Connecter citoyens et professionnels de santé pour une meilleure prévention : l’exemple d’un programme de prévention cardiovasculaire
Le numérique a profondément transformé l’ensemble de notre société. Le domaine de la prévention n’y fait pas exception. Il existe des milliers d’applications permettant de savoir si on a assez marché dans la journée, de compter les jours depuis que l’on a arrêté de fumer, pour contrôler les apports nutritionnels des aliments que l’on va ingérer...
Pourtant, la pertinence et l’utilité réelles de toutes ces mesures et informations varient très fortement. En France, cette révolution numérique n’a pour l’instant pas eu d’impact majeur sur l’efficacité de la prévention. Ainsi, le nombre de décès évitables par des interventions de santé publique, de prévention primaire et de soins de santé était de 202 pour 100 000 habitants en 2020. Il était de 215 en 2011 et de 186 en 20191.
Si ce taux reste l’un des plus faibles d’Europe et fait de la France un bon élève en la matière, la fluctuation de l’indicateur interroge. De nombreuses maladies à forte prévalence (nombre de cas d’une maladie dans une population à un moment donné) sont évitables ou maîtrisables par des programmes de prévention efficaces. C’est notamment le cas des maladies cardio-vasculaires, 1ère cause de mortalité dans le monde et 2e en France après le cancer.
1. DRESS. Rapport « Les dépenses de santé en 2022 ». 2023.
LA MULTIPLICATION DES OUTILS DE PRÉVENTION INDIVIDUELLE SE FAIT AUJOURD’HUI SOUVENT SANS UNE PLUS FORTE INTÉGRATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ DANS CES PROGRAMMES
Selon la Fédération française de cardiologie, 80 % des maladies cardio-vasculaires pourraient être évitées grâce à une meilleure hygiène de vie. Dans le même temps, peu nombreux sont les professionnels de santé formés à éduquer leurs patients à ces comportements vertueux. Les consultations de prévention individuelles sont rares, les actions de prévention collectives ou communautaires menées par un médecin sur sa patientèle également. Ce n’est pas la faute des professionnels dont le temps est déjà fortement contraint, c’est celle du manque de formation conjuguée à l’inexistence d’une rémunération adaptée pour ce type d’action.
La multiplication des outils de prévention individuelle se fait aujourd’hui souvent sans une plus forte intégration des professionnels de santé dans ces programmes. Ce sont pourtant eux qui sont les plus à même de faire de ces outils des moyens d’action efficaces pour améliorer la santé de la population.
Ainsi, à l’ère du numérique, comment mobiliser des professionnels de santé compétents pour réduire les facteurs de risque cardio-vasculaire dans la population dans le cadre d’un programme de prévention efficace ?
Les nouveaux outils numériques permettent une facilitation de « l’aller-vers » pour impliquer massivement les citoyens (1), cependant c’est le lien avec un professionnel qualifié qui renforce l’amorce d’un changement bénéfique pour la santé du patient (2). Enfin, c’est l’adoption réelle par les citoyens et l’évaluation a posteriori qui doivent guider les évolutions d’un programme de prévention efficace (3).
1. L’aller-vers : numérique, mais pas seulement
Les outils numériques sont un formidable moyen pour toucher les citoyens. Ils sont simples d’utilisation, disponibles à toute heure et s’adaptent aux modes de vie de chacun. Une application simple sous forme d’un questionnaire personnalisé à réaliser depuis chez soi permet de mobiliser les citoyens individuellement, à leur rythme. À l’issue, chacun repart avec ses résultats personnalisés et en principe une base solide pour initier une prise de conscience. Néanmoins, l’expérience du réel nous a prouvé que pour pouvoir avoir un impact sur l’ensemble d’une population, « l’aller-vers » ne peut pas être que numérique. L’assise physique et le lien réel permettent eux aussi de toucher efficacement certains patients que la dématérialisation laisse de côté.
Dans le cadre du programme de prévention « Mon Bilan Cardio » développé par Malakoff Humanis en partenariat avec Livi, l’expérience a montré que l’intégration initiale dans le programme était meilleure lorsqu’un infirmier formé était dépêché sur place par Malakoff Humanis, dans les locaux des entreprises participantes. Alors, les salariés concernés trouvent bien souvent une nouvelle forme de motivation, le programme devient tangible à leurs yeux, leurs collègues s’y sont mis et finalement c’est une population bien plus large qui s’inscrit dans cette démarche.
La conjugaison d’un programme numérique avec une assise physique permet d’accroître l’initiation d’une démarche de prévention individuelle. Pourtant, une fois l’intégration dans le programme effectuée, reste à initier un changement comportemental.
2. Le professionnel de santé pour amorcer un changement des habitudes de vie
Les nombreuses applications de prévention se contentent souvent d’une évaluation individuelle et de résultats personnalisés censés permettre à l’utilisateur de modifier ses habitudes de vie. Malheureusement, le changement comportemental n’est que très rarement mis en place. Pour renforcer les chances d’adoption, il est essentiel de pouvoir discuter des résultats obtenus avec un professionnel qualifié et d’en dégager des enseignements. Rares sont pourtant les professionnels de santé accessibles pour ce genre d’échange, en particulier dans la sphère des prestations gratuites pour le citoyen. Il en va ici de l’appréciation des capacités et de la motivation des patients à infléchir leur comportement afin d’adapter le discours et les modalités de prises en charge. C’est un facteur clef de succès qui est pris en compte dans ce programme.
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IL FAUT À LA FOIS FORMER LES PROFESSIONNELS DE SANTÉ AUDIT PROGRAMME DE PRÉVENTION ET LEUR DONNER LES RAISONS ÉCONOMIQUES DE S’Y IMPLIQUER
Pour cela, il faut à la fois former les professionnels de santé audit programme de prévention et leur donner les raisons économiques de s’y impliquer. C’est ce double fonctionnement que Malakoff Humanis et Livi ont mis en place.
D’abord les médecins salariés par Livi qui souhaitent rejoindre le programme « Mon Bilan Cardio » bénéficient d’une formation spécifique portant à la fois sur le fond de la prévention des risques cardio- vasculaires, mais également sur la forme spécifique du programme pour lequel ils recevront des patients.
Ensuite, ils ont une motivation économique pour rejoindre le programme : des consultations longues, mieux valorisées que les 25 euros habituels. Cet élément est déterminant car il valorise justement l’implication de médecins hautement qualifiés qui ne pourraient pas prendre réellement le temps d’échange avec le patient sur la base d’un acte classique.
Enfin, le numérique prend toute sa valeur dans sa capacité à mettre en lien entre citoyen et professionnel de santé. Les échanges sur les résultats du questionnaire se font en téléconsultation, ce qui permet une facilité d’accès au médecin pour le patient et fait tomber de nombreuses sources de découragement : devoir trouver un rendez-vous, se rendre physiquement chez son médecin, se livrer de but en blanc sur ses habitudes de vies... Le patient a pu retracer ses comportements à son rythme grâce au questionnaire et le médecin peut préparer sa consultation en amont en ayant une vue d’ensemble.
Finalement, le numérique permet également d’intégrer facilement le patient dans une approche pluriprofessionnelle, il peut être orienté vers un autre professionnel médical ou paramédical en cas de besoin spécifique. Des examens complémentaires peuvent lui être prescrits. Il bénéficie de possibilités simples de suivi et retrouve ses résultats sur son espace personnel sécurisé. Son parcours est totalement personnalisé, ce qui lui permet d’avancer à son rythme, selon ses compétences psychosociales. Pour finalement tirer de véritables enseignements des échanges qu’il a pu avoir avec son médecin et des résultats de son questionnaire.
3. L’adoption par les patients : le juge de paix
Une fois tous ces éléments en place, la question de l’efficacité réelle d’un programme de prévention reste centrale. C’est l’adoption réelle de changements positifs et la réduction des comportements à risque qui permettent à la fin de mesurer l’efficacité réelle des actions menées. Une comparaison de la prévalence des maladies ciblées dans un groupe ayant suivi un programme de prévention par rapport à un groupe similaire hors programme est un des moyens à privilégier pour établir une évaluation concrète.
Dans le cadre du programme « Mon Bilan Cardio », nous constatons à l’heure actuelle une forte croissance dans l’intégration des patients. Ainsi, 1 000 patients avaient réalisé la consultation médicale autour des résultats du questionnaire en 2023 et 1 000 patients en ont fait de même sur la première moitié de l’année 2024.
Les retours d’expériences patients et médecins ainsi que les chiffres sur l’intégration dans le programme peuvent être collectés et analysés facilement grâce aux outils numériques. Ces informations permettent de dégager des axes d’amélioration et facilitent la conception d’un outil de prévention cardio-vasculaire qui connecte toujours mieux citoyens et professionnels de santé.
In fine, au-delà des indicateurs intermédiaires, nous mesurerons à terme la réduction des comportements néfastes pour la santé cardio-vasculaire de ceux qui se sont engagés dans le programme « Mon Bilan Cardio » et en attendant la quantification du bénéfice final, nous apprenons, progressons, innovons sans risque avec l’ambition d’une plus grande efficience, c’est-à-dire d’une meilleure santé à moindre coût.
Article rédigé par DR. Nicolas Leblanc - Directeur Médical et Affaires Publiques de Livi France et Paul Martin-Gousset - Chargé de Mission Affaires Publiques pour Livi France
Médecin Direction médicale LIVI/ KRY France. Référent spécialités et santé mentale
1 moisBravo à toute l'équipe de "Mon Bilan Cardio" !