Former
A entendre les professionnels du recrutement ou des ressources humaines, les "savoir être", les "softs skills" ou "compétences douces", prédominent au moment du choix d’un candidat sur les savoir-faire, les techniques, les procédés concrets aussitôt acquis et aussitôt dépassés par l’accélération des évolutions technologiques. Les savoir-être permettent l’adaptation, les savoir-faire se figent.
Cette idée, si elle connaît pourtant des limites - "la plus grande des immoralités est de faire un métier qu'on ne sait pas" disait Napoléon Bonaparte - n’est pourtant pas exempte de vérité.
Mais, si les savoir être deviennent déterminants, comment former à ces compétences? Avant de répondre à cette question, il faut savoir revenir aux fondamentaux. L’éducation se donne aux plus jeunes. L’âge adulte arrivé, il est parfois, souvent, trop tard. Former aux savoir-être, aux compétences dites douces, paraît difficile "en cours de route". Qui se souvient de la célèbre scène du film "Itinéraire d’un enfant gâté" où Jean-Paul Belmondo apprend à Richard Anconina à dire bonjour ?
Transmettre
Au fond, qu’est ce que former ? Former, c’est développer une aptitude, une qualité, exercer ou façonner l’esprit ou le caractère de quelqu’un. On trouve un exemple : former le goût. Nos synonymes sont cultiver, instruire, éduquer. Nous sommes donc devant un double impératif : former les aptitudes et les qualités, soit donner des éléments concrets d’aptitude à la pratique d’un métier et simultanément, façonner l’esprit de la personne la rendant apte à exercer le même métier.
Former, c’est transmettre, et c’est peut être là que la bât blesse. Si la transmission des savoir faire peut paraître assurée, encore que cette affirmation est peut être à vérifier, notamment dans les métiers d’art rares, où nous ne serions pas capables de faire aujourd’hui ce que les "obscurantistes" du Moyen-Age faisaient, la transmission du savoir-être nous paraît, et c’est un lieu commun, un peu interrompue. Qui ne se plaint pas aujourd’hui du manque de savoir vivre de ses contemporains ?
Former des militaires
Les forces armées en France et partout dans le monde ont formé et forment encore des milliers de jeunes tous les ans. C’est un impératif militaire : les forces armées ne recrutent que des jeunes, et pour ceux qui font carrière, les armées doivent les faire évoluer, à la fois dans leurs métiers mais aussi selon leurs desiderata. Un militaire doit rester au top de ses fonctions, il doit s’entraîner en permanence, se former tout au long de sa carrière.
La formation aux savoir faire est initiale et continue. Tout au long de la carrière, le militaire doit fournir un effort permanent de formation, pour maintenir sa capacité au plus haut niveau, que sa mission soit très technique ou très humaine.
La formation aux savoir être est une formation initiale : nous apprenons aux jeunes gens à être des soldats. C’est une éducation. Le but est d’élever le candidat à la dignité de militaire, de soldat, de sous-officier, d’officier.
Rôle du chef
C’est au chef de transmettre : un vrai chef est un éducateur qui s'efforce de faire surgir chez ceux qu'il a sous ses ordres les possibilités qu’ils ont en eux, possibilités dont parfois ils ne se doutent même pas. Le "chef éducateur" devra voir, au delà des défauts, les qualités profondes dont il faut faire prendre conscience à l'individu, pour qu’il s'applique à les mettre en valeur. Peu à peu, en révélant les qualités, le chef suscite le meilleur, plaçant son subordonné en mesure de réaliser la mission.
Le chef n'est pas le propriétaire d'un trésor réservé à son usage, il est un "éveilleur" d’hommes et de femmes capables de le remplacer, de devenir ses pairs. Il souhaite que le plus humble des subordonnés l’imite, et qu'il lui renvoie le reflet d'un homme libre, créateur, fier. Il se réjouit developper l'initiative, la lucidité, l'esprit de décision. L'éducation donnée par le chef doit aboutir à développer chez l’exécutant l'amour de l'effort, le sens des responsabilités et le goût du travail en commun.
C’est au chef d’insuffler les savoir-être nécessaires, ces compétences douces indispensables. Lorsque ces qualités n’émergent pas, c’est en partie parce que le chef n’a pas su les éveiller. Il ne suffit donc pas de déceler les savoir-être en amont, il faut les faire naître en aval. C’est un des buts de la formation.
Gestion de crise, management, accompagnement, réorganisation, décision.
4 ansBel article. Très vrai mais opinion parfois contestée. J'ai pu le vivre à plusieurs reprises au contact de chefs qui me reprochaient de perdre du temps avec mes subordonnés... ces grands hommes, aujourd'hui très gradés, n'avaient manifestement pas conscience des dégats humains que leur attitude provoquait. De fait, leur légitimité était remise en cause par ceux qu'ils ne considéraient pas. Je pense que ce travers était étroitement lié à une fragilité personnelle, à un manque d'estime de soi, à une crise de milieu de vie subie, à une frustration professionnelle forte...
Avis personnel : Plutôt que "former", je préfère le mot "élever" (mot que vous utilisez d'ailleurs dans votre article, je vous rejoins donc). Un élève, on l'oublie trop souvent, est celui qui, avant tout, doit s'élever. Il ne peut le faire seul, mais il ne peut le faire sans volonté, sans sacrifice. Accompagné, cadré, dirigé,, poussé par son "élévateur", il le fait en montant des marches, vers un but à atteindre qui est pour moi infini et qu'il est donc jamais possible d'atteindre. Il y a tant de choses à apprendre en terme de savoir faire et si peu de temps à notre disposition pour les acquérir. Mais qu'importe, ne restons pas dépités. Tous, élevons nous ! 😉 En pour finir : pour moi, la plus belle des récompenses n'est pas quand les élèves arrivent à exécuter les savoir-faire. La plus belle des élévations est quand nous apprenons de ceux que l'on cherche à élever. 🙂 Ce que je trouve magique dans l'enseignement, c'est quand l'arbre donne un fruit qui donnera un nouvel arbre... La plus belle des transmissions des savoirs.
au service de la jeunesse de France
4 ansFormer est un métier bien difficile, un art je crois. Aujourd'hui, récupérer du personnel doué de savoir-être c'est aussi laisser cette noble tâche difficile aux autres et n'en cueillir que les fruits sans avoir investi...