Réduire les inégalités : repenser l'éducation au service de tous
Le système éducatif français, autrefois considéré comme un modèle d'excellence républicaine, révèle aujourd'hui une tendance inquiétante : au lieu de corriger les inégalités sociales, il semble les creuser davantage. Les évaluations internationales, à l'image du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA), confirment non seulement une érosion des compétences de base chez les élèves français, mais également une accentuation des écarts entre les plus favorisés et les plus vulnérables. Loin d'être un vecteur d'ascension sociale, notre école reproduit et amplifie les disparités socio-économiques, compromettant par conséquent les chances de réussite des élèves issus de milieux défavorisés.
Dans ce contexte, il est urgent de repenser notre modèle éducatif en s’inspirant des systèmes européens les plus louables. Ceux qui ont su conjuguer excellence académique et équité. La première note du dossier Les Voies , dédié à l’éducation, tend notamment à analyser le modèle finlandais pour identifier les stratégies qui ont permis à ce pays de se hisser parmi les mieux classés dans le monde et dégager des pistes concrètes de réflexion pour que l’école redevienne un véritable vecteur de justice sociale et de réussite pour tous en France.
L’éducation pour tous
L’éducation est un droit fondamental, une promesse faite à chaque enfant dans le monde et gravée dans l’article 26 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948(1) : « toute personne a droit à l’éducation ». Si cet engagement reste inachevé pour des millions d’enfants souvent pris au piège des crises économiques, des conflits ou de la pauvreté, la Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous sonnait comme un rappel urgent de cette mission imparfaite, à savoir offrir à chaque enfant les outils nécessaires pour comprendre et transformer le monde.
Car l’éducation n’est pas seulement un vecteur de savoirs, elle est le socle sur lequel repose l’avenir des sociétés. C’est elle qui forge les compétences fondamentales, celles qui ouvrent les premières portes, savoir lire, écrire, compter. Mais l’éducation va bien au-delà de ces premiers pas. Elle est le moteur qui aiguise la pensée critique, qui enseigne à coopérer, à résoudre des problèmes complexes, à imaginer des solutions nouvelles. C’est à travers elle que chaque enfant devient progressivement un citoyen capable de participer activement à la vie de la cité, de s’y intégrer, puis d’en être un acteur éclairé et responsable.
Aujourd’hui, l’éducation doit répondre à une double exigence : élever le niveau général de toute une société et réduire les inégalités. Une éducation qui ne profite qu’à certains est une éducation qui passe à côté de sa mission première. Plus que jamais, il faut tendre la main aux plus fragiles, à ceux dont le potentiel reste enfoui, faute d’opportunités et d'accompagnement. La Déclaration des droits de l’homme et la Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous nous expliquent que c’est grâce à une éducation véritablement universelle que nous pourrons espérer bâtir des sociétés plus justes, capables d’affronter les défis environnementaux, économiques et sociaux qui se profilent.
Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous : Répondre aux besoins éducatifs fondamentaux(2).
Article I – Répondre aux besoins éducatifs fondamentaux
1. Toute personne - enfant, adolescent ou adulte - doit pouvoir bénéficier d’une formation conçue pour répondre à ses besoins éducatifs fondamentaux. Ces besoins concernent aussi bien les outils d’apprentissage essentiels (lecture, écriture, expression orale, calcul, résolution de problèmes) que les contenus éducatifs fondamentaux (connaissances, aptitudes, valeurs, attitudes) dont l’être humain a besoin pour survivre, pour développer toutes ses facultés, pour vivre et travailler dans la dignité, pour participer pleinement au développement, pour améliorer la qualité de son existence, pour prendre des décisions éclairées et pour continuer à apprendre. Le champ des besoins éducatifs fondamentaux et la manière dont il convient d’y répondre varient selon les pays et les cultures et évoluent inévitablement au fil du temps
2. En pourvoyant à ces besoins, on confère aux membres de toute société la capacité - ainsi que la responsabilité correspondante - de respecter et faire fructifier leur patrimoine culturel, linguistique et spirituel commun, de promouvoir l’éducation d’autrui, de défendre la cause de la justice sociale, de protéger l’environnement, de se montrer tolérants envers les systèmes sociaux, politiques ou religieux différents du leur, en veillant à ce que les valeurs humanistes communément admises et les droits de l’homme soient sauvegardés, et d’œuvrer pour la paix et la solidarité internationales dans un monde caractérisé par l’interdépendance.
3. Un autre but, non moins fondamental, du développement de l’éducation est la transmission et l’enrichissement des valeurs culturelles et morales communes. C’est en elles que l’individu et la société trouvent leur identité et leur valeur.
Et la France dans tout cela ?
L’histoire de l’éducation en France est un exemple assez éloquent de la façon dont le droit à l’éducation a été consacré et renforcé au fil des siècles, plaçant in fine l’égalité des chances au cœur du projet républicain.
Devoir d’histoire. Le droit à l’éducation s’est construit progressivement, depuis la Révolution française, qui pose les premiers jalons de l’instruction publique, jusqu’à son inscription explicite dans le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946(3), affirmant que « l’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État ». Ce principe découle des lois Jules Ferry, votées en 1881(4) et 1882(5), qui ont rendu l’instruction primaire gratuite, obligatoire et laïque. Lois qui avaient entériné un mouvement de scolarisation de masse déjà entamé et avaient surtout permis la scolarisation des écolières et des enfants vivant dans les campagnes. Ce fut une transformation massive pour la société française de l’époque.
Mais l’effort ne s’est pas arrêté là. Tout au long du 20ème siècle, la France a continué de renforcer ce droit à l’éducation à travers des réformes : l’allongement de la scolarité obligatoire à 16 ans en 1959, la création du collège unique en 1975 - garantissant à tous les élèves une formation commune jusqu’à la fin du secondaire, la loi de 2019 pour une « école de la confiance » ayant introduit l’instruction obligatoire dès 3 ans.
Ces étapes successives montrent une volonté continue d’adapter le système éducatif aux enjeux de chaque époque, en élargissant sans cesse l’accès à l’éducation pour en faire un véritable vecteur d’émancipation individuelle et collective. Loin d’être figé dans une tradition, le droit à l’éducation en France a toujours été conçu comme un levier pour répondre aux défis de son temps, tout en restant fidèle à ses valeurs fondatrices de justice et d’égalité. Et pourtant… lorsque nous évaluons les systèmes éducatifs à travers l’Europe, la France n’est pas au rendez-vous.
L'évaluation des systèmes éducatifs
L'efficacité des systèmes éducatifs ne se résume plus à la simple transmission de connaissances. Elle s'inscrit désormais dans une logique plus large, visant à répondre aux besoins et attentes des élèves, des sociétés et du monde du travail. En 1990, la Déclaration mondiale sur l’Éducation pour tous, adoptée à Jomtien sous l’égide de l’UNESCO(6), insistait sur l’importance d’une éducation pertinente, capable d’équiper chaque individu avec des compétences, des connaissances, des valeurs et des attitudes adaptées à sa vie future. Cette perspective a marqué un tournant, redéfinissant les objectifs de nombreux systèmes éducatifs, et ouvrant la voie à une vision qualitative fondée sur les besoins réels.
La qualité des systèmes éducatifs demeure toutefois une exigence fondamentale de nos sociétés contemporaines compliquée à évaluer. C’est un concept multidimensionnel, qui ne se laisse pas aisément quantifier et qui doit prendre en compte de nombreuses facettes. Diverses évaluations existent, à l’instar de l’indice de développement humain de l’ONU, la compétitivité économique du Forum de Davos, ou encore le bien-être du programme « Vivre mieux » de l’OCDE.
Nous constatons pourtant que l'efficacité et la qualité des systèmes éducatifs sont principalement mesurées à travers les performances des élèves dans des tests standardisés comme PIRLS, TIMSS et PISA. Ces évaluations, bien que largement utilisées, ne reflètent qu’une partie de la réalité : elles se concentrent sur le niveau de connaissances et de compétences des élèves testés, sans véritablement mesurer la qualité des systèmes éducatifs dans leur ensemble.
Notons que pour mesurer la qualité d’un système éducatif, il faudrait disposer d’informations sur des facteurs multiples(7), à savoir, les moyens économiques, financiers, humains mis en place par les Etats, mais aussi la qualité de la formations des enseignants, leur niveau d’engagement, leurs salaires, le soutien des élèves par leurs parents dans le cadre des devoirs à la maison, la qualité pédagogique des programmes, les rythmes scolaires, les pourcentages de réussite scolaire. A défaut, l’écart entre les résultats et la réalité tangible du terrain est parfois considérable en fonction du choix et de la pondération des critères de chaque méthode d’évaluation de la performance des systèmes éducatifs, relevant in fine d’une certaine subjectivité plus ou moins inhérente à toute évaluation.
Quoi qu’il en soit, la performance d’un système éducatif sera pleinement comprise en tenant compte de ses dimensions sociales, économiques et humaines. Comme nous l’écrivons plus haut, un système efficace est celui qui permet à tous les élèves d’apprendre, tout en réduisant les écarts de réussite et qui utilise ses ressources de manière judicieuse. La clé réside dans l’équilibre entre équité et efficience, tout en créant un environnement où élèves et enseignants sont pleinement engagés. La qualité n’est pas figée dans une norme rigide, mais évolue en fonction des besoins de chaque génération. Cela permet d'orienter les politiques éducatives vers des améliorations continues, en prenant en compte les forces et faiblesses de chaque pays.
PISA, encore et toujours PISA
Le Programme International pour le Suivi des Acquis(8) des élèves est devenu une référence internationale pour évaluer la "performance" des systèmes éducatifs. Créé sous l’égide de l'OCDE dans les années 1990, il impose une norme mondiale d’évaluation des systèmes éducatifs tous les trois ans. PISA mesure la capacité des élèves de 15 ans à mobiliser leurs compétences en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en sciences, dans des situations concrètes de la vie quotidienne. L’objectif de cette évaluation consiste à comparer les performances scolaires des jeunes à l’échelle mondiale et autrement dit, d’en tirer des enseignements sur la qualité des systèmes éducatifs.
Les caractéristiques de l’évaluation PISA : un éloignement des programmes scolaires pour évaluer les compétences générales des élèves âgés de quinze ans ; une limitation à trois enseignements fondamentaux (langue maternelle, mathématiques, sciences) afin de faciliter les comparaisons ; des résultats compréhensibles pour les autorités comme pour le grand public.
L'édition de 2022, finalement publiée en 2023 pour cause de perturbations liées à la pandémie de Covid-19, a mis en lumière plusieurs tendances, notamment une baisse généralisée des résultats dans de nombreux pays, y compris en France(9).
Le cas de la France : l’impact persistant des inégalités sociales
La France se situe régulièrement dans la moyenne des pays de l’OCDE, mais ses résultats révèlent une stagnation voire un recul dans certaines matières, notamment, et vous le savez déjà, en mathématiques. Lors de la dernière enquête PISA 2022, les élèves français ont obtenu un score de 474 en mathématiques, en dessous de la moyenne OCDE de 489, une baisse significative de 21 points par rapport à l’enquête PISA 2018. En compréhension de l’écrit, le score de la France s’élève à 474, tout juste au niveau de la moyenne OCDE, mais avec une perte notable de 19 points par rapport à l’enquête précédente. Les résultats en sciences sont légèrement plus réjouissants avec un score de 487, supérieur à la moyenne OCDE de 485.
L’école française se divise en deux catégories, celle des bons élèves dont la proportion est stable et supérieure à la moyenne des pays de l’OCDE et la seconde catégorie, celle des élèves en difficulté toujours plus nombreux et supérieurs à la moyenne de l’OCDE. Cependant, ce qui inquiète le plus les observateurs n'est pas tant la baisse générale des scores, mais l'impact particulièrement marqué du milieu socio-économique des élèves français sur leurs résultats scolaires. En France, près de 20 % des résultats des élèves dépendent de leur origine sociale, un chiffre supérieur à la moyenne OCDE de 13 %. Cette inégalité persistante reflète une tendance : l’école française peine à corriger les écarts initiaux, surtout chez les élèves issus de milieux défavorisés et/ou issus de l’immigration. Cette corrélation entre milieu socio-économique et réussite scolaire est un des points faibles récurrents du système éducatif français(10) souligné dans chaque édition des enquêtes PISA.
Les élèves issus de l'immigration en France continuent de subir un handicap important en termes de performances scolaires. Bien que dans d'autres pays, comme le Canada ou le Royaume-Uni, ces élèves réussissent aussi bien, voire mieux que leurs pairs après ajustement des critères socio-économiques, en France, ils enregistrent un écart de neuf points en mathématiques, contre cinq en moyenne au sein de l’OCDE.
Aujourd’hui, l’enquête PISA regroupe 81 pays et territoires et ses résultats sont internationalement suivis, commentés, analysés et vont jusqu’à influencer de nombreuses politiques éducatives. La publication des résultats de la dernière étude PISA a par exemple poussé le ministre de l'Éducation de l’époque, Gabriel Attal, à annoncer une série de réformes pour renforcer l'enseignement des mathématiques et du français à l’école(11).
L’évaluation PISA révèle la nécessité d’une réflexion plus profonde sur l'équité du système éducatif français et sur la manière de favoriser la réussite des élèves issus de milieux défavorisés. Si la France affiche des résultats globalement dans la moyenne de l’OCDE, son véritable défi reste la lutte contre les inégalités.
Rien ne sert de copier, mais les résultats de certains de nos voisins européens dans les classements internationaux des systèmes éducatifs ont attiré toute notre attention. C’est notamment le cas de la Finlande sur lequel nous nous penchons.
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Finlande, quand l’éducation est synonyme d’excellence
La Finlande se hisse systématiquement parmi les pays les mieux notés dans les classements internationaux des systèmes éducatifs, son système étant parfois même associé à ce que l’on appelle l’excellence. Quelles en sont les raisons ?
Lorsque la Finlande amorce sa transformation économique à la fin du 20ème siècle, elle doit faire face à des défis structurels profonds. Jusqu’alors, l’économie du pays reposait essentiellement sur des industries traditionnelles telles que la production de papier et de caoutchouc, secteurs en déclin face aux mutations de l’économie mondialisée. La crise bancaire du début des années 1990 précipita ensuite la Finlande dans une récession sévère, avec un chômage atteignant un taux de près de 20 % et une contraction importante du PIB(12). Cette situation critique imposa une révision des fondements même du modèle économique finlandais.
Plutôt que de tenter de prolonger artificiellement la survie des industries en déclin, les autorités publiques finlandaises prirent alors une décision stratégique : se tourner vers l’avenir. Cette réorientation ne pouvait se réaliser sans un investissement massif dans le capital humain, perçu comme la clef de voûte d’une transition vers une économie fondée sur la connaissance et l’innovation. L’éducation devint ainsi un levier essentiel non seulement pour relancer l’économie mais aussi pour la restructurer en profondeur.
La refonte du système éducatif, amorcée dès les années 70 avec la mise en place d’un enseignement non sélectif et la professionnalisation des enseignants(13), a trouvé une nouvelle légitimité dans ce contexte. Il ne s’agissait plus simplement d’améliorer les acquis scolaires, mais de faire de l’éducation un pilier stratégique de la compétitivité nationale. Le passage d’une économie rurale à une économie technologique, notamment avec l'essor du secteur des télécommunications et de la technologie, s'est fait en parallèle avec cette évolution éducative. Il ne fait aucun doute que sans cette capacité à anticiper et à former des générations d’étudiants dotés des compétences requises pour répondre aux nouveaux besoins du marché mondial, la Finlande n’aurait pas pu s’imposer comme l’une des économies les plus compétitives du début du 21ème siècle.
C’est cette articulation étroite entre stratégie économique et ambition éducative qui a permis à la Finlande de se distinguer de ses voisins, en alliant qualité et équité éducative. Dès l'an 2000, la Finlande s'est ainsi imposée en tête du classement PISA, surpassant 32 autres pays, et depuis, elle maintient régulièrement sa place sur le podium. Le pays affiche une faible disparité de performances entre élèves, un taux minimal d'élèves en difficulté, et une homogénéité impressionnante des résultats d'un établissement à l'autre.
Cette réussite repose en grande partie sur la revalorisation profonde de la profession enseignante mentionnée ci-dessus. La formation des enseignants, rendue plus sélective, est devenue un pilier du système éducatif finlandais. Aujourd'hui, ces derniers jouissent d'une réputation d'experts hautement qualifiés, investis dans leur mission et proches de leurs élèves. Dans un pays où l'ascension sociale est intimement liée à l'éducation, le métier d'enseignant incarne une réussite sociale prestigieuse. La rigueur de la formation, pouvant durer jusqu’à sept ans et incluant de nombreux stages, confère aux enseignants une légitimité inébranlable.
Il faut noter que le recrutement des enseignants a été décentralisé à partir de 1990 et confié aux municipalités ou aux établissements scolaires et que les conditions de travail en Finlande sont particulièrement favorables : espaces de travail individuels, ressources pédagogiques abondantes, repas gratuits, et surtout, une liberté pédagogique totale, fondée sur la confiance en leur expertise disciplinaire et didactique. Cette autonomie est d’ailleurs illustrée par une absence d’inspection.
Un autre aspect distinctif du modèle finlandais réside dans le faible taux de redoublement des élèves, inférieur à 2 % à l’issue de l’enseignement obligatoire. Ce succès s’explique par un accompagnement personnalisé des élèves, dès les premières difficultés identifiées. La coopération entre les niveaux primaire et secondaire au sein de structures unifiées permet de mettre rapidement en place des dispositifs de remédiation adaptés. Ce soutien, souvent collectif ou individualisé, garantit à près de 22 % des élèves de bénéficier d’une aide spécialisée à un moment de leur parcours, sans stigmatisation ni rupture.
Le système scolaire finlandais valorise également la confiance et la maturité des élèves. L’obligation scolaire ne commence qu’à 7 ans, laissant place avant cela à une approche ludique en maternelle. Les cours sont réduits à 45 minutes, adaptés à la capacité de concentration des élèves, et entrecoupés de pauses de 15 minutes. L’évaluation, loin d’être anxiogène, repose sur des notes allant de 4 à 10, sans échec manifeste, et se concentre sur les acquisitions plutôt que sur les lacunes, ce qui contribue à renforcer l’estime de soi des élèves(14).
L’estime de soi joue un rôle fondamental dans le processus de réussite scolaire et personnelle. Dans les pays anglo-saxons par exemple, on observe une pédagogie qui valorise la progression individuelle, l'encouragement constant et la reconnaissance des talents spécifiques de chaque élève. La réussite est vue comme un cheminement individuel, où l’élève est accompagné à transformer ses échecs en opportunités d’apprentissage. Quand en France, le modèle éducatif reste largement centré sur la correction des erreurs et une évaluation comparative rigide, souvent perçue comme punitive. Restaurer cette estime de soi est essentiel pour permettre aux enfants de se projeter avec assurance dans le futur, sans être constamment paralysés par la peur de l’échec.
Enfin, la prééminence de l’école publique, qui représente 97 % des établissements, contribue largement à l’équité du système éducatif finlandais. Contrairement à d'autres pays, dont la France, où le privé capte une proportion significative des élèves, 17,6% en 2022, soit 2 millions d’élèves(15). Les écoles finlandaises se distinguent par leur faible disparité de performances entre établissements, seuls 5 % des écarts de résultats entre élèves peuvent être attribués aux différences entre les écoles. L’homogénéité du système repose sur un principe central : toutes les écoles sont d’élite, et aucun élève ne doit être laissé pour compte.
Réveiller l’école de la réussite
A première vue, la Finlande a su s'élever en modèle pour les pays d’Europe. Ce succès repose, comme nous l’avons vu, sur une approche centrée sur l’élève, visant à l’épanouissement intellectuel de chaque individu. Il ne s'agit pas seulement d'exceller dans les évaluations, mais de forger des citoyens capables de penser de manière critique et d'innover dans un monde en perpétuelle mutation. Cette vision holistique de l’éducation, loin des carcans académiques conservateurs, interpelle les systèmes éducatifs plus traditionnels, souvent trop focalisés sur la performance quantitative.
Si l'on transpose ce modèle à nos propres défis, il apparaît nécessaire que la France investisse dans le personnel éducatif, perçu comme un pilier de la réussite. Chaque enseignant est considéré non seulement comme un transmetteur de savoir, mais également comme un guide capable d’adapter son approche aux besoins spécifiques de chaque élève.
Une autre piste serait de réévaluer le poids accordé aux évaluations standardisées. Si elles offrent une photographie instantanée du niveau global, elles ne permettent pas de capturer la diversité des talents ni les compétences transversales, essentielles dans un monde où la créativité et la pensée critique priment. En Finlande, les tests nationaux sont rares, laissant la place à des méthodes d’évaluation plus qualitatives, qui privilégient l’apprentissage en profondeur.
L'éducation pour tous ne peut se contenter d'être un slogan. La Finlande prouve qu'il est possible de concilier excellence académique et justice sociale grâce à une vision claire et cohérente, une volonté politique inébranlable, et un engagement à bâtir une société inclusive où chaque citoyen trouve sa place. En s'inspirant de cette expérience, tout en adaptant les mesures à notre contexte spécifique, la France pourrait à nouveau se positionner comme un leader dans l'éducation, non pas en accumulant des réformes mineures multiples, mais en misant sur une transformation structurelle profonde.
Un engagement sincère en faveur de l'égalité des chances, associé à une vision pragmatique de l'avenir, pourrait faire de l'éducation le levier d'une France plus équitable, dynamique et résiliente, en phase avec les transformations de notre société. Nous appelons le gouvernement Barnier et la nouvelle ministre de l'Éducation Anne Genetet à dessiner un avenir dans lequel l’école redevient le cœur battant de la société !
Amandine ROGEON, Présidente du mouvement Les Voies
Président chez Voxa | Affaires publiques | Lobbying for Good 🌱 #RSE #Politique #Engagement
2 moisSuper boulot, Amandine ! Ta note éclaire le débat sur l'éducation et la question de l'égalité des chances. Hâte de voir l'impact de ces propositions.
Head of Public Affairs & Economic Diplomacy chez Samsung France
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