Le coquelicot nous rappelle que la meilleure des préparations ne suffit pas.
Benoit Aubry

Le coquelicot nous rappelle que la meilleure des préparations ne suffit pas.

Le 1er juillet 2016 verra célébré le centenaire du début de la bataille de la Somme. Pour soulager les Français engagés à Verdun, l'Etat-Major britannique avait décidé de lancer une grande attaque sur le front qu'elle tenait en Picardie. Pour cela, des moyens considérrables furent mis en oeuvre : artillerie, hommes, et mêmes mines qu'on fit exploser juste avant l'attaque sous les lignes allemandes. Un exemple saisissant de cet aspect de la guerre est encore visible près d'Albert, au lieu dit "Lochnagar Crater", dans la Somme. A tel point qu'on prêt au général Douglas Haig ces mots : "Nous ne changerons peut-être pas l'Histoire, mais à coup sûr nous changerons la géographie".

Sauf que les meilleurs préparatifs peuvent déboucher sur le pire des désastres. Confiants dans le travail formidable de destruction causé par les bombardements d'artillerie, les soldats britanniques (anglais, gallois, irlandais, canadiens, écossais, australiens, néo-zélandais, indiens...) se lancèrent à l'assaut en rangs serrés et en marchant.

Devant les mitrailleuses allemandes, dans les barbelés, le massacre fut terrible. On compta plus de 19 000 morts le 1er juillet. En une seule journée. Ce fut une catastrope d'autant plus grande que l'habitude était alors dans l'armée britannique d'envoyer au front des régiments et des bataillons d'hommes de la même origine : du même quartier, du même village, de la même ville. Au soir du 1er juillet, il y eut donc, d'un coup, des villages entiers de veuves et d'orphelins. Pourquoi cela ? Parce que les Allemands, prévenus de l'attaque, s'étaient solidement retranchés, mettant un soin particulier à l'édification de protections soignées. Quant aux Britanniques, ils péchèrent par excès de confiance et par l'insuffisance de prudence lors de l'assaut initial.

La bataille dura encore des mois. Elle vit le premier emploi des chars d'assaut, qu'on avait nommés "tanks" pour tromper l"intelligence militaire ennemie. Mais elle continua à faire des morts.

En leur souvenir, les Britanniques adoptèrent le coquelicot, plante qui n'est fragile que d'apparence, et dont la couleur rappelait le sang versé. Seule plante à pousser sur les champs de bataille dévastés, elle est portée avec émotion chaque 1er juillet et chaque 11 novembre. A cette occasion, on se rappellera du poème de l'officier canadien John McCrae, "In Flanders Field", reproduit ci-dessous. Pour nous souvenir de tous ces hommes fauchés loin de chez eux.

 

In Flanders fields the poppies grow9
Between the crosses row on row,
That mark our place; and in the sky
The larks, still bravely singing, fly
Scarce heard amid the guns below.

We are the dead. Short days ago
We lived, felt dawn, saw sunset glow,
Loved and were loved and now we lie
In Flanders fields.

Take up our quarrel with the foe:
To you from failing hands we throw
The torch; be yours to hold it high.
If ye break faith with us who die
We shall not sleep, though poppies grow
In Flanders fields.

— John McCrae, In Flanders Field.

 

Au champ d'honneur, les coquelicots
Sont parsemés de lot en lot
Auprès des croix; et dans l'espace
Les alouettes devenues lasses
Mêlent leurs chants au sifflement
Des obusiers.
Nous sommes morts,
Nous qui songions la veille encor'
À nos parents, à nos amis,
C'est nous qui reposons ici,
Au champ d'honneur.
À vous jeunes désabusés,
À vous de porter l'oriflamme
Et de garder au fond de l'âme
Le goût de vivre en liberté.
Acceptez le défi, sinon
Les coquelicots se faneront
Au champ d'honneur.

 

Adaptation de Jean Pariseau.

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