SCPP Les 5 chiffres de Pascal Nègre
En cinq chiffres ou données encore provisoires, la Société collective des producteurs phonographiques (SCPP), qui regroupe les 3 majors du marché mais également une kyrielle de producteurs indépendants, a dévoilé les premières tendances du secteur en 2015. Verdict : stabilité des sommes perçues au titre des droits voisins et montée en puissance du streaming (ou écoute à la demande) qui se confirme.
3 millions. C’est, selon le président de la SCPP et patron d’Universal dans l’hexagone Pascal Nègre, le nombre de Français abonnés aux offres payantes de streaming de Deezer, Spotify ou Napster. Soit 5% de la population avec une hausse de 65% l’an dernier. «A partir du seuil de 5% de la population française, on devient un produit de grande consommation, estime le patron d’Universal, qui parie sur un effet boule de neige dans les prochaines années. On peut très bien à terme arriver à 10 à 12 millions d’abonnés payants», rêve-t-il à voix haute, en précisant que 1000 «streams» génèrent le même revenu que la vente d’un album. Produit par Universal, le rappeur Nekfeu a «généré en streaming l’équivalent de la vente de 200 000 albums contre plus de 100 000 vendus», a expliqué Pascal Nègre. Eternel optimiste, ce dernier pronostique un retour à la croissance du secteur de la musique à l’horizon 2018.
78,5 millions d’euros. C’est le total des perceptions qu’a touché la SCPP en 2015, un résultat «satisfaisant» selon Pascal Nègre. En 2014, la SCPP avait encaissé 78,2 millions d’euros, soit un montant de droits équivalent. Cette stabilité des revenus issus des «droits voisins» perçus par les producteurs de musique illustre leur capacité de résistance alors que le secteur dans son ensemble devrait connaître une nouvelle érosion de son activité l’an dernier, notamment à cause de la baisse des ventes qui a suivi les attentats de novembre. «On rentre à cette période dans six semaines clés pour l’industrie musicale et, en raison de ces événements, l’activité n’a pas été au rendez-vous, a encore expliqué Pascal Nègre. Ce qui est perdu à cette période capitale de l’année ne peut pas être rattrapé après».
+19%. C’est la hausse de la rémunération perçue par la SCPP pour copie privée sur les ventes d’ordinateurs, disques durs, clés USB, mobiles et tablettes, etc. Cette exception au droit d’auteur consiste à percevoir une taxe relativement importante sur la vente de tous les supports multimédias susceptibles de stocker des données en échange de la liberté pour leurs utilisateurs de copier pour leur usage personnel et privé des «œuvres de l’esprit». Contestée par les fabricants d’électronique grand public, étendue à une gamme toujours plus importante d’appareils, la copie privée est appliquée dans toute l’Europe à l’exception de quelques Etats comme l’Angleterre, l’Irlande ou encore le Luxembourg. Elle est devenue au fil des années une source de revenus conséquente pour le monde de la culture. Si certains fabricants récalcitrants comme Apple sont en train de régulariser des arriérés de paiement non perçus par la SCPP et les auteurs, «130 millions d’euros sont encore dans la nature», explique Marc Guez, le directeur général gérant de la SCPP, qui ne désespère pas de les récupérer.
-5%. C’est la baisse des perceptions captées au titre de la diffusion des clips vidéo qui s’explique notamment par le recul de ces programmes dans les médias et la fermeture d’antennes spécialisées dans ce type de contenus. A la différence de la télévision, les revenus perçus sur les vidéos diffusées sur Youtube ou les autres plateformes en ligne sont prélevés directement par les maisons de disques qui signent généralement des deals mondiaux avec elles. C’est la différence entre la gestion collective des droits confiée à des sociétés d’auteurs ou de producteurs et le «droit d’autoriser» qui relève de chaque producteur. Un système très complexe connu des seuls initiés.
-9%. C’est la baisse des revenus tirés de la rémunération équitable qui correspond notamment à la licence légale accordée aux radios et webradios pour la diffusion musicale sur leurs antennes. Ces dernières doivent verser un pourcentage de leurs chiffres d’affaires aux sociétés de producteurs (2,25% pour les radios, 11,25% pour les webradios), autrement dit un prélèvement sur leurs recettes publicitaires en échange de la diffusion de musique. La SCPP souhaite renégocier à la hausse leur barême: «Vous trouvez normal que NRJ ne reverse que 3% de son chiffre d’affaires pour la diffusion de musique?», interroge Pascal Nègre. Mais l’Etat refuse dans l’immédiat de convoquer la commission auquel il participe et qu’il préside pour statuer sur ce sujet. D’après la SCPP, «l’Etat craint de devoir payer plus de rémunération équitable pour les antennes publiques de radio». Pas de déblocage en vue avant la prochaine élection présidentielle.