Pourquoi les prix sont si élevés sur les aires d’autoroute
Sur l’aire de Mâcon, ce sont 4 000 m² d’infrastructures qui accueillent les automobilistes. LP/Raphaël Pueyo

Pourquoi les prix sont si élevés sur les aires d’autoroute

Sur les aires, les prix sont jusqu’à 30% plus élevés. Une différence justifiée par les contraintes imposées aux exploitants, dont les marges sont modestes.

Par Vincent Vérier, envoyé spécial à Mâcon (Saône-et-Loire) - Le Parisien

Le 1 septembre 2019 à 10h24

« Près de dix euros pour deux cafés. DIX euros ». Assise au soleil, en compagnie de sa fille, Magali fulmine. Après quatre heures de route depuis Vitry-le-François (Marne), elle s'est arrêtée sur l'aire de service de Mâcon Saint-Albain (Saône-et-Loire), en bordure de l'autoroute A6, sur la terrasse d'un café Starbucks. « C'est propre, agréable, confortable, je sais bien que j'ai acheté un café amélioré, mais quand même. Sur les aires, les prix sont toujours exorbitants », estime cette comptable, en articulant bien chaque syllabe.

« J'aurais bien acheté un croissant. Mais il coûte 1,75 € quand dans une boulangerie on vous le vend à 0,95 € ». Noémie et Olivier, un jeune couple de bottier de la région parisienne, ont fait leur calcul. « À l'aller, on s'est arrêté deux fois pour manger à une cafétéria, raconte le jeune homme. Et la note a été salée, 100 € au total. Pour le retour, on a préparé des sandwichs. »

Concession à des entreprises spécialisées

Comment expliquer que les prix flambent dès que vous franchissez les barrières de péages? Pour le comprendre, il faut d'abord savoir que les 364 aires de station-service qui jalonnent nos voies rapides sont gérées sous forme de concession, à l'image des autoroutes. Les sociétés d'autoroutes comme la Sanef, APRR ou ASF confient à des entreprises spécialisées dans la restauration et la distribution de carburant, la gestion des aires.

Un marché que se partagent Areas, Autogrill, Sighor et SSP pour la partie restaurant et Total, BP, Shell, Avia, Esso et les marques de la grande distribution comme Carrefour et Leclerc pour le carburant. En moyenne, les concessions ont une durée de 7 à 15 ans, à charge pour ces entreprises de rentabiliser leurs investissements qui se chiffrent parfois à plusieurs millions d'euros.

Car pour avoir le droit d'exploiter une aire de service, ces entreprises s'engagent à réaliser un certain nombre de travaux de modernisation, de proposer des services comme de la restauration assise ou à emporter, des boissons, des aires de pique-nique ou des jeux pour les enfants. Ou encore d'installer des bornes pour charger les voitures électriques. « Tout est détaillé dans le cahier des charges que nous leur soumettons, précise Xavier Rigo, directeur général adjoint des Autoroutes Paris-Rhin-Rhônes (APRR), qui gère plus de 2 300 km de voies rapides entre Paris, Lyon et l'est de la France. Le meilleur dossier est choisi sous le contrôle de l'Etat ».

«Même le Mac Do est plus cher»

Si en 2006 la France a confié au privé ses autoroutes — et par extension ses aires —, elle impose des contraintes. Les aires doivent être ouvertes 24 heures sur 24 heures, toute l'année, même les week-ends et les jours fériés, avec une présence humaine. Pas question de se contenter de pompe à essence en libre accès avec un distributeur de nourriture. Les toilettes et la douche sont obligatoirement gratuites, en nombre suffisant, et des plats chauds doivent être proposés entre 7 heures et 22 heures. « Tout cela a un coût, notamment le travail de nuit, insiste Xavier Rigo.

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Pour la restauration, en moyenne, votre déjeuner vous coûtera 10 % à 15 % de plus sur l'autoroute. « Même le Mac Do est plus cher ici, constate Amandine, la fille de Magali. Les menus sont quelques dizaines de centimes d'euros plus élevés ». Le Big Mac, le burger qui a fait le succès du fast-food américain, est affiché 4,95 € alors qu'il est vendu 4,40 € dans le centre de Mâcon, à une quinzaine de kilomètres de là.

Sur les autres produits, la différence de prix est estimée entre 15 % et 20 % de plus sur autoroute que dans une petite boutique de centre-ville. Et jusqu'à 30 % si ce même produit est acheté en supermarché. « Nos volumes sont plus bas qu'une grande surface et nos heures d'ouvertures plus importantes qu'un magasin de centre-ville, justifie Xavier Rigo. Vous retrouvez ces contraintes dans la différence de prix ». Sans oublier les vols et les braquages qui pèsent sur les chiffres.

Sur l’aire de Mâcon, le Big Mac est affiché 4,95 € alors qu’il est vendu 4,40 € dans le centre-ville/LP/Raphaël Pueyo.
Sur l’aire de Mâcon, le Big Mac est affiché 4,95 € alors qu’il est vendu 4,40 € dans le centre-ville/LP/Raphaël Pueyo.  

Sur l'aire de Mâcon, 4 000 m² d'infrastructures accueillent les automobilistes. Autour, quelques coteaux rappellent que nous sommes sur une terre de vin. Une aire un peu particulière puisqu'un pont, occupé par des restaurants, enjambe l'A6 pour faire le lien avec l'aire installée dans l'autre sens de circulation. « C'est une petite ville que nous avons à gérer, résume Dorian Clairé, le directeur des marchés autoroutes pour Areas. Nous avons notre station d'épuration, il faut ramasser les poubelles, entretenir les espaces verts. Il faut aussi faire venir nos livraisons jusqu'ici. Tout cela a un prix. »

Récemment rénovée, l'aire accueille de grosses enseignes, McDonald's, Starbucks ou encore Paul — gérées sous forme de franchise — et deux stations-service, Total d'un côté et Shell de l'autre. De quoi attirer les automobilistes et faire de l'aire de Mâcon une des cinq plus importantes du réseau APRR qui en compte 97. « Le samedi 17 août, on a atteint un pic, plus de 6 500 clients accueillis, confie Julien Galamand, directeur du site. Ça veut dire 2 257 cafés vendus, 1 492 sandwichs achetés, 3 258 burgers consommés chez McDo ou encore 900 plats chauds distribués à la cafétéria. »

Une rentabilité modeste

Une fréquentation très saisonnière qui oblige à jongler avec les effectifs. « Il y a 74 CDI en équivalent temps plein tout au long de l'année et en été on rajoute environ 70 CDD, notamment des étudiants », détaille le patron de l'aire. « C'est toute la difficulté de notre business, complète Dorian Clairé. Il faut disposer des bâtiments pour accueillir les pics de fréquentation, pendant les vacances d'été et d'hiver, tandis que l'autre partie de l'année ils deviennent presque trop grands. Ça coûte. »

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"Le samedi 17 août, on a atteint un pic, plus de 6 500 clients accueillis", confie Julien Galamand, directeur du site/LP/Raphaël Pueyo.

Alors combien rapporte une aire d'autoroute ? « Ce n'est pas la vache à lait que certains veulent faire croire, prévient Xavier Rigo. Pour APRR, ça représente 3 % à 4 % de nos revenus (NDLR : versés aux autoroutiers par les exploitants des aires sous forme de redevance et/ou de pourcentage du chiffre d'affaires) ». Et Xavier Rigo de confier : « Un tiers de nos aires de stations-service ne sont pas rentables ».

Car contrairement à ce que pourrait laisser penser le nombre d'automobilistes qui circulent sur les autoroutes, les chiffres d'affaires des aires sont modestes : « Entre 1 M€ et 10 M€, affirme Dorian Clairé. Et nos marges diminuent. Elles ne sont pas à deux chiffres. Il faut savoir qu'en moyenne, une personne reste une vingtaine de minutes sur une aire et dépense 10 € ».

Mais pour Xavier Rigo, aucun doute : « Il y a trop d'aires de service sur les autoroutes. Une tous les 60 km maximum ». Il faut dire que le maillage remonte à la construction des autoroutes, il y a plus de quarante ans, quand les voitures consommaient plus et disposaient de réservoir plus petit. « Pour améliorer la rentabilité des aires il faudrait en regrouper 30 % et diminuer les contraintes, assure le dirigeant d'APRR. Par exemple, avec des stations-service entièrement automatisées. »


Flore THOMAS

Chargée de Clientèle ESPACE 2

5 ans

C'est une situation assez bien exposée il est vrai, en sachant que l'aire d'autoroute de Macon fait partie des plus grosse en taille, service et restauration proposée ! Après cela relève du choix de chacun de faire halte sur une aire d'autoroute et de consommer sur place, d'avoir préparer un pique-nique ou de sortir des "sentiers balisés" et de découvrir des petits restau locaux et du coup, de prendre son temps à la pause déjeuner.... Mais l'article est parlant... 

chalon peep

Président chez Association PEEP Chalon sur Saône et PEEP AD71

5 ans

Merci pour ce bel article qui nous ouvre un peu plus les yeux sur ce phénomène qu'est le prix sur les autoroutes.

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