Quelles conséquences fiscales découlent du nouveau traitement comptable du mali technique de fusion ?

Quelles conséquences fiscales découlent du nouveau traitement comptable du mali technique de fusion ?

Le règlement ANC n°2015-06 du 23 novembre 2015 modifie les règles comptables applicables au mali technique de fusion pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016.

Quelles sont ces règles, et quel sera leur impact sur le traitement fiscal associé ?

1. Le mali technique doit désormais être ventilé au bilan de la société absorbante

Jusqu’à la date d’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions, le mali technique était inscrit à l’actif de la société absorbante, en immobilisations incorporelles, dans un sous-compte 207 « Fonds commercial ». Il n’était réparti entre les différents actifs auxquels il se rattachait que dans les annexes.

Désormais, l’article 745-5 modifié du PCG oblige les entreprises concernées à affecter le mali technique au bilan de la société absorbante, en le comptabilisant dans des sous-comptes spécifiques par catégorie d’actifs apportés identifiables auxquels il peut être rattaché. Seul le solde devra toujours venir augmenter le poste « Fonds commercial ».

En conséquence, la quote-part de mali technique affectée à des actifs amortissables peut maintenant elle-même être dépréciée sous forme d’amortissements, suivant en cela le régime de l’actif auquel elle se rapporte. En revanche, la quote-part affectée à des actifs non amortissables ne peut être dépréciée que sous forme de provisions, en fonction du résultat des tests de dépréciation à mener.

2. Ce nouveau traitement comptable complique le suivi des mali de fusion pour les opérations placées en régime de faveur

Lorsque la fusion est placée sous le régime de faveur de l’article 210 A du Code Général des Impôts, le traitement fiscal du mali de fusion ne change pas : sa ventilation entre différentes catégories d’actifs au bilan de la société absorbante, y compris des actifs amortissables, ne l’empêche pas de rester non déductible d’un point de vue fiscal.

Ce principe, qui peut sembler strict et instaure une déconnection entre traitement comptable et régime fiscal, est en réalité logique, car la non-déductibilité n’est alors que la contrepartie de la non-imposition immédiate des plus-values latentes existant chez la société absorbée au moment de l’opération.

En pratique, cela amènera donc les entreprises concernées à réintégrer, pour la détermination de leur résultat fiscal au titre de l’exercice considéré, la quote-part des dotations aux amortissements, et éventuellement aux provisions, se rapportant à la dépréciation du mali technique affecté aux immobilisations ainsi dépréciées.

Une attention particulière doit donc être portée au suivi de la quote-part de dépréciations, que ce soit sous forme d’amortissements ou de provisions, afférentes à des mali techniques antérieurs. Or, un tel suivi peut être malaisé s’il n’est pas correctement mis en œuvre, et ce dès l’ouverture de l’exercice 2016, dès lors que les sociétés absorbantes n’ont plus l’obligation d’établir un état de suivi des mali techniques, auparavant prévu à l’article 54 septies du Code Général des Impôts.

3. Ce nouveau traitement comptable rend parfois possible la déduction de tout ou partie du mali de fusion sur le plan fiscal, lorsque l’opération est placée en régime de droit commun

Le régime de droit commun implique que les plus-values latentes sur les actifs apportés à l’occasion de la fusion soient immédiatement imposées chez la société absorbée. Cela peut avoir un intérêt, notamment si cette dernière dispose de reports déficitaires significatifs et qu’elle n’est pas certaine de pouvoir obtenir l’agrément pour les transférer à la société absorbante.

Mais cet intérêt n’existe réellement que si la dépréciation ultérieure des actifs ainsi réévalués, que ce soit sous forme d’amortissements ou de provisions, ouvre droit à déduction.

C’est encore plus vrai si tout ou partie de cette dépréciation concerne le mali de fusion constaté lors de l’opération : jusqu’à présent, un tel mali était forcément comptabilisé en « fonds de commerce »[1], et sa dépréciation était donc non déductible par nature[2] ; désormais, ce même mali est affecté entre les différents actifs apportés, suit le régime comptable et fiscal de chaque classe d’actifs sous-jacents en termes de dépréciation, et deviendra donc déductible au fil du temps dans certains cas[3] dès lors que les plus-values latentes dégagées sur ces mêmes actifs lors de la fusion auront été imposées à cette occasion.

Le nouvel article 745-5 du PCG peut donc constituer une avancée sensible en matière de déductibilité des mali de fusion issus d’opérations placées en régime de droit commun. Mais ce n’est toutefois pas la panacée, car dans les faits il sera souvent affecté au fonds de commerce, aux titres de participation ou aux immeubles, c’est-à-dire à des actifs dont la dépréciation ne donne pas lieu à constatation de charges déductibles, sauf sur de longues périodes concernant ces derniers. Ces nouvelles dispositions introduisent également une complexité administrative supplémentaire, car elles nécessitent un suivi spécifique pour être en mesure de réintégrer correctement les charges non déductibles issues de la dépréciation de mali technique provenant d’opérations placées en régime de faveur.

A noter également que le régime ainsi institué aura un impact sur les capitaux propres de la société absorbante, et donc sur ses capacités ultérieures de distribution qu’il diminuera à concurrence des amortissements et provisions supplémentaires à comptabiliser. Il pourra faire varier également la participation des salariés, qu’il permettra normalement de réduire en cas de dépréciation déductible de tout ou partie du mali.

Enfin, nous attirons votre attention sur le fait que l’entrée en vigueur de ce nouveau règlement nécessitera d’affecter comptablement les mali techniques existant au 1er janvier 2016 et provenant d’opérations de fusion antérieures. Ils ne seront alors dépréciés qu’à compter du 1er janvier 2016, sans que l’entreprise concernée ait à reconstituer leur historique d’amortissement, le cas échéant.

[1] A moins d’être constaté directement en charges dans des cas bien particuliers.

[2] Sauf dans des circonstances très spécifiques et rarement réunies.

[3] Notamment s’il est rattaché à des immeubles, à des brevets ou à des logiciels.

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