Ne pas dire ce que l’on pense : diplomatie ou lâcheté ?
Quelqu’un a fait cette déclaration sur un forum : « Si tout le monde disait à tout le monde ce que tout le monde pense de tout le monde, plus personne ne parlerait à personne ». Cette personne a fait cette déclaration justement pour intervenir sur une question ouverte sur le forum qui demande : Ne pas dire ce que l'on pense : diplomatie ou lâcheté ? Et si nous nous mettons à y réfléchir ? Est-ce pour ne pas blesser notre interlocuteur ou est-ce par peur de la réaction de ce dernier que nous ne lui disons pas ce que nous pensons. Autrement dit, nous le faisons pour lui ou pour nous ? Allons voir !
D’abord, il convient de nous entendre sur la signification de ces deux termes dans le contexte que nous les abordons dans ce texte. La diplomatie dont il s’agit ici prend le sens de souplesse, habilité, adresse, prudence dans la conduite d’un entretien ou d’une affaire difficile tandis que la lâcheté se réfère à un manque de courage, d’énergie morale, de fermeté. (Cf. Dictionnaire de français Larousse)
Maintenant, nous allons nous en tenir à ces définitions pour pouvoir comprendre dans quel camp nous nous positionnons quand nous ne disons pas exactement ce que nous pensons des autres.
Bien qu’il m’arrive des fois de ne pas dire tout ce que je pense ou de voiler mes pensées, très souvent on m’adresse des reproches disant que je suis trop dure dans mes prises de parole. Pour me défendre, je dis toujours que je suis authentique. C’est ma personnalité. Je ne peux et ne veux la changer pour rien au monde. Il m’arrive même d’en souffrir. Personnalité trop forte ? Peut-être !
Une personne authentique c’est quelqu’un qui a un comportement assertif, c’est-à-dire qu’il exprime de façon claire et directe ses sentiments aux autres. Il ne cache pas ses qualités ni ses faiblesses par peur du jugement des autres. Cette personne n’est ni diplomate ni lâche. Les contraires de ce comportement peuvent être l’agressivité et la manipulation. La personne authentique respecte son vis-à-vis tandis que le manipulateur n’a aucune marque de respect pour l’autre. Le manipulateur cherche à exercer une influence sur l’autre, en cherchant à avoir le contrôle sur l’autre tout en prétendant agir dans l’intérêt de ce dernier. Pour ce faire, il peut agir avec beaucoup de diplomatie sans qu’il ne soit en réalité un diplomate. Le vrai diplomate ne blesse pas. Par contre, le manipulateur est un lâche ; en général, il cache ses faiblesses. Au beau milieu se trouvent la fuite ou le silence qui ne sont pas des comportements des plus idéaux. En fuyant une situation parce qu’elle déplait l’autre, on ne fait que se manquer de respect.
Vérité absolue ou relative
Par ailleurs, il faut, en toute chose, rechercher le respect mutuel. La bonne nouvelle est que cette attitude se travaille et se développe. Il faut savoir tout simplement peser le pour et le contre. Dans notre coutume, nous aimons dire que toute vérité n’est pas bonne à dire. Je crois que cela a un lien direct avec ce passage de la bible qui dit : « Tout est permis, mais tout n’est pas utile ; tout est permis mais tout n’édifie pas. 1 Cor. 10 : 23 » Ici, je comprends que, quand on n’a pas mieux à dire, mieux vaut se taire. A ce moment, est-ce que ce silence peut caractériser un manque de respect à sa personne ? Je ne le crois pas. Au contraire, je pense que savoir se taire quand il le faut est esthétique. Cependant, le verset suivant de ce même passage dit : « Que personne ne cherche son propre intérêt, mais que chacun cherche celui d’autrui. » Quel paradoxe ? En négligeant notre propre intérêt au profit de l’autre ne fait-il pas de nous des lâches ?
La question n’est pas de déterminer quel comportement est meilleur entre le lâche et le diplomate, ou si les deux sont bons ou mauvais. L’important est de parvenir au respect mutuel dans nos échanges. Trop souvent, nous prenons l’habitude de parler de manière négative sans nous soucier de l’effet que cela peut avoir non seulement sur nos interlocuteurs mais aussi sur nous. Dire ce que l’on pense : oui, mais pas n’importe comment ! Il nous faut savoir ménager notre langage. S’il est vrai que Socrate affirme : « Je pense, donc je suis », nous n’existons pas, pour autant, pour offusquer nos semblables par la façon dont nous exprimons nos pensées à leur égard. Nous sommes appelés à aimer nos prochains. Et si nous pensons aimer nos prochains, nous devons bannir les formulations négatives que nous leur adressons trop souvent. Pratiquement, tout peut se dire, mais il faut trouver les bonnes formes et en mesurer les conséquences. Soyons des altruistes.
Toto a un cancer en phase terminal. Nous avons peur de lui dire qu’il va mourir, mais il a le droit aussi de connaitre de quoi il souffre. Tout est une question d’éthique. Ne pas nous montrer diplomate en cachant à Toto la gravité de son état de santé. Ne pas nous comporter en lâche non plus en le fuyant. Plutôt que de dire ou de ne pas dire la vérité à Toto, l’essentiel c’est d’établir une relation « vraie » avec lui.
Avant de parler : PENSE
Parler est un acte aussi créateur que destructeur, nous dit Amélie Nothomb. Parler un peu, beaucoup, parler pour ne rien dire ou se taire, on a souvent du mal à trouver l’équilibre. Je suis tentée de vous dire, comme une certaine Madame Dupneu : « Avec tout ce qu’on entend et ce qu’on voit, on est forcé de penser ce qu’on pense mais on n’est pas obligé de le dire ». Evidemment, il faut taire ce dont on ne peut parler. Mais, pour être assertif sans être ni trop diplomate ni trop lâche je vous suggère cette maxime: "Avant de parler, PENSE = Est-ce Positif - Exact - Nécessaire - Sage - Enrichissant ?????"
Wislène P. F. Laguerre
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