Travail et salaires, l’éternel bras de force
La mémoire collective par son histoire, atteste que le salaire fut longtemps une somme remise en liquide, dans une enveloppe, et donné à un ouvrier à la fin de sa semaine de travail. Aujourd’hui, le salaire est mensualisé, la feuille de paie explique sa complexité et il se règle par virement bancaire et parfois même, par avantages en nature. À mesure qu’évoluent les règles de l’économie, l’idée même du salaire évolue et se transforme. Il est question donc d’honoraires, de traitements, de rétributions, voire même de moteur de mise au travail et régulateur de motivation pour les hommes.
Le travail se complexe, se diversifie, et s’installe manifestement comme un marché à rude concurrence, monopsone dans certains domaines, volontairement parfois ou pas par « le capitaliste ». Une situation qui émerge durablement dans l’économie moderne, remettant définitivement en question la définition du salaire et son rapport, inéluctable, avec la productivité et la vitesse de son amélioration.
Il est observé, aujourd’hui, par phénomènes de « migration de travail » ou de « d'exode des cerveaux », en sus des moteurs économiques et de leurs conséquences sur l’offre de travail, d’un modèle à un autre, une même personne dans un pays en développement, percevrait un salaire modeste, alors que dans un pays développé, le salaire est largement plus élevé. La raison fondamentale serait qu’entre ces deux pays, le niveau de productivité ne serait le même, mais pas seulement.
Aujourd’hui, « le capitaliste » rejetterait, paradoxalement, le modèle de la concurrence parfaite, avec ajustement de l'offre et de la demande, et œuvre à travers des mécanismes managériaux, pour la généralisation des inégalités du rapport de forces en sa faveur, bien évidemment. Il devient donc important de maitriser la capacité d'expression des salariés pour que les bons résultats macroéconomiques ne s'accompagnent d'effets pompeux sur les salaires des travailleurs et leur comportement.
Il est évident que les fonctionnements du marché classique se sont évacués, le salaire est devenu, intrinsèquement, le consentement de l’employeur versé aux employés dans ce rapport de force, et par conséquent sur la contractualisation. Dans les pays où on se rapproche du plein emploi, tels que les Etats unis ou l’Allemagne, il serait cohérent, selon toutes les théories économiques, standards Marxistes ou Néoclassiques qu’elles soient, de préconiser de fortes augmentations des salaires, sujets de la dynamique salariale dans son environnement économique, or, c’est loin de ce que nous constatons. L’inégalité s’installe et se répand.
Est-ce le déclin du pouvoir syndical qui a permis aux employeurs d'avoir la haute main sur la détermination des salaires et conditions d'emploi, sur le marché du travail ? Pas toujours, le principe d’instauration du salaire minimum en est la preuve, même si on le considère parfois comme un antidote pour la revendication du maintien d’un Etat social.
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Jusqu’à quel point peut-on rémunérer une personne par rapport à sa productivité et à son efficience, si toutefois il serait possible de les mesurer ? N’est-il pas possible que certains puissent développer une sorte de fainéantise ? N’est-il pas, plutôt, plus utile de ne pas trop payer des travailleurs sur certains travaux ou certains emplois et de les maintenir dans la sphère du salaire de subsistance ? d’autre part, ne serait-il pas plus intéressant de payer d’autres plus que leur productivité, par un salaire d’efficience, de fidélisation, pour les empêcher de partir, pour les pousser à ne pas compter leurs heures de travail, à travailler les weekends, à ne pas prendre de vacances, etc ?
Il est certain que nous assistons aujourd’hui à une polarisation du monde du travail où les classes moyennes seraient évacuées, du fait des mécanismes technologiques et de la modernisation. D’un côté ; les « créatifs », source du qualitatif et d’un autre, les « improductifs » ou les ouvriers non-qualifiés, sources du quantitatif dont le salaire stagne et demeure menacé par l’avancée technologique des machines. Un phénomène que les sociétés et même la force syndicaliste commence à accepter.
Conséquence inévitable, deux acteurs économiques en profitent : les actionnaires propriétaires des entreprises et les consommateurs. Dans ce contexte, il devient envisageable, à terme, la disparition du concept de salariat.
Alors, sommes-nous face à une destruction programmée des acquis sociaux et du salariat ? Il est évident que l’interrogation sur le sens et le contenu du travail, qui furent définitivement évoqués lors du taylorisme, par sa critique de décérébration, de déshumanisation du travail, semble légitimement d’actualité et de façon neuve. La technologie qui nous permet, aujourd’hui, de prendre en charge tout ce qui est programmable, affecte significativement le management qui pense pouvoir programmer les êtres humains. Autrement dit, l’avenir du travail deviendrait le non-programmable.
De ce fait, les économistes distinguent deux facteurs de production, le travail et le capital. L’emploi et le salaire cernent la réalité du travail, le capital quant à lui, conceptualise et légitime l’action des travailleurs. Le marché devient alors comme le lieu, où par excellence, le jeu économique se développe, prospère ou disparait.