
L’Europe suit les évolutions conjoncturelles américaines, mais avec un retard de phase. Elle a stagné depuis un an et demi, mais semble récemment se reprendre, comme le suggère la publication des PMI du mois de mai ou celle des enquêtes Eurostat. On observe notamment un fort rebond de l’activité manufacturière en Allemagne et a l’UK. La consommation devrait en outre soutenir la demande à l’avenir, car la confiance des consommateurs s’améliore. On peut aussi noter que la dégradation des conditions de crédit s’est interrompue, avec une stabilisation du volume de nouveaux prêts et de leurs conditions.
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En revanche, les dernières publications d’inflation ont été décevantes, avec un glissement annuel core passant de 2,7 % à 2,9 %, une accélération plus rapide qu’attendue due largement aux services, comme on l’a déjà observé aux US. Ces données ne devraient pas dissuader la BCE de procéder à sa première baisse des taux en juin, car elle s’y est quasiment engagée. Toutefois, le manque de visibilité sur la trajectoire de l’inflation se traduit par une forte incertitude sur le rythme des baisses de taux futures. Il est probable qu’elle se cantonne à des baisses trimestrielles, conditionnées à des évolutions favorables des données. La révision des prévisions macroéconomiques permettra de jauger les objectifs attendus par la banque centrale.
En Chine, la publication des PMI pour le mois de mai a confirmé les tendances au ralentissement, avec une baisse simultanée des composantes manufacturières et des services. Les indicateurs de demande domestique apparaissent très déprimés, avec une baisse des ventes de véhicules, une contraction des ventes immobilières et une baisse des créations de crédits. Les données sur le marché de l’emploi observables dans les enquêtes d’activité sont également globalement négatives. Les autorités chinoises ont donc réagi, notamment en éliminant des restrictions à l’achat de biens immobiliers. Il est également probable que la politique monétaire chinoise devienne plus accommodante. Du point de vue des marchés développés, les déboires chinois pèsent peu, car la contagion en matière de demande est faible et leurs effets sur l’inflation globale sont favorables.