Sans contact et à distance, mais avec Confiance, surtout (mercredi 25 mars- J9)

1- Carnet d'observation: mercredi 25 mars 2020, J9

Que la deuxième semaine est difficile. Ce matin, un petit mieux (mieux dormi) mais toujours avec une capacité respiratoire diminuée avec une bouche sèche et moins de courbatures... Les jours ne se ressemblent pas, aléatoire pas de phase, demain peut être totalement différent d’hier. Ce qui oblige à rester positif, zen, battant, philosophe du moment présent et d’être vigilant à la surveillance de cette deuxième semaine (la deuxième semaine est connue pour être plus critique). Hommage au présent alors et nouvel objectif: récupérer du souffle.

Hier midi, j’ai décidé d’appeler le SAMU en raison de l’essoufflement augmenté et du souffle court (moins d’oxygène) et de la constante fatigue après l’hésitation de la veille suite à une longue période de quinte de toux. Premier contact, puis contact avec le médecin du Samu en ligne. Au fur à mesure de l'écoulement des questions et des demandes de détails sur les signes de gravité, j’angoisse un peu du bilan. Elle note l’essoufflement et la gêne respiratoire dans ma voix, pas de respiration accélérée, pas de détresse respiratoire, pas d’indication actuelle pour une hospitalisation urgente. Ouh! Elle me met en garde sur cette deuxième semaine : vigilance accrue car les risques graves sont connus pour une décompensation (signes: difficulté de respirer assis, les sifflements). Je tiens à rendre hommage au professionnalisme de l’expertise et de l’écoute empathique du premier contact et du médecin du SAMU: ils sont formés à la détection des facteurs de risque, à l’urgence,  à la relation d’aide et aux attitudes d’accompagnement (aucune attitude toxique et bloquante...). Je ressens qu’elle détecte bien l’urgence ou non d’aller en hospitalisation. Il est plus que nécessaire de respecter les niveaux d'organisation des soins, de faire confiance à son corps, à son médecin et au Samu. Pas de carte de fidélité, mais un numéro de dossier (si je dois les solliciter à nouveau). La médecin du SAMU me demande ainsi de rencontrer un médecin de ville pour ausculter les poumons et prendre le taux de saturation de l’oxygène dans le sang. SOS médecin étant surchargé en visite à domicile, j’ai pris rendez vous avec mon médecin traitant pour la 3ème fois mais cette fois ci en présentiel, dans son cabinet. En présentiel, le médecin a pris différentes constantes: la fréquence respiratoire: ok, taux de saturation d'oxygène dans le sang: plus bas que la normale. Normal vu l’essoufflement et le manque d’air. Comme le médecin du Samu, il me conseille être très vigilant ces jours-ci, il y a un risque de pneumonie la seconde semaine. Selon lui, cet état risque de durer, rassurant aujourd’hui mais il ne savait ni pour demain, ni les jours suivants... conarvirus. Les jeunes s’en sortent s’ils sont intubés. A un moment il n’y aura plus de ventilateurs pour les seniors. C’est horrible. Heureux de sortir enfin de ma prison confortable, avec mon attestation de déplacement dérogatoire et de faire attention à ne croiser personne. J’étais ahuri de voir autant de monde en ville, et pas suffisamment de contrôles selon moi. Ah c’est comme le dimanche? ou c’est bien le confinement.

2- Journal de bord

Les modalités à distance deviennent la norme (comme le paiement sans contact . Le réel est relayé par la distance sans contacts. La distance devient la réalité, la réalité devient la distance: inversion. La distance ne peut pas tout remplacer, oblige le retour au réel, mais sans contacts. Cela ne veut pas dire sans contacts humains. En cette période de confinement, nombre de solutions numériques, de plateformes, d’outils de partage sont proposés: c’est l’Heure imposée du Numérique. Malgré la frilosité des organisations professionnelles, le télétravail est ainsi devenu la norme réelle et s’est imposé dans la réalité actuelle, actuellement... C’est une expérience de distance qui questionne la confiance, comme en présentiel...La distance ne veut pas dire sans contacts humains et sans confiance. Loin de là… Présentiel ou distance, tout est réel, confiance ou pas. …

Dans une ancienne (et récente) vie professionnelle, j’ai eu l’occasion de piloter la conception d’un projet de formation numérique (FOAD, formation ouverte à distance, e-learning, terme un peu “old”) en agro-écologie avec des enseignants, ingénieurs, geeks et non, qui étaient passionnés par la relation humaine, la motivation à s’engager et à persévérer à apprendre (motivation à tenir dans la durée). Bien plus que des outils et process, j’ai eu l’occasion de prendre du recul avec d’autres collègues de l’une des 7 Universités numériques Thématiques (UNIT) et de m’intéresser au parcours de la vache Mirabelle dans le parcours en agro écologie. Plus sympa que Conarvirus!!!

Quelles sont les deux conditions pour développer la motivation et surtout maintenir la persévérance à distance ?

Premièrement, la condition sine qua none est de favoriser la convivialité, ciment de la persévérance, à l’image du petit verre français que l’on partage. Dans un parcours de formation et d’accompagnement, un climat de plaisir, de confiance et de sens est primordial. Ce climat zen, confiant et chaleureux, apporté par les animateurs humains fait toute la différence. Les moyens sont nombreux: poser l’objectif de l’émulation dès le début, de l’importance du rendez-vous présentiel, développer l’atmosphère d’empathie (envers tous les publics, les modes d’apprentissages, la convivialité…) dès les premières connexions, amener du ludique pour développer le plaisir à apprendre (attractivité, variété des médias), créer des défis (exercices quizz, activités variées…).

La deuxième condition, c’est de dynamiser et favoriser l’Autonomie. D’abord, l’enjeu est de développer l’esprit critique et la réflexivité (condition primordiale pour l'andragogie, formation pour adultes) pour favoriser le travail en profondeur: imaginer un carnet de bord (carnet d’expérience pour garder en mémoire, prendre des notes), développer des parcours hybrides avec le réel pour renforcer l'apprentissage en profondeur. Le deuxième enjeu pour cette condition d’autonomie c’est de respecter les différents apprentissages. Le plus important c’est de donner l’Envie et la Liberté d’apprendre (Rogers), de créer l’occasion, l’opportunité pour développer la Responsabilité, tout en veillant à l’acquisition et au développement des compétences de sécurité. Il est important de montrer l’utilité, le sens des activités d’apprentissage et de diversifier les modalités d’apprentissage (tâches nouvelles, diverses et variées avec un degré de défi raisonnable), d’être centré sur le progrès et la maîtrise, de donner la possibilité de mesurer ses progrès...Enfin il est nécessaire de valoriser l’effort personnel et de s’adapter au contexte des apprenants (l’erreur, inhérente à l’apprentissage). Le troisième enjeu de cette condition d’autonomie est de respecter l’importance du calendrier et la régularité des rendez vous: faire attention au temps des activités individuelles et collectives et à la patience (pour connectivité), prendre le temps et résoudre les bugs, les questions techniques, proposer du temps afin que les groupes se connaissent...

3- Conclusion

En conclusion, comme en présentiel, il est crucial de développer la motivation à s'engager à persévérer et à apprendre à distance, de créer de l’interactivité et de questionner les activités, les conditions, les moyens pour favoriser le plaisir (motivations intrinsèques). In fine, de l’humanité, des liens humains...L’outil numérique cache souvent le manque de stratégie, d’enjeux...La technique est simplement le support d’un viaduc de liens humains. 

Ces expériences de vie sont bien réelles et renforcent les viaducs de liens humains, bien réels, physiques et à distance. La Présence est une condition nécessaire quelque soit la distance (présentiel, virtuel, blended) et l’échelle spatiale urbaine. Avant de s’engager dans la Relation d’Accompagnement ou dans un parcours de formation qu’elle soit à distance ou en présentiel, le prérequis absolu, la condition de base est la connaissance et la maîtrise de la relation d’aide, de l’approche centrée sur la personne, des attitudes toxiques et favorisantes, pour faire Confiance à la personne accompagnée, dans son Expérience, dans sa Maturité, son Autonomie, sa Responsabilité et sa Liberté. Une juste distance...La Confiance n’est ni négociable, ni dérogatoire. (cela fera l’objet d’un autre post).

La médecin du SAMU avait cette connaissance, elle maîtrisait la relation d’aide, la Confiance...À distance et sans contact. (à l'image des nombreux soutiens actuels plus ou moins proches et lointains).

Avec ou sans contact: mais avec Confiance surtout.

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(Mes propos et réflexions sont personnels, merci à mon père instituteur et aux expériences de vie pour ces clefs pédagogiques et humaines éprouvées)

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