« Un projet à la mer ? » -Partie 2/4 : Cobb's Paradox : “We know why projects fail, we know how to prevent their failure—so why do they still fail?”.

« Un projet à la mer ? » -Partie 2/4 : Cobb's Paradox : “We know why projects fail, we know how to prevent their failure—so why do they still fail?”.

Partie 2 : Démystifier le phénomène : « Dans les entrailles de la bête »

Waheb Chebel, M.Sc., PMP, Expert en redressement de projets

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Pour ceux qui ont raté la partie 1, ne vous inquiétez pas, vous pouvez encore la revoir, ce qui je vous conseille vivement, en suivant le lien : www.linkedin.com/hp/update/6166566702726344705

Le RDV est à 9 : 00 dans le bureau de Jean, Vice Président des technologies de l'information (CIO). L’expert arrive et s’installe. Martin, directeur de livraisons, fait les présentations. Une fois que chacun s’est servi un café chaud, Jean ouvre la discussion :

-   « Monsieur Léo Fortius, vous ne devez pas vous faire appeler souvent pour des projets qui « changent » de direction. J’imagine que vous avez aussi d’autres activités. »

-   « Nous nous faisons appeler plus souvent que vous ne pensez, mais il y a beaucoup de discrétion autour du sujet. » répond Léo. « D’ailleurs le nombre de qualificatifs différents utilisés pour nommer ce genre de situation est un indice de l’inconfort. Vous-même vous avez dit : projets qui changent de direction ».

-   Jean ne réagit pas et continue « Parlez-nous de ce vous faites. Pourquoi les entreprises viennent vous voir ? »

-   « Quand le téléphone sonne, c’est qu’il y a quelqu’un qui a décidé de prendre les choses en main » sourit Léo. « Quand un projet va mal, les gestionnaires épuisent les solutions à l’interne d’abord, convaincus d’y arriver avec les moyens qu’ils ont. Ils n’aiment pas, en général, réaliser qu'ils ont besoin d’un coup de main. Alors ils attendent longtemps, jusqu'à la crise. »

-   « Mais pourquoi n’y arriveraient-ils pas, par eux-mêmes ? » questionne Jean. « Qu’est-ce que vous avez, que ces entreprises n’ont pas ? »

-   « Ce n’est pas seulement une question de compétence en gestion de projet, comme certaines entreprises essayent de l’aborder. » dit Léo. « Quand un projet est reconnu comme en dérive, c’est déjà la crise dans l’organisation. En plus, les projets sont des êtres complexes, gouvernés par des paramètres qui caractérisent les personnes impliquées, les approches utilisées, le contenu du projet, le contexte organisationnel, les livrables. Chacun de ces paramètres est un sujet sur lequel ça pourrait mal aller. Et tous ces paramètres, très nombreux, sont, en plus, inter-reliés et donc agir sur l’un a des impacts sur les autres. »

Jean est irrité par cette phrase qui semble pompeuse.

-   « Écoutez ! Vous ne me dites rien là. J’ai l’impression d’entendre une phrase tout juste sortie d’un livre. » dit Jean sur un ton provocateur et déjà mal à l'aise dans la rencontre. Jean est connu dans l’entreprise pour son franc parler. « Ce n’est pas juste un truc de recette que vous essayez de complexifier ? » Ajoute-t-il. « Si ce sont juste des réponses de ce genre que vous avez, je n’ai pas l’impression que nous allons en apprendre beaucoup aujourd’hui. » termine-t-il.

-   « Vous voulez une recette ? Je peux vous en donner une, et elle sera gratuite. » Répond Leo, piqué par la remarque, malgré son habitude du contexte agressif des projets en difficulté. « Mais je crois qu’elle ne vous aidera pas à résoudre vos problèmes. » continua-t-il.

-   Jean n’aime pas l’accent qui est mis sur les difficultés qu’ils vivent. « Qui a dit que nous avions des problèmes ! Écoutez, nous avons livré des projets avant que vous n’arriviez et nous allons continuer de le faire après. »

-   « Écoutez ! » répondit Leo avec beaucoup de calme. « Nous pouvons continuer de faire de la rhétorique pendant que vos projets font perdre de l’argent à votre entreprise et que votre réputation subit les effets de l’érosion, ou nous pouvons parler de ces projets. Mais si vous ne reconnaissez pas qu’il y a un problème, il n’y a rien que je puisse faire.»

-   Martin intervient rapidement pour détourner l’attention, le temps que les esprits se calment : « Maintenant que vous êtes là, pourriez-vous, en termes simples, nous parler de redressement. » Il avait mis de  l'emphase sur le mot simple.

-   Léo compris le message et repris son enthousiasme. « Vous connaissez surement le paradoxe de Cobb : “We know why projects fail, we know how to prevent their failure—so why do they still fail?”. La complexité dans les échecs est un fait avéré. Les bureaux de projets et les gestionnaires font un excellent travail de prévention et heureusement d’ailleurs. Mais la réalité est incontournable : des projets échoueront toujours. Au lieu de traiter ça comme une catastrophe, il faut plutôt s’y attendre, dédramatiser, se préparer à ce genre de situations et surtout ne pas les laisser trainer.

-   Avant que Jean n’ait eu le temps d’intervenir, Martin poursuit ses questions : « Et dites-nous pourquoi se donner la peine de redresser un projet ? On peut juste constater la perte et le fermer. »

-   « C’est en effet une solution possible. Et peut être la plus facile. Mais est-ce la meilleure ? » questionne Léo, en marquant une pause, pour les laisser y réfléchir. « Manifestement vous avez jugé que non, si je suis là. Vous avez très bien fait. Le redressement de projet est très important. Il protège les bénéfices du projet ou l’opportunité visés par ce dernier et il limite les pertes de l’organisation. Il protège aussi la crédibilité de l’organisation et il lui permet d’apprendre de ses erreurs. Tuer un projet est parfois nécessaire mais pas avant certaines étapes du redressement. »

-   « Pourquoi dites-vous que le redressement de projet n’est pas juste une recette ?» réussit à glisser Jean, finalement.

-   Léo était heureux que ce soit Jean qui revienne sur le sujet : « Vous me donnez là l’occasion d’expliquer ma phrase « pompeuse » de tout à l’heure, Jean. Au cours du temps différents travaux vérifiables ont été réalisés pour conclure que

  • Comme chaque projet est relativement unique, il est également unique quant aux raisons pour lesquelles il échoue.
  • Le problème est complexe parce que les facteurs qui sont responsables de l’échec s’influencent, eux mêmes, les uns les autres.
  • Et puisque la situation est différente d’un projet à l’autre, eh bien, les relations entre les facteurs aussi sont différentes

C’est cela qui fait que le redressement n’est pas une histoire de recette. Chaque cas est unique. » conclut-il.

Cette dernière réponse a l’air de beaucoup détendre Jean. Il enchaîne alors avec une autre question qui le préoccupait depuis la petite prise de bec : « Mais pourquoi dites-vous que le redressement de projet n’est pas seulement de la gestion de projet. Nous parlons bien de projets. »

-   « Le redressement est plutôt de la gestion de crise que de la gestion de projet, surtout dans ses premières phases. » répond Léo. « Et c’est dans cette discipline de gestion de crise, connue et expérimentée,  que se trouvent les meilleurs modèles pour redresser une situation qui vire vers l’anarchie. Les mêmes modèles sont d'ailleurs utilisés dans les approches de gestion du changement ou dans les approches de résolution de problèmes. Les étapes par lesquels il faut passer pour redresser une situation sont aussi les mêmes, avec plus ou moins de nuances. Et je vous propose justement le schéma suivant pour les illustrer. Vous remarquerez qu’il y a des étapes qui sont linéaires et d’autres qui sont itératives, c'est à dire, à reprendre quelques fois :

-   « Combien de temps prend une intervention typique de redressement » demande Jean, qui se détendait de plus en plus.

-   « Ce que je sais des expériences passées, c’est que c’est toujours très urgent quand on arrive sur place. » dit Léo avec un sourire en coin. « Mais avec le temps, on comprend que l’urgence est surtout de comprendre ce qui ne va pas pour être capable de l’expliquer et de rassurer l’entreprise. Généralement, et selon la complexité du projet, cela peut prendre de 1 à 3 semaines pour cette première étape. Pour des projets très complexes, il faudra peut-être un peu plus. L’étape suivante de redressement est itérative et requiert un peu plus de temps selon la précision du diagnostic de départ et le contexte de l’entreprise.

-   Jean regarde Martin un moment puis dit à Léo : « Bien. J’aimerai que vous considériez nous aider pour un diagnostic. Qu’en penses-tu Martin ?»

-   « Je trouve que ce serait un bon début. » répond Martin.

-   « Bien, avec plaisir. » répond le consultant. « Je peux revenir la semaine prochaine, vous me parlerez de votre projet et nous déterminerons les prochaines étapes par lesquels nous passerons. »

 Auteur : Waheb Chebel, M.Sc., PMP, Expert en redressement de projet -- courriel: wchebel@hotmail.com

La semaine prochaine : Partie 3 – Les premières étapes du redressement de projet : « Le début du voyage »

Waheb Chebel

Directeur Bureau de Projet et Portefeuille - SAQ

8 ans

Hi all. Starting Tuesday, august the 30th, English version of the articles already published in french about run away project and recovery will start. Stay tuned. I hope you will enjoy. Waheb

Waheb Chebel

Directeur Bureau de Projet et Portefeuille - SAQ

8 ans

Bonjour à tous. Mardi matin, le 23 aout, je publie la 3ieme partie de la belle histoire que vous suivez. Vos commentaires nombreux sont attendus avec impatience. Waheb

Reda Alioua

Systems | Solutions Architect | Author

8 ans

C’est un dialogue assez réaliste. Cela démontre bien que Jean le CIO, à une volonté de vouloir sauver le projet. Sauf, Jean, n’arrive pas à concevoir, qu’un spécialiste dans le redressement, pourra réellement sauver le projet, quand toute une équipe interne jumelée à une équipe externe de la firme de consultation en charge de la réalisation du projet, n’ont pas pu le faire. Ceci est tout à fait normal du point de vue d’un gestionnaire. Je suis donc impatient de vous lire, pour savoir comment Léo Fortius va gagner la confiance de Jean. Comment il va trouver la solution qui va remédier au problème après l’audit et le diagnostic de la situation. Comment aussi cette solution une fois trouvée sera validée pour que Jean et aussi Martin puissent se mettre en accord en se sentant suffisamment à l’aise pour ordonner son implémentation pour enfin voir le résultat final.

Rafik Bencheraiet

Conseiller sénior sécurité & architecte chez Société de transport de Montréal

8 ans

j'attend la suite avec impatience

Waheb Chebel

Directeur Bureau de Projet et Portefeuille - SAQ

8 ans

Thanks! Yes, there is an english version coming in the next weeks. Stay tuned.

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