Non, l’Avocat n’est pas un voyou !

Non, l’Avocat n’est pas un voyou !

Il y a deux ans, Madame Taubira avait demandé  à un groupe de travail de formuler des propositions pour améliorer la sécurité du travail des magistrats, au regard du constat de la dégradation des conditions d’exercice existantes. Le rapport vient de tomber. Il est stupéfiant.

Dans le cadre d’un rapport qui vise la sécurité physique des magistrats et des menaces proférées par des personnes faisant l’objet de poursuites pénales, les auteurs de stigmatiser les pratiques de certains avocats.

Il ne s’agit plus d’une polémique sur des rivalités malheureusement devenues classiques, entre magistrats et avocats mais bien d’une prise de position agressive.

Ce rapport comporte en effet une proposition n°10, dans les termes suivants : « instaurer un dialogue régulier avec les instances représentatives des avocats afin d’évoquer les comportements susceptibles de caractériser des manquements aux principes éthiques et d’établir des mécanismes de prévention et de règlement des difficultés ».

Pour arriver à cette proposition, le groupe de travail rapporte que : «  tous au long des travaux, les relations difficiles voire conflictuelles entretenues avec certains avocats spécialisés en criminalité organisée ont été fréquemment évoquées. Dans leur pratique quotidienne, les magistrats entendus ont en effet souligné qu’ils se trouvaient confrontés à des conseils qui, loin de participer à l’émergence de la vérité, s’inscrivaient dans une opposition systématique à l’action de l’autorité judiciaire » (…) dont le principal objet est de déstabiliser le cours de la procédure judiciaire »

Cette appréciation oscille entre  contestation de l’exercice des droits de la défense, et dénonciation  de pratiques professionnelles confinant à une forme de complicité des clients.

Dans un cas, comme dans l’autre, elle est inadmissible.

Ce rapport témoigne d’une méconnaissance de la réalité des activités des « instances représentatives des avocats ».

L’Ordre de Paris compte en son sein, depuis plusieurs décennies, une commission en charge des relations avec les magistrats. Pour sa part, le Procureur général a un rôle central dans les poursuites disciplinaires des avocats. En cas de manquement, les avocats sont convoqués devant les commissions de déontologie et éventuellement font l’objet d’une ouverture de procédure disciplinaire, laquelle est suivie par le parquet général.

Le fait que ce rapport ignore l’existence de ces procédures est une manière de faire croire à l’impunité, pour ne pas dire l’immunité dont bénéficient les avocats.

Ce qui est finalement le plus surprenant est que ce rapport cache le manque de moyens matériels, financiers et humains qui devraient être mis à la disposition des magistrats au regard de leur charge de travail et de la réelle solitude dans laquelle ils se trouvent le plus souvent pour l’assumer.

Les magistrats et les avocats ont des intérêts communs pour le bon fonctionnement de l’institution, et le dialogue est indispensable.

Le bâtonnier est souvent alerté par des magistrats, mais il l’est aussi par des confrères qui se plaignent du mauvais accueil qui leur est réservé par certains magistrats. Au point qu‘on évoque un climat de défiance systématique à l’égard des avocats.

Cette défiance réciproque n’est plus tolérable.

L’immense majorité des avocats respecte les principes essentiels de la profession notamment ceux de courtoisie, de délicatesse et de probité. Il serait dommage que par des conclusions hâtives et des amalgames infondés, on détériore plus encore les relations entre avocats et magistrats.

Il est temps de réinstaurer « la foi du palais ». Il faut non plus des discussions de salon, mais un véritable dialogue, ininterrompu, qui nous permette d’exercer, de part et d’autre, nos offices. Cela passe aussi par une formation commune et de vrais et longs stages d’accueil des uns chez les autres

Il faut renouer l’indispensable climat de confiance entre nous, qui doit présider à l’œuvre de justice. Et, cela passera, s’il le faut, par la sanction des manquements, et un rappel à l’ordre de toutes les incivilités,  qu’ils soient commis par les uns ou par les autres, sans distinction.

Marie-Aimée PEYRON & Basile ADER
Candidats au Bâtonnat et au Vice Bâtonnat du barreau de Paris

Jerôme GARDACH

Avocat SELARL GARDACH ET ASSOCIES

8 ans

À quand une réforme du droit des obligations à une bonne conduite réciproque? Le bon comportement des uns avec les autres , synallagmatique, n'est pas une clause abusive....

Maxime Colliou

Avocat - Domaines de compétences : Droit pénal et dommage corporel

8 ans

Il y a vraiment des gens qui pensent que l'avocat a pour mission "l'émergence de la vérité" ? Cela donne une idée sur sérieux du rapport...

Christophe Courtau

Consultant certifié en transition professionnelle/Formateur /Juriste généraliste - MARD

8 ans

oui, mais les droits de la défense n'autorisent pas tout.....et des magistrats mais aussi des conciliateurs (bénévoles qui font ce qu'ils peuvent....) se plaignent de comportements de certains avocats peu courtois voir irrespectueux même si nous savons tous que la justice est au bord de l' asphyxie

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