Semaine du handicap : rencontre avec Raphaël Sanchez, contrôleur images à la Direction régionale de l'ASP Occitanie

A l’occasion de la semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées, Raphaël Sanchez, contrôleur images à Montpellier, nous livre son histoire et son regard sur le handicap. Un témoignage inspirant.

Pouvez-vous nous raconter votre histoire ?

Je suis devenu sourd à l’âge de 6 mois. On peut donc considérer que je suis né sourd. Jusqu’à l’âge de 12 ans, j’ai porté des appareils auditifs pour compenser ma surdité. Je me suis ensuite fait opérer et poser des implants cochléaires. Ce dispositif me permet de percevoir les bruits environnants. Pour autant, je ne parviens pas à saisir distinctement les paroles des gens qui s’adressent à moi. Je lis donc sur les lèvres. Aussi, l’idéal est que mes interlocuteurs soient bien en face de moi pour faciliter la lecture labiale.

L’exercice peut vite se compliquer quand je suis au milieu d’un groupe de personnes « non signantes » qui s’expriment toutes en même temps. Impossible alors pour moi de suivre la discussion. De même, je suis en difficulté si mon interlocuteur utilise des mots ou expressions trop soutenus. Je manque un peu de vocabulaire à l’oral et ne saisis pas forcément les expressions « d’entendant ». Je suis plus à l’aise avec la langue des signes française qui a sa propre syntaxe et ses expressions.

Comment s’est passée votre intégration à l’ASP ?

Je ne connaissais pas l’ASP. Mais, à la lecture de l’offre d’emploi, je me suis dit que ce poste de contrôleur images était taillé pour moi. Je pouvais, en effet, y valoriser ma formation et mes expériences en géomatique et cartographie. J’étais aussi curieux de découvrir l’Agence.

Pour faciliter les échanges, j’ai pu bénéficier des services d’un interprète en langue des signes lors de mon entretien de recrutement, puis de ma prise de poste. Dès mon arrivée, je me suis tout de suite senti intégré. Mes collègues sont attentifs et bienveillants ; ils n’hésitent pas à prendre des notes pour moi lors des réunions. Ma hiérarchie se montre disponible et à l’écoute ; elle s’assure de ma bonne compréhension des choses et prend le temps nécessaire pour répondre à mes questions.

Aujourd’hui, je ne ressens ni manque, ni exclusion. Et je me sens bien dans mes fonctions. J’interprète et analyse des images satellite. Au-delà, je me forme pour évoluer et devenir superviseur. C’est dire si je me projette à l’ASP au-delà de mon CDD ! J’aimerais bien passer les concours pour rester à l’Agence dans la durée.

Qu’est-ce qui est mis en place pour faciliter votre quotidien au bureau ?

Aujourd’hui encore, nous pouvons ponctuellement faire appel à un interprète pour certaines réunions ou formations. Je devrais aussi bientôt tester, pour un mois, une tablette équipée d’un micro et d’un système de reconnaissance vocale. L’objectif est de pouvoir retranscrire automatiquement sur écran des interventions orales courtes. Ce sera plus confortable pour moi mais également pour l’intervenant, qui sera ainsi libre de ses mouvements.

Au quotidien, nous avons aussi adopté quelques bons réflexes. Je communique toujours avec un seul collègue à la fois, en face à face. Chacun de nous prend le temps de répéter ses phrases si besoin. On s’appuie beaucoup sur le PC pour partager des choses directement à l’écran. En voyant les choses, je les appréhende mieux. C’est souvent plus efficace qu’un long discours !

Quel regard portez-vous sur votre handicap ?

Pour tout dire, je ne me sens pas handicapé. D’accord, mes oreilles sont « cassées ». Mais cela de m’empêche pas d’interagir avec les autres, de conduire ou de faire du sport !

J’aimerais que les gens comprennent que ma surdité ne définit pas qui je suis. C’est juste une partie de moi. Et puis, il y a tant de manières de communiquer entre la langue des signes, l’écrit, la lecture labiale… avec un peu d’ouverture d’esprit, on arrive toujours à trouver un terrain d’entente !