Pourquoi passer à un épisode du podcast par semaine était une erreur 😬
J’ai toujours été très déterminé.
Quand j’étais petit, mon père disait déjà “Quand Jérémie a une idée en tête, c’est pas dans ses pieds!” (voilà, voilà, je ne sais pas si c’est une expression Belge ou de la popote maison, mais en tout cas c’est gratuit).
J’ai grandi avec l’adage “Quand on veut, on peut”. En mode self-made man à l’Américaine, oué oué. Tout est possible à celui qui croit. Et je rajouterais même “... et à celui qui se donne les moyens d’y arriver”. Alors j’ai cru. Et je me suis donné les moyens.
A l’école, j’étais bon élève. Pas le meilleur. Mais je travaillais dur pour y arriver. Pareil aux Beaux Arts. Je trépignais d’impatience à l’idée d’entamer des études artistiques (parce que voyez-vous “Quand-je-serai-grand-je-serai-dessinateur”). Alors une fois que j’y étais, pas question de faire n’importe quoi. Mon avenir était en train de se jouer. C’était du sérieux, ok ?
Ma vie, je l’ai toujours construite comme ça. Sérieusement. Méthodiquement. Intentionnellement. Mû par cette idée grandiloquente que tout est possible si on accepte de suer des gouttes.
C’est pas très fun dit comme ça, mais quand j’observe mon parcours, l’adage s’est vérifié. Selon mes propres critères (ou mon conditionnement, c’est selon), j’ai eu tout ce que je désirais. J’ai voyagé. J’ai vécu à l’étranger. J’ai commencé à gagner ma vie en exerçant un métier que j’aimais. Je me suis marié. Je suis devenu papa. J’ai fondé une famille. Aujourd’hui, j’habite à Paris. Je suis illustrateur. J'ai un agent. Et j’ai créé un podcast qui marche. Croyez-moi, j’en ai pleuré. De joie hein. Parce que le chemin n’a pas toujours été simple… et il ne l’est toujours pas. MAIS j’y suis arrivé.
Happy ending?
Se réinventer pour éprouver son propre système
2020 est une drôle d’année. Je ne vais pas vous faire un dessin, vous savez pertinemment de quoi je veux parler. Comme beaucoup, mes revenus ont été impactés. Heureusement il y a les aides de l’Etat. Mais clairement, ce n’est pas ça qui va régler mon problème sur le long terme. J’ai moins de commandes. Beaucoup moins. Alors comme d’autres, je me suis remis en question.
La créativité c’est la capacité à se réinventer (c’est le thème de l’épisode 24), et comme à cette époque le podcast vivait un vrai “momentum” (10.000 écoutes en Avril et 14.000 en Mai !) je me suis senti pousser des ailes. C’est là qu’il me fallait miser. Si l’illustration avait du plomb dans l’aile, alors le podcast allait tout régler.
Et comme d’hab, je me suis mis à étudier le truc. De fond en comble. J’ai observé comment faisaient les autres podcasteurs. Ceux qui étaient bankable. Ceux qui pèsent dans l’game, et qui gagnent des pépettes. Et tu vas jamais deviner c’que j’ai observé ! Tous sortent un épisode par semaine. Et ils ont des sponsors.
L’équation était vite vue. Pour gagner de l’argent avec le podcast, il faut attirer des sponsors. Et pour attirer des sponsors, il faut plus d’écoutes. Même si le nombre d’écoutes du podcast avait clairement augmenté les derniers mois (ahem… merci le confinement), ma moyenne tournait autour de 5000 écoutes/mois. Mon but était de doubler ce chiffre. 10.000 écoutes par mois, c’est clairement plus sexy.
Gregory Pouy m’avait dit : “A l’heure actuelle en France, on ne fait pas d’abord un podcast pour gagner de l’argent. Au mieux c’est un revenu annexe, et un outil de promotion pour son activité principale.”
Rien à caler ! “TOUT EST POSSIBLE A CELUI QUI CROIT !” J’ai un gosse à nourrir !!!
Alors j’ai retroussé mes manches, et je me suis lancé corps et âmes dans l’aventure. C’est pas l’envie qui me manque, j’ai de bons retours, j’adore ce projet, ça marche, et j’ai une liste grande comme une maison de gens avec qui j’aimerais discuter. Un épisode par semaine ? FINGERS IN ZE NOSE !
Et puis arrive l’épisode 29 (“Trouver son style”, l’épisode le plus écouté !), et sûr de moi j’annonce la nouvelle *** roulements de tambours*** : “TADAAAM ! Je vais passer à un épisode par semaine !”
Les réactions oscillent entre “Waouh trop bien !!” et “Waouh mais... c’est beaucoup de travail non ?!!”. Julia Dufossé du podcast Américain Illustration Hour avait tenté l’aventure avant moi. Elle m’avait prévenu “Oui, toutes les semaines ça devenait trop chaud pour moi. C'est faisable mais c'est beaucoup plus stressant... Je te le conseille pas vraiment.”.
Qui ne tente rien n’a rien, pas vrai ? Alors j’ai ignoré les signaux et j’ai foncé tête baissée. J’ai enchaîné les interviews, les voyages (Paris, Bruxelles, Montpellier bébé !), le travail d’écriture, et tout l’reste ! Sans oublier comme à mon habitude, la réalisation d’une belle illustration pour chaque épisode. On ne rigole pas avec la qualité. Et puis, j’ai interviewé du beau monde : Cruschiform, Guy Delisle, Mai Hua, Andy J Pizza, ... Excusez du peu.
Alors quoi ? La réalité est toujours différente de ce qu’on imagine. Même si on y met beaucoup de bonne volonté. Ce qui s’est passé c’est que mon nombre d’écoutes a augmenté mais il n’a pas doublé. En réalité, même mes auditeurs les plus fidèles me disaient qu’ils avaient du mal à suivre le nouveau rythme. Damned. Ce n’est pas ce que j’espérais. Mais j’ai continué. Toutes les semaines. BAM ! Une nouvelle balle. BAM ! Un nouvel épisode. BAM !
Et est arrivé ce qui devait arriver : j’ai perdu plaisir. A serrer trop fort ce qui m’était précieux, j’ai fini par étouffer la spontanéité qui en faisait sa marque de fabrique. Le podcast était une récréation, il est devenu un travail. J’avais anticipé cet aspect là, mais pas l’arrière-goût qui venait avec.
Et je me suis fatigué. A tel point que j’ai commencé à prêter attention aux signaux que m’envoyait mon corps. J’en parle dans cette interview sur le podcast Syndrôme de l’imposteur, j’ai (involontairement) perdu 16 kg. En deux ans hein, rassurez-vous. Ce ne sont pas ces deux mois à sortir un épisode toutes les semaines qui en sont la cause. Ça, c’est juste la partie visible de l’iceberg. Celui de mon fonctionnement interne. Je me suis rendu compte qu’à trop fonctionner comme une machine (discipliné, efficace), j’ai oublié de m’écouter. Et le corps, difficile de le tromper.
J’ai toujours appliqué ce concept marketing qui consiste à “Donnez, donnez, donnez, donnez, demandez.” Ce concept de générosité a toujours été important pour moi. Mais comme dit la chanson de MewithoutYou (l’un de mes groupes préférés !) “A glass can only spill what it contains”.
Alors quoi ?
C’est la première fois que cela m’arrive. Ce sentiment de vide. Comme si j’avais tout donné, et que je n’avais désormais plus rien à offrir. J’ai commencé à voir les failles de mon fonctionnement interne (dit, elle est joyeuse cette newsletter pas vrai ? :-p). J’en ai même fais un petit post Instagram. La bonne nouvelle, c’est que j’ai commencé à m’écouter.
Je vais un peu charcuter ce que dit Angelo Foley (ép.25 !) (dans cette vidéo) concernant les manifestations extérieures pour nous permettre de mieux comprendre ce qui se passe à l’intérieur. Mais grosso modo, il dit que tant que t’as pas compris quelque chose concernant ton fonctionnement interne, alors ce “quelque chose” se manifestera d’une manière ou d’une autre dans ta vie. Et tant que t’as pas compris un schéma répétitif dans une relation au travail, alors c’est dans ton couple que “cela” va se manifester. Ou à travers tes enfants. Et si t’as toujours pas compris, alors c’est à ce moment là que le corps va prendre le dessus. Histoire de bien te faire piger. Et c’est à ce moment là que certaines maladies peuvent aussi se manifester.
Mmmmmm. Je n’en suis pas là. Mais malgré tout ça m’a fait cogiter. Quand même. 16kg sans perte d’appétit ni réel souci médical (j’ai vérifié) c’est à surveiller.
Et c’est une discussion avec Clod qui m’a remis les yeux devant les trous. Au téléphone, je lui disais “Tu sais, c’est une raison purement économique qui m’a poussé à passer à un épisode par semaine. S’il n’y avait pas cette équation économique, je serais resté à un épisode toutes les deux semaines” Rien que de m’entendre, cela me faisait grincer des dents. Et si je le faisais pour l’argent (ce qui n’est pas interdit), c’est un revenu que je ne gagnais pas vu que de sponsor il n’y avait toujours pas. Quelque chose clochait. Et même si ma stratégie long-terme n’était pas forcément mauvaise, y laisser ma santé n’est peut être pas la meilleure des idées.
J’ai conscience qu’on ne peut changer du jour au lendemain. Que tout prend du temps. Peut-être que ce fonctionnement interne sera toujours le mien. Et la clé réside probablement dans le fait de m’accepter tel que je suis. En.Arrêtant.De.Constamment.Lutter.Contre.Moi-même (punaise ça fait du bien rien que d’le dire!). M’écouter ne devrait pas m’empêcher d’entreprendre. Entreprendre en conscience, voilà une alternative.
Alors peut-être que j’en fais un trop gros truc. Peut-être que je grossi le trait. Peut-être aussi que je n’ai pas donné le temps nécessaire à ce nouveau rythme pour porter ses fruits. Peut-être. Mais je préfère écouter les signaux.
Je suis revenu à un épisode toutes les deux semaines. C’est un rythme qui me convient parfaitement. Suffisamment challengeant pour garder la flamme, et suffisamment flexible pour ne pas m’épuiser. Entreprendre c’est bien, mais entreprendre en s’écoutant c’est mieux.
Tout ça pour ça ! Ouai ouai.
Jérémie
P.S. Entre le moment où j'ai écris cet article et le moment où je l'ai publié, il s'est au moins passé 6 semaines. Ironiquement, c'est m'écoutant et en lâchant prise que paradoxalement, mon nombre d'écoute a doublé. Comme prévu, depuis septembre, je suis revenu à un épisode toutes les deux semaines... et depuis le podcast carbure a plus ou moins 10.000 écoutes/mois. Comme quoi... S'écouter, et faire les choses par envie et non par contrainte. Peut être est-ce une clé ?
🎙 Founder Studio Storia | Podcast Producer & Formatrice | Podcaster | Donnez une voix à votre personal branding avec un podcast professionnel et engageant, je vous aide à le créer et le développer.
4 ansSuper intéressant ton article Jérémie ! Je te rejoins sur beaucoup de choses, notamment les signes du corps, l'écoute de soi-même est tellement importante. Tu as eu raison de tenter le coup d'un épisode par semaine et tu as raison de revenir en arrière si ça t'épuise ! Faire les choses par envie et non pas par contrainte, serait-ce la clé de la réussite ? (je n'ai pas la réponse 😅)
🎙Production de podcast avec + 400 épisodes réalisés sur Esperluette et en marque blanche & accompagnement individuel à la création de podcast | ✍ Conseil en communication & Rédaction de contenu |📍Vaucluse (84)
4 ansComplètement d'accord avec Marine Aubonnet : créer son podcast c'est aussi se sentir libre de le faire évoluer tout en gardant l'énergie qui nous anime et le plaisir d'y produire du contenu. Pour Esperluette Podcast je suis passée du mensuel, à l'hebdo puis j'ai ressenti le besoin de moins avoir la pression pour réaliser les épisodes alors 1 fois par mois (et bientôt 2×/mois) je laisse la place à une autre chroniqueuse pour qu'elle développe son format (en gardant un lien avec ma ligne editoriale). Je gère le montage et la diffusion. Ca me libère pas mal de temps et ça crée une nouvelle dynamique sur le podcast , que du positif !
J’aide les freelances de la com et du marketing à se structurer (en +, on rigole bien!) | 🎧 Des stratégies décortiquées tous les mercredis
4 ansL'avantage d'être seul-e aux commandes, c'est qu'on peut faire ce qu'on veut. En 3 ans de La Cohorte, j'ai changé plusieurs fois de rythme de publication. C'est notamment grâce à ça que je suis toujours aussi motivée (voire plus) qu'au lancement du podcast.