Analyse sous le prisme "managérial"​ du film "Le Secret de mon Succès"​ (1987)
Site "www.critique-film.fr" - Film d'Herbert Ross, 1987

Analyse sous le prisme "managérial" du film "Le Secret de mon Succès" (1987)



L'histoire ? Brentley Foster, joué par Michael J. Fox, un jeune diplômé venant du Kansas (donc déjà taxé d'être un "bouseux") arrive à New-York pour s'y faire une place. Problème, alors qu'il arrive pour son embauche, il découvre que son job est supprimé pour cause de fusion défavorable.

"Mais je comptais sur ce job, que vais-je faire désormais ?" demande-t-il désabusé à celui qui aurait dû être son patron. "Pitié !" répond celui-ci en quittant également la pièce, faisant lui aussi partie des 90% de salariés virés.

Brentley va enchainer les entretiens d'embauche, où on lui reprochera son manque d'expérience. Quand enfin un poste pourrait s'offrir à lui (il a légèrement truqué son CV...), il s'avère que c'est pour devenir mère porteuse...

Au final, il appelle un oncle (lointain : "sa sœur a épousé la tante du cousin Joe...") qui dirige une multinationale, Pemrose, "dont la politique de diversification s'opère dans 27 branches, qui a emprunté plus d'argent aux banques que le Mexique, et qui compte dans son seul siège plus de 30 000 personnes ("dont les salaires cumulés équivalent au PIB de la moitié des pays du Marché Commun")." Un gros machin qui aiguise l'appétit d'un puissant financier, Donald Davenport, qui se prépare à effectuer une OPA hostile.

Là, notre jeune héros-neveu ("par des voies détournées mais légales") va faire vibrer la (mince) corde familiale du patron qui se révèle tyrannique, obnubilé par la réduction des coûts et la variation quotidienne du cours de bourse de sa société. Il malmène ses cadres supérieurs à qui il impose de fatigants footings sur le toit du building. Ces cadres aimeraient bien que dans un coup de colère il ait un infarctus... Pour se protéger, ils ne pensent qu'à se couvrir, et à rejeter la faute sur les autres. Tout cela à coups de "mémos" car nous sommes dans les années 80 et le mail n'existe pas encore. Les mémos sont encore tapés à la machine par des armées de secrétaires, toutes des femmes évidemment (les seuls écrans d'ordinateurs affichent de belles lignes vertes sur fond noir)

Brentley se retrouve au service "courrier" où son chef ("Dieu", qui trouve que le prénom de sa nouvelle recrue est un nom de maladie) se plaint d'avoir affaire à un "singe d'université" dont la cravate donne l'impression "d'avoir mijoté dans du vomi". Là, confié au parrainage d'un collègue désabusé par la vie de l'entreprise, il se retrouve à distribuer les fameux mémos et apprend quelques règles de la vie de cette fameuse multinationale :

1. Ne jamais fraterniser avec les "vestons" : ce ne sont pas des personnes mais des "vestons".

2. "Cette baraque est un zoo, personne ne sait ce que font les autres services".

Il va donc ouvrir certains mémos (sans en avoir le droit, bien évidemment) et comprendre que vraiment rien ne tourne dans cette grande baraque : "Je ne comprends pas les rôles et attributions. Chacun d'eux à un titre ronflant, mais les réelles fonctions nagent dans le flou artistique". "Les 3/4 de ces memos n'ont aucun sens : deux personnes demandent aux achats une chose demandée par un troisième".

Ce à quoi son collègue désabusé répond : "c'est la façon "veston" de réfléchir. Quelque chose se passe quand tu mets une cravate : ça empêche l'oxygène d'arriver jusqu'au cerveau".

Evidemment, Brentley ne peut pas en rester là. Il s'invente un nouveau nom, Carlton Withfield, prend un bureau inoccupé depuis peu (le cadre qui l'occupait s'étant fait virer du jour au lendemain, on le voit faire ses cartons en pleurant), et devient à mi-temps, en secret, cadre de cette grande entreprise. Lui aussi devient "veston", mais on devine qu'il va faire les choses autrement : il analyse les faits, se coltine des kilogrammes de fichiers papier, fait fonctionner la photocopieuse tard le soir, couvre son bureau d'indicateurs innovants,... Et en réunion de comité, n'hésite pas à contester les "Directives du Parti", à savoir la sacro-sainte parole du PDG.

Sa secrétaire est mise à contribution dans ce projet, même si elle ne connait rien de la double vie de Brentley, car bien évidemment, pour que tout cela réussisse, il faut bien quelqu'un pour taper les rapports, transcrire les réunions enregistrées sur cassettes, faire les graphiques (PowerPoint et Excel n'existent pas encore). Tout cela est dans les attributions de cette dame, mais elle se retrouve à quelques reprises face à son chef (le jeune cadre) à demi-nu, surpris en pleine session de changement de vêtements (car Foster n'entreprend rien envers sa subordonnée, vu qu'il a des vues sur une autre personne, comédie romantique oblige, ce qui ne l'aura pas empêché d'entretenir une liaison avec celle qui se révélera être l'épouse du patron, donc sa tante...on sent venir le vaudeville.)

L'habit faisant le moine, il ne faut en effet pas porter la même tenue au service courrier et dans une salle de réunion de la Direction. Le "veston" doit garder sa place... Le bureau devient dressing, et l'ascenseur devient salon de désabillage / rhabillage... quand on arrive à le bloquer suffisamment longtemps. Car il ne faut pas se faire découvrir, ni par le chef du service courrier qui a l'impression d'avoir affaire à un cinglé, ni par son oncle, le grand patron, qui aime collectionner les conquêtes féminines, sans forcément demander le consentement de ces dames. C'est un faux épistaxis qui permet à Brentley / Carlton de sortir d'une réunion de comité à laquelle assite pour une fois le PDG, sans être reconnu par ce dernier.

Il se trouve ensuite que Carlton a la possibilité de partager ses analyses auprès des relations de sa tante (l'épouse de son oncle/patron, si vous suivez, vous aurez deviné qu'entre les époux les relations n'étaient pas au beau fixe), qui se trouvent être de grands financiers. Déjà, l'impact du réseau, mais aussi l'importance du "savoir bien pitcher".

La fin est étasunienne en diable et n'a donc aucun intérêt : il séduit la seule cadre féminine de l'entreprise (avec qui le PDG avait une aventure), et finit par rafler la mise en prenant la direction de l'Entreprise. Pas de "Spoiler" ici, puisque vous vous attendiez tous à cela.

Ce film a beau avoir presque 35 ans, les tubes cathodiques des écrans y prennent une grosse place sur les bureaux, mais il montre que pour beaucoup de choses, rien n'a changé. On a beau mettre en avant la forme physique (voir la salle de sport et les séances de footing sur le toit de Manhattan), on se couvre toujours à coups de mémos, on aime les titres ronflants qui font bien sur une carte de visite, et on suit le cours de bourse au jour le jour. Côté positif : une vision nouvelle des choses, à condition de s'appuyer sur un réseau, peut amener un changement important et bénéfique.

A mon humble avis, soit cette société n'aurait pas réussi la certification ISO 9001, soit elle l'aurait faite pour les mauvaises raisons, et n'en n'aurait pas retiré toute la quintessence : la coopération entre les personnes et les services, basée sur le respect, la satisfaction du Client, la vision à long terme pour augmenter la performance globale.

La fiche du film sur Allo-Ciné : Le Secret de mon succès - film 1987 - AlloCiné (allocine.fr)


Aparté : On découvre ainsi qu'à cette époque, tout est vraiment fait en interne : les plaques de noms sur les portes des bureaux, les cartes de visite et le papier à lettre, ou la conduite des cadres supérieurs (et leurs épouses) dans de luxueuses limousines. Quel est, au fond, le "core business" de cette entreprise ?

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Plus d’articles de Nicolas Perrot

Autres pages consultées

Explorer les sujets