Un employé multitâche ? une compétence illusoire en entreprise

Un employé multitâche ? une compétence illusoire en entreprise

Etre un employé modèle et efficace pour l'entreprise, c'est d'abattre beaucoup de tâches avec réactivité, entretenu avec nos outils hyperconnectés et la méthode agile pour des actions en flux tendu. Être disponible et accessible en permanence, sont entrés dans nos mœurs aussi bien professionnelle et privée. Cette faculté quotidienne à vouloir tout finir de façon réactif, nous laisse aucun répit.

Où se situe les limites ? Comment notre capacité à faire, notre cerveau peut gérer plusieurs taches simultanément ?

Bien sûr, l’être humain est parfaitement capable d’effectuer plusieurs choses en même temps, mais tout dépend des activités et des conditions.

Par exemple depuis le covid, à l’instauration du télétravail : Une faculté que tout parent sait tous faire, participer à une réunion tout en tapotant son clavier, avec son enfant sur ses jambes qui sautille 😊 – Mais le constat de cette situation, c’est qu’il est difficilement conciliable malgré tout.

Mais qu’entendons- exactement par multitâche en entreprise ? Souvent en entreprise, même à l’entretien d'embauche, dans ses points fortes le candidat dit lui-même qu’il est multitâche. Parfois même dans l’autre sens, le recruteur vous demande, si vous êtes en capacité à gérer plusieurs activités auquel vous serez amené à aborder dans le poste à pourvoir ?

La « première notion du multitâche » prends sa source de l'informatique, la capacité d’un système d’exploitation d’effectuer plusieurs programme de façon similaire. Ce qu’il s’appelle une capacité de calcul. Evidement notre cerveau le fait aussi. L’ordinateur fonctionne exclusivement sur des règles mathématiques avec sa capacité mémorielle donnée. Notre cerveau aussi extraordinaire qu’il soit, travaille de façon très sélective, d’où l’expression parfois "avoir la mémoire courte", la plupart des processus se déroulent sans que nous soyons conscients de cela, surtout ceux qui demandent d’avoir une réflexion complexe.

Il ne faut pas oublier que notre cerveau, est en perpétuel sélection et filtrage des informations, les organes sensorielles transmettent seulement les informations pertinentes ou compréhensibles, car votre cerveau … apprend toujours, et les stocker en mémoire. Il procèdera seulement à concentrer sur la tache numéro 1 (mettant de côté la 2, 3 etc). Ce qui implique une force d’esprit, de l’attention et de la discipline ! Malheureusement notre subconscient surestime cette capacité, prenez par exemple en voiture – la conduite automobile est une activité complexe à part entière, avec les aléas extérieures à tout moment à prendre en compte. Mais ce qui ne nous empêche pas de grignoter, de téléphoner et pire de faire des textos en conduisant. Des études routières ont démontré, que tout comportement hors conduite, réduisait notre attention de 40%, c’est comme si on avait > 1 gramme d’alcool dans le sang.

A l’université, les performances intellectuelles diminuent fortement lorsque les étudiants en classe, sont connectés sur Internet. Et Paradoxalement, ils sont plus accaparés par les informations du net que par l’assimilation des cours du professeur (!?), message avec maman pour racheter tel produit, suivre des story Instagram, les résultats sportifs, voir le menu du repas du midi à la cantine etc. Malgré qu’il y ait que quelques secondes de coupure, l’énergie demandée pour rétablir la connexion à l’enseignement du professeur est considérable et en cumulant, la fatigue ou anxiété se ressentiront tout le reste de la journée.

Pour info, écouter la musique, n’est pas aussi stimulant qu’on le pense, pour rédiger ou même dessiner, le cerveau pour exprimer sa créativité, essaie d’abord de combattre ce fond sonore, l’énergie à la tache se trouve alors diminuer. Un bémol, au bureau, en open-space, ça peut être une barrière à minima, casque visser, qui permet de s’isoler à d’autres perturbateurs ou des stimuli aléatoire de l’environnement des collègues ou autres.

Je prends l’exemple du casque de musique, pour dire que notre cerveau exploite dans nos 5 sens, 11 millions bits par seconde sont déversés sur notre sensorium. Mais notre conscience ne sait que gérer 60 % de ce flot, donc notre subconscient délaisse les 40 % d’information par sélection. La perception de la parole avec plusieurs contributeurs, est d’une tâche auquel notre cerveau doit prioriser, il opère comme un filtre sur les influences contraires quand il y a plusieurs personnes. Il arbitrera plusieurs informations selon son ressenti intrinsèque. A l’époque des réunions physiques, il y avait minima rarement plus 7-8 personnes autour de la table, sur Zoom ou Teams, on peut se retrouver plus de 50 en ligne, et chacun s’ils veulent, peuvent exprimer une opinion pertinente ou pas.

Pour revenir à l’emploi, qui est cette perle rare, qui saura être multitâches ? Capable d’abattre plusieurs tâches à la fois ? tout en restant zen ? même s’il est sans cesse interrompu ? Être en permanence accessible pour les collègues, pour les clients, les fournisseurs ? tout en sachant gérer les nouvelles tâches qui arrivent ? Ben, c’est cela que vous vendez à l’entretien, ou que votre futur employeur veut, pensez-vous raisonnablement le faire au quotidien ? L’évolution du monde du travail a changé, avant il y avait des attentions de la pénibilité physique du travail. La prise en compte de la charge mentale a beaucoup évolué. La concentration est primordiale pour être efficace, malheureusement l’interaction des nouvelles technologies et notre réflexion sollicitent au maximum notre cerveau. Les charges multiples et des interruptions incessantes sont contreproductives, principale source de stress !

Dans le milieu hospitalier est un bon exemple, entre tâche à faire, nouvelle tâche, interruption, la partie administrative à saisir - les statistiques journalières ont démontrés > 60 à 120 fois des actions changent de l’initial pour chaque infirmière dans son quotidien. Cela va de la préparation des médicaments, qui peuvent produire des erreurs médicales catastrophiques. Cette réalité est difficilement compréhensible pour nous communs des mortels. Vous avez surement ce sentiment, en salle d’attente des urgences, de voir rien se passer pendant des heures, et pourtant de l’autre cotés du mur, le personnel sauve des vies.

Souvent Les taches sont définies par le degré d’urgence, attention qui dit urgence, ne veut pas dire précipitations. C’est d’apprendre et comprendre d’abord son contexte « à quoi je dois m’attendre », la fluidité et la clarté dans sa communication est d’une importance vitale pour être efficace. Identifier les taches à faire, certes, mais c’est son changement cap qui est le plus intéressant. De ne pas perdre de son objectif, ce qui est fait et ce qu’il reste à faire, c’est le bon sens paysan, certes, si le contexte est abstrait, le résultat saura d’autant plus. Il faut rendre visible le processus, donc compréhensible par tous. Les études ont démontré que les multitâches permanent des projets, gaspillent 20 % des ressources, soit une perte de chiffres d’affaires pouvant atteindre 25%. Les priorités dans les entreprises, ni sont souvent pas hiérarchisés, ni même arbitrés. L’université de Coblenge a bien démontré sur les 20 secteurs industriels étudiés, que le multitâche était trop présent, et dans les organisations managériales, avec aucun système de gestion, ni de méthode établie.

Dans notre société, toute entreprise doit le prendre compte ce constat, accentué par l’automatisation, la numérisation et les enjeux de la durabilité. L'employé a beau être disponible et de travailler encore plus, le constat général est que la productivité est en baisse. La question pour améliorer l’efficacité, est de savoir où se concentre concrètement les charges multiples et les sources de dérangement pénalisant l’entreprise. Le problème constaté, est souvent que les équipes de développement recevaient trop d’ordre par des sources multiples, que chacune des taches à effectuer, sont identifiés comme priorité absolue, qui conduit forcément à une surcharge de travail. Passer en permanence d’une activité à une autre ne permet pas d’être efficace.

Les axes d’amélioration, sont que les open-spaces doivent être silotés pour autant d’ilot que d’équipe, qui permet de travailler plus tranquillement et de mieux se coordonner entre chaque activité. La planification doit être plus visible par un découpage de 14 jours (dit « sprint ») réalisée par la direction, les clients, fournisseurs et les employés qui définissent ensemble les objectifs : Priorités des tâches et la charge de chacun. Les réunions d’avancement doivent présenter les informations clefs, et de façon synthétique pour aborder les problèmes qu’on rencontre. Cela apportera de l’efficacité et des performances. Par la satisfaction et la responsabilité des équipes. Chacun se sentira d’apporter de la valeur ajoutée à l’équipe. Travailler de concert avec les collègues et sans être dérangés, est déjà un signe de soulagement pour tous.

Le fait d’être absorbé par son activité, impulse un sentiment positif et de satisfaction, dans la psychologie cognitive s’appelle « le flow state » - l’expérience optimale – être interrompu ou dérangé produit l’effet inverse. Il y a une étude de l’université de Lubeck, interrogeant plus de 1 000 employés auquel, ils devaient tenir un journal de bord des taches, qui a démontré un impact négatif sur « le flow state » par la dimension multitâche. Par pression, il a démontré aussi une connotation de l’esprit intérieur que nous provoquons nous même, dit « l’esprit singe », votre intelligence qui ne tiendrait pas en place dans la tête. Notre esprit saute d’une idée à une autre, qui accroit la pression, sème le désordre, nous plonge dans un état de stress et de déconcentration absolue.

La mauvaise conscience d’un travail non abouti, cela provoque la procrastination, de remettre à plus tard, les taches plus désagréables. Le travail inachevé nous le garderons toujours dans un coin de la tête. La précrastination est le contraire, de s’empresser à accomplir les tâches plus faciles ou accessibles ou de s’en débarrasser au plus vite, laissant souvent les tâches les plus importantes. Une montagne des taches non commencé ou non terminé nous nourrira toujours notre mauvaise conscience, et comme tout est connecté, elle sera visible par tous !

L’idée même du salarié polyvalent et multitâche, vient du management même ! Tendance contemporaine de notre relation humaine et de l’effort à l’entreprise, d’être toujours disponible à des sollicitions en permanence, à chaque niveau comme un flux boursier. En effet, on atteint souvent à des situations de burn-out des salariés. « Ne pas le faire », pour les employés, c’est le sentiment de défi vis-à-vis de son responsable, ou même de montrer un aveux de faiblesse vis-à-vis de sa hiérarchie. Pour sortir de surcharge de mental ou d’épuisement aigu, il faut savoir dire .. Stop. On ne peut pas freiner et accélérer en même temps. Il faut un exercice de pleine conscience, de concentrer son attention sur le moment présent. Si vous poursuivez dans ce sentiment d’oppression, la production de cortisol de cerveau saturera votre hippocampe qui peuvent endommager vos neurones sur le long terme, et en réduisant donc la matière grise. Matière grise, processus majeur dans la régulation de l’attention.

Le rétablissement, est de changer radicalement de mode de vie. On consulte plus de 150 fois notre mobile sans avoir conscience de cela. La durée d’attention désormais réagit à des stimuli effrénés du numérique. On peut assimiler cela à une dépendance, à la recherche perpétuelle de la dopamine, un neuro transmetteur qui apporte du plaisir, un circuit de récompense qui peut dérégler la fameuse hormone du bonheur. Le sentiment du multitâche est vecteur de cette illusion. Le cerveau a besoin de « mute », sa maturation a besoin d’inhibition pour consolider sa boite à outil. Certes, à force d’entrainement on peut être performant, ou même par son caractère bien trempé. Ceux qui peuvent prétende à être multitâche et en capacité d’être efficace, qui répondent oui à l’entretien, en fait ils ne sont pas doués, car s’ils se sentent bien dans ce domaine, c’est par ce qu’ils laissent facilement distraire et ont tendance à basculer du coq à l’âne. Pareil pour l’employeur, il ne sait pas ce qu’il veut réellement et que même le poste, il ne sait pas forcément en quoi, en retourne les objectifs premiers.

Certes, on peut s’améliorer dans la capacité à gérer plusieurs flux intentionnellement en même temps. Cependant on doit employer les bons outils cognitives pour distribuer de façon séquentielle. Paradoxalement, ce n’est pas un esprit jeune et vif qui permettra de le faire, ça passe par l’apprentissage, qui nous permettra de prioriser les actions, il faut savoir répertorier les flux attentions à différents niveaux. Les personnes qui accumulent des compétences et de l’expérience sont plus performants dans leur travail. Les séniors sont les premiers à dire qu’ils ne sont pas multitâches pas par prétention ou dépit, mais par prudence, car la priorité des séniors, après avoir tant baroudés, c’est la qualité de vie. Exemple : sur une chaine de montage automobile, un jeune sera multitâche pensant assurer une meilleur productivité et d’aider tous les parties prenantes, par contre un sénior, se focalisera à une tache et prendra le temps, sinon c’est fatiguant à la longue, donc connaissent l’importance des pauses, surtout dans les métiers à risques. Les séniors feront en sorte que le travail soit bien fait et qu’on ne reviendra pas là-dessus (car ils sont aussi râleurs 😊). Le fait de travailler dans le calme et la concentration, sont un vrai booster à l’innovation. Car il faut tout d’aborder développer nos capacités et d’exploiter tout le potentiel de notre savoir-faire.

Il est nécessaire de remodeler le monde du travail de manière afin de nous protéger contre le surmenage et l’usure. Demander un droit à l’indisponibilité est significatif pour l’entreprise. Certaines sociétés françaises même allemandes constatent une meilleure production dans les activités, comme HP, qui limitent un temps de réponse aux mails envoyés, ils incluent le traitement possible, selon la date et l’heure d’envoi, de le traiter soit en fin d’après-midi soit le lendemain matin. Cela permette dans la journée de traiter les actions planifiées et ou prendre le temps à répondre aux mails (permettant de passer un message subliminal, n’attendez pas que les gens vous répondent pour avancer).

Résilience du cerveau, protection contre flots croissants des informations et une meilleur gestion du temps numérique autant de sujets à (re)travailler mais pas de solution miracle. Les employeurs sont appelés à créer un cadre approprié avec une auto-organisation et la discipline de chacun, c’est qu’il s’appelle responsabiliser l’intelligence collective.

Cocher ensemble les priorisations, prendre des pauses, faire des exercices, même méditer et surtout savoir s’arrêter ! Eviter les postes multitâches, s’accorder qu’on peut faire les taches, les unes après les autres, c’est la volonté de respecter votre plan de route, (si possible … sans connexion, rafraichissez votre Outlook ou teams tous les 2 heures) car votre indisponibilité représente aussi de la … valeur pour l’entreprise.

 Rith


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